"L'Exorciste selon William Friedkin" : le réalisateur explique le film le plus terrifiant du cinéma dans un documentaire exceptionnel en VOD

Prévu pour la salle, L’Exorciste selon William Friedkin d’Alexandre O. Philippe, projeté à la Mostra de Venise et à Sundance, est disponible en VOD sur My Canal. Il vaut vraiment le détour. La gestation du film, le tournage épique, le rôle de la peinture et de la musique… autant d’étapes que dévoile le réalisateur : passionnant.

« Un film sur la foi »

Quand sort L’Exorciste le 25 décembre 1973 aux Etats-Unis, la date semble une provocation. Sur la possession démoniaque d’une fillette à Washington, le film sent le soufre à Noël. On parle d’évanouissements dans les salles, de vomissements (avec sacs papier distribués aux spectateurs), et même de crises cardiaques ! Le film fait la une des journaux. Son réalisateur, William Friedkin, est aux anges. Après avoir inventé le polar urbain avec French Connection en 1971 (Oscar du meilleur réalisateur 1972), il réinvente le film d’horreur. Le film aura deux suites, engendrera une foule de copies aux Etats-Unis, en Italie, en Grande-Bretagne, en Espagne, en Asie, même en Turquie, et une récente série TV.

« L’Exorciste a pour sujet la foi », dit Friendkin. Ce que l’on savait à sa vision, est décrypté par son réalisateur. « Croyant », le cinéaste avait ce sujet en tête quand il est tombé sur le roman de William Peter Blatty, best-seller en 1971 (13 millions d’exemplaires en un an). La Warner lui donne carte blanche. Sa vision diverge de celle de l’écrivain, mais ils s’entendent. Blatty est copoducteur du film, tant il s’est investi dans son roman.

Coups de feu sur le plateau

L’anecdote est connue, Frienkin a tiré plusieurs coups de révolver sur le tournage pour provoquer une réaction chez ses acteurs. D’autres y ont déjà eu recours (John Huston). Cela profite à la légende. Il a giflé un prêtre lors d’une scène pour obtenir ce qu’il en voulait… La presse s’est émue de voir une si jeune actrice, Linda Blair, subir les outrages qu’on connaît à l’écran. A quatorze ans, l’actrice joue depuis ses huit ans et dira s’être amusée sur le plateau.

Frienkin a un casting en or : Max Von Sidow, Ellen Burstyn, J.J. Cobb, et un jeune acteur dans le rôle central du père Karras, Jason Miller, inconnu et remarquable. La vision que Frienkin a de son film éclate dans sa lutte avec Blatty sur l’introduction du film en Irak. Le romancier veut l’enlever, le réalisateur y tient mordicus. Sur d’autres points de son adaptation aussi, il a raison. L’Exorciste réalisera 6 699 322 entrées en France jusquà aujourd’hui, un record inégalé pour le genre. C’est le 9e film le plus vu de tous les temps aux Etats-Unis, avec un total de plus de 110 millions d’entrées. Un phénomène.

Peinture et musique

L’exposé de Frienkin prend tout son sens quand il aborde des points plus inattendus, comme son approche picturale et musicale du film. Il s’attarde en profondeur sur le sujet, c’est le miel de ce documentaire. Il évoque son rapport au Carravage et à Magritte, dont il s’inspire pour le plan emblématique du film qui deviendra l’affiche.

Frienkin a par ailleurs un lien privilégié avec la musique. Ayant commandé une partition au célèbre Lalo Schifrin, il la refuse, ce qui entraîne une rupture définitive entre les deux artistes. Schifrin réutilisera sa composition pour Amittyville, la maison du diable (1980). Recyclage. Le réalisateur découvre le premier album de Mike Olfield, Tubular Bells et l’utilise comme thème principal : le titre fait un carton et lance le tout jeune label Virgin qui fera fortune.

Faisant appel à de nombreux extraits de ses films et à d’autres cinéastes, Friedkin explique son Exorciste au coin du feu. Il le resitue dans sa filmographie, explique sa continuité dans son œuvre et ses ambitions de cinéaste. Prolixe en confidences et anecdotes dans ses nombreuses master classes, il l’est tout autant à l’écran. Une leçon de cinéma.

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