VIDEO. Succession de Claude Berri : la collection d'art du cinéaste vaudrait-elle trois fois plus que le montant déclaré au fisc ?

Après la plainte de Thomas Langmann, la succession de Claude Berri fait l’objet d’une vaste enquête judiciaire. La justice est à l’œuvre, mais le fisc aussi… car le fils aîné du cinéaste accuse son demi-frère Darius d’avoir dissimulé des œuvres d’art appartenant à leur père. « Dès lors qu’on soustrait une œuvre, c’est qu’on ne va pas être imposé sur la valeur de cette œuvre. Donc là, on a de la fraude fiscale », explique le spécialiste Vincent Drezet à « Complément d’enquête ».

Officiellement, la collection de Claude Berri, féru d’art contemporain, a été estimée à 65 millions d’euros avant les droits de succession. C’est ce que Thomas et son demi-frère ont déclaré aux impôts à la mort de leur père, en 2009. Chacun d’eux a signé un chèque de 16 millions au fisc pour cet héritage. 

Une collection à 65 millions d’euros… ou 202 ?

Mais en épluchant l’estimation officielle transmise au fisc, les journalistes de « Complément d’enquête » ont été surpris par les prix attribués à certaines œuvres : 200 000 euros pour un tableau d’Yves Klein, voilà qui semble peu… Revenant à Thomas Langmann, il a été vendu depuis 1 202 500 euros, six fois plus que la valeur déclarée aux services fiscaux. Autre exemple : un Buren estimé à 150 000 euros, vendu près de 1 million.

Quelle pourrait être la valeur de la collection de Claude Berri ? En se basant notamment sur les ventes réalisées par les deux frères après la mort du producteur et des estimations d’experts sur une partie de la collection, les journalistes sont arrivés à une autre estimation : 202 millions d’euros, trois fois plus que le montant déclaré en 2009. Interrogé, Thomas Langmann assure n’être pour rien dans l’évaluation du prix des œuvres réalisée au décès de son père, même s’il a pu en tirer avantage.

Comment est fixé le prix d’une œuvre d’art ?

« Complément d’enquête » s’est adressé à un commissaire-priseur, l’un de ceux auxquels les héritiers ont recours pour connaître la valeur de leurs biens. Avec quarante ans de salle de ventes à son actif, Dominique Ribeyre est une sommité dans ce métier. Les journalistes lui ont demandé son avis sur ce qui est « probablement la plus grosse succession de ces dix dernières années ».

Les règles du marché de l’art sont particulièrement strictes : avant de donner une estimation sur la valeur d’une pièce, le commissaire-priseur, en tant qu’officier ministériel assermenté, doit en contrôler l’état, l’origine, l’authenticité. Ce qui, pour Dominique Ribeyre, requiert au minimum trois minutes par objet. Or l’acte de dévolution successorale indique qu’en 2009, son confrère n’aurait passé que deux heures et quinze minutes pour estimer la valeur des 637 œuvres d’art qui se trouvaient dans l’hôtel particulier de Claude Berri…. Soit 12 secondes par objet.

Sous-évaluer, « une pratique courante »

Cette prisée éclair a été réalisée par un haut cadre d’une prestigieuse maison de ventes. Dans un enregistrement que l’équipe de « Complément d’enquête » s’est procuré, cet expert reconnaît que « c’est une pratique courante dans les déclarations de succession, de sous-estimer. On travaille dans l’intérêt des héritiers, c’est-à-dire en essayant de leur faire payer le moins de droits possible, d’une manière raisonnable… ».

Extrait de « Au nom du père, du fisc et de Claude Berri », un document à voir dans « Complément d’enquête » le 20 mai 2021.

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