"La Famille Asada" : les Japonais photographes au-delà du cliché, par un héritier d’Ozu
Troisième film de Ryôta Nakano La Famille Asada, en salles mercredi 25 janvier, retrace la biographie d’un photographe professionnel, d’après l’histoire vraie de Masashi Asada. Une œuvre qui capte la société japonaise comme on ne l’avait peut-être pas vue depuis Yasujirō Ozu (Le Voyage à Tokyo).
Mythologie
Chez les Asada, le père se rêve pompier, la mère femme de Yakuza, et l’aîné pilote de F1. Seul Masashi a réalisé son idéal : être photographe. De son premier boîtier à la consécration, le parcours d’un passionné qui a toujours su ce qu’il voulait faire, en le réalisant. Le sujet de ses photos : sa famille.
« Je ne déteste rien d’autre que de faire plaisir à ma famille« . C’est ce que lance Masashi, alors qu’il passe sa vie à la photographier, en l’exhibant sous tous les atours : un jour mafieuse, un autre en groupe de rock, le lendemain en superhéros… Le photographe capte les fantasmes de sa famille et ceux que ses proches lui inspirent. A travers ces univers, c’est le rapport qu’entretiennent les Japonais avec l’image et la mémoire, qui identifie une mentalité. Si elle est locale, elle relève aussi d’une mythologie internationale.
Beau geste
Les compositions de Masashi Asada sont de pures mises en scène qui visualisent des archétypes piochés dans les souvenirs et les fictions. Mais il y a plus : le Japon est identifié par les plus grandes marques d’appareils sur le marché, et le Japonais photographe est un cliché. Ce que capte Ryôta Nakano, c’est la pensée du monde à travers la photo. Le geste photographique relève lui-même d’une culture, d’une pratique culturelle (cultuelle ?) et pour certains d’un art.
Beau film, beau geste que La Famille Asada. Ryôta Nakano traverse la ville dans tous les sens, l’inonde d’un tsunami, la peuple de personnages hauts en couleurs qui se retrouvent sur un étrange marché où les habitants recherchent leurs photos éparpillées par le séisme. L’on pense parfois à Miyazaki, mais aussi à Truffaut. Masashi est un œil dans l’âme : il raconte des histoires par l’image, il pense la mémoire, tant culturelle que vécue, comme un des beaux-arts.