La mort dans les films de super-héros, un outil dépassé ?
Dans les films de super-héros, la mort est souvent utilisée comme un moyen de faire avancer l’intrigue. Est-ce pour autant toujours nécessaire ?
En avril dernier, une campagne publicitaire très particulière a été affichée sur l’un des nombreux panneaux de la ville de Los Angeles. Un texte, simple et efficace, né du désespoir des fans de Marvel Studios et d’Iron Man : ramenez Tony Stark à la vie. Le pilier des Avengers n’a en effet pas su vaincre la grande faucheuse, dont l’ombre plane quasi systématiquement au dessus des films de super-héros. Mentors, partenaires, amis, ennemis, famille, personnages principaux comme secondaires… Personne n’est à l’abri. La mort est avant tout utilisée comme un outil scénaristique censé influencer l’expérience des protagonistes, tout comme celle des spectateurs. Ne serait-il pas temps de changer de méthode ?
Dans le cas d’Avengers Endgame et d’Iron Man, le sacrifice de ce dernier a surtout servi de point final à son arc narratif dans le MCU, rendant impossible un quelconque retour, et pas seulement parce que Robert Downey Jr a décidé de passer à autre chose. Sa mort a aussi influencé le destin des autres héros, et notamment de Spider-Man, son protégé. On se retrouve ainsi dans le cas où un jeune protagoniste doit faire des adieux prématurés à son mentor, un retournement de situation classique qui a pour but de l’aider à ouvrir les yeux sur ses capacités et à devenir indépendant. D’autres fois, c’est un proche qui peut perdre la vie.
Parfois, les morts ne reposent pas en paix très longtemps. Ce fut par exemple le cas de Steve Trevor dans Wonder Woman 1984, revenu dans le monde des vivants à la suite d’un voeux. Dans le blockbuster, le retour du grand amour de l’Amazone est doux-amer. Il n’est pas vraiment présent puisque son esprit est bloqué dans le corps d’un autre homme, et il finit tout de même par retourner là d’où il vient. Sa présence expresse, au-delà d’incarner le côté romance à l’Hollywoodienne de ce second volet, avait ici pour but d’aider l’héroïne à faire son deuil, mais aussi de surprendre le public qui le pensait parti pour de bon.
Comme mentionné plus haut, la disparition tragique d’un personnage n’affecte pas seulement le développement des protagonistes, elle touche aussi les spectateurs. Qu’elle soit inattendue ou non, tout est souvent fait pour que l’impact émotionnel et la valeur dramatique soient forts, que le public en ressorte touché voire parfois choqué. Si il est difficile de renier le fait que cette technique fonctionne, on peut tout de même questionner son utilité. Dans de nombreux cas, on a plutôt l’impression que tuer un personnage est un réflex, une solution de facilité. Par exemple, la mort d’Iron Man était-elle vraiment nécessaire à son arc narratif ? N’aurait-il pas pu tout simplement prendre du temps pour lui, que cela corresponde ou non aux canons des comics ?
Les héros ont-ils vraiment besoin de perdre un proche pour ouvrir les yeux ? Dans le cas de Wonder Woman, n’aurait-il pas été préférable d’explorer le duo formé par Diana et Steve plutôt que de le briser et d’ajouter un traumatisme supplémentaire aux origines de l’héroïne ? Le décès d’un personnage peut parfois être plus frustrant qu’efficace, en plus de perdre une partie de son sens s’il n’est pas définitif. C’est également un outil tellement utilisé qu’il en est devenu prévisible, enlevant parfois toute sensation de surprise pour les spectateurs. Le deuil reste néanmoins un sujet intéressant à aborder, à condition que cela soit bien fait. La mort dans les films de super-héros, et plus largement dans le cinéma, est un élément qui fonctionnera toujours, et sera vecteur de discussions et de réactions. Son intérêt dans un long-métrage dépendra finalement de la façon dont elle est écrite, et la place qu’elle prend dans le développement et la caractérisation d’un personnage. Elle n’est cependant pas le seul outil qui existe, et il serait bon que les scénaristes s’en souviennent.
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