Albert Dupontel veut « retrouver la joie furieuse de faire du cinoche »

  • Albert Dupontel avait déjà réuni 600.000 spectateurs pour « Adieu les cons » rien qu’en octobre 2020.
  • Le film a également reçu sept César, dont ceux de meilleur film et meilleur réalisateur.
  • L’acteur et réalisateur a profité des confinements pour voir des films et écrire un nouveau scénario.

Sept César et un sourire pour son retour dans les salles. 
Albert Dupontel est ravi de voir Adieu les cons revenir au cinéma le 19 mai, après avoir attiré près de
600.000 spectateurs sur le seul mois d’octobre 2020.

Rappelons à tous ceux qui l’ont manqué qu’il s’agit de la rencontre d’un employé suicidaire, d’une coiffeuse atteinte d’une maladie incurable et d’un archiviste aveugle a séduit le public en faisant rire, pleurer et réfléchir avec une grande tendresse. Souriant et modeste, l’acteur et réalisateur a reçu 20 Minutes pour reparler du film, mais aussi parler de ses activités pendant les confinements et clamer son amour intact pour le 7e Art.

Vous n’êtes pas intervenu après avoir remporté vos César, ça ne vous a pas fait plaisir ?

Les récompenses au cinéma, ce n’est pas forcément un signe de qualité. Je trouve ça même gênant d’être défini comme le meilleur. Je comprends qu’on puisse être le meilleur en foot ou en tennis, mais du point de vue de l’art, c’est subjectif. Le goût est quelque chose de très intime. Comme la sexualité et la religion, il ne concerne que les individus. Le meilleur film est celui que vous avez aimé. Le meilleur vin est celui que vous appréciez, même si c’est une piquette locale. J’ai connu des voyages culinaires dans des gargotes et je me suis emmerdé dans des restaurants gastronomiques.

C’est pour cela que vous n’êtes pas venu à la cérémonie ?

Je ne l’ai même pas regardée, je n’ai pas la télé. Je suis cohérent par rapport à cela. Déjà, quand Bernie a été cité dans la catégorie « premier film » en 1997, je n’y suis pas allé. Le film était une protestation, peut-être une protestation petite-bourgeoise, mais une protestation tout de même ! Cela aurait ridicule d’aller chercher un César. J’ai été soulagé de ne pas l’avoir pour Bernie, mais je ne suis pas arrogant. Entre cracher dans la soupe et se rouler dedans, il y a une nuance.

Vous n’avez vraiment ressenti aucune joie ?

Depuis 30 ans, je me situe en équilibre sur le rebord de l’assiette. Je n’ai jamais fait ce métier pour la gloire, mais parce que j’en ai besoin. Je considère les échecs et le succès comme des dommages collatéraux. La joie n’est pas mon truc, dans le meilleur des cas, je suis satisfait. Quand je fais un film, j’ai un peu d’estime de moi pendant quinze jours, trois semaines. Pas plus. La seule chose qui m’a vraiment soulagé, c’est de me dire que ces récompenses allaient obliger le distributeur à ressortir en film en salle.

C’est important pour vous la salle de cinéma ?

Le rapport qu’on a avec un film est différent quand on le voit sur grand écran. Tellement plus forte. Ce lien existera longtemps. Le cinéma en salle va sans doute évoluer, mais il ne mourra pas. C’est une soumission joyeuse, le seul endroit où on peut se laisser emporter face à des personnages plus grands que soi ! Ce besoin-là existera toujours : on aura toujours envie de s’asseoir dans une salle devant un grand écran.

Cela ne vous a pas trop manqué pendant les confinements ?

J’ai vu pas mal de films conseillés par le grand Bertrand Tavernier, plusieurs par jour. Un le matin, un l’après-midi et d’autres pendant la nuit. Il m’envoyait des listes de films à voir, des merveilles à découvrir. Quand il ne m’a plus répondu, j’ai su qu’il n’allait pas bien. Peu de temps avant sa mort, il m’avait dit avoir revu Au revoir là-hautet que cela lui avait fait oublier sa pancréatite, tant le film l’avait fait voyager. Il aimait passionnément le cinéma. C’était un homme d’une grande générosité qui aimait faire partager sa passion.

Avez-vous eu des idées pour un nouveau film ?

J’ai écrit une première version d’un conte sur la politique dont le titre est Second tour. J’avais envie de parler des gens qui nous gouvernent et qui sont incapables de reconnaître leurs erreurs. J’y raconte l’histoire d’un quadragénaire lancé en politique et d’une journaliste qui enquête sur lui alors qu’elle l’a connu à l’école. Je sais que je raconte toujours un peu la même chose, mais je tends à me rapprocher de plus en plus de la réalité depuis dizaine d’années. En apprenant à mieux m’aimer, j’ai aussi appris à mieux apprécier les autres et à trouver comment me montrer plus compréhensif envers mes personnages.

Comment voyez-vous votre avenir ?

Je vais peaufiner ce scénario, trouver des sous, réunir des acteurs et mon équipe, puis inventer des trucs rigolos sur le tournage. J’aimerais retrouver la joie furieuse qu’on ressent quand on fait du cinoche. En espérant qu’une résurgence de la pandémie ne reviendra pas torpiller mes plans. Quand Bertrand Tavernier est parti, cela m’a donné une puissante envie de me remettre au travail. C’est ce dont j’ai envie maintenant.

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