20 séries qui ont changé la télévision

Certaines séries n’ont pas fait que marquer les esprits d’un petit groupe de fans, elles ont carrément révolutionné le petit écran.

La vie influence la télévision et vice-versa, c’est pour cela que certaines productions ne resteront pas seulement gravées dans l’histoire grâce à leur qualité, mais grâce à l’impact qu’elles ont eu au-delà de leur propre public. Véritable reflet de notre société, les séries peuvent donner une idée des mentalités et surtout de leur évolution au fil des ans. La représentation fait partie de facteurs qui servent à mesurer cette évolution, mais ce n’est pas tout. Le changement peut surgir de différentes façons grâce à un concept, une manière de filmer voire même quelques mots prononcés à une heure de forte audience. Voilà 20 séries qui, chacune à leur façon, ont changé la télévision.

1. I Love Lucy (1951-1957)

Impossible de parler de séries aujourd’hui sans mentionner la série culte I Love Lucy, créée par Jess Oppenheimer, Madelyn Pugh et Bob Carroll Jr et diffusée sur CBS entre 1951 et 1957. Avec son héroïne Lucy Ricardo (Lucille Ball), cette sitcom a révolutionné le petit écran à plus d’un aspect et ouvert la voie à des classiques comme Friends, Seinfeld et de nombreux autres. Du point de vue technique, I Love Lucy est la première série à avoir recours à un public live plutôt qu’à des rires enregistrés, et à être tournée avec trois caméras et non une comme ses prédécesseures. Terminée en 1957, I Love Lucy est depuis restée dans les esprits des téléspectateurs comme une des meilleures séries, notamment grâce à ses nombreuses rediffusions rendues possibles par l’utilisation de films 35mm pour tourner plutôt que d’un kinéscope. Votée meilleure série de tous les temps par un sondage ABC et People Magazine en 2012, la série avait déjà rencontré un succès retentissant lors de sa diffusion.

En plus de Lucy, femme ambitieuse, indépendante et féministe, de nombreux autres personnages viennent compléter les intrigues, notamment son mari Ricky (Desi Arnaz) et sa meilleure amie Ethel (Vivian Vance). I Love Lucy est ainsi la première série avec une distribution d’ensemble où tous les membres du casting ont une importance équivalente. Autre révolution : Lucy est plus drôle que son mari, un concept unique à l’époque (!). Sans parler du fait que Lucille Ball apparaisse enceinte dans un épisode qui est centré autour de la grossesse et de l’accouchement de son personnage – et donc du sien – une intrigue rarissime à l’écran. CBS avait d’ailleurs interdit l’utilisation du mot “pregnant” (“enceinte” en anglais) dans l’épisode qui a donc contourné les règles et fut titré “Lucy is enceinte”. Que ce soit du point de vue de son format ensuite reproduit par les sitcoms ou de ses thèmes – mariage interethnique, grossesse, indépendance des femmes… – I Love Lucy fait partie des séries révolutionnaires qui ont montré le chemin à suivre pour les productions futures.

2. Star Trek (1966-1969)

Si les séries sont autant le reflet de la réalité aujourd’hui, et que les problèmes actuels sont souvent reflétés dans les intrigues de nombreuses séries – dans une certaine mesure – c’est en grande partie grâce à la toute première série Star Trek. Diffusée sur NBC, la série de Gene Roddenberry a non seulement révolutionné la science-fiction sur le petit écran mais elle a en plus montré qu’il est possible de parler de problèmes contemporains dans n’importe quel genre de série, et pourquoi pas un space opera. Sous ses airs de show de l’espace, Star Trek a servi de commentaire social et de plateforme de discussion pour certains des sujets les plus controversés à l’époque, que ce soit le racisme, la Guerre Froide et beaucoup d’autres choses. Impossible donc de citer toutes les séries qui ont été inspirées par Star Trek, une franchise dont le succès indiscutable lui a permis de continuer jusqu’à aujourd’hui avec Star Trek : Discovery.

3. Saturday Night Live (1975-présent)

Elle est loin d’être la première ou la seule représentante du “variety show” mais difficile de dissocier Saturday Night Live du succès de l’info-tainment. Ce genre qui mélange information et “entertainment” (divertissement) a envahi les petits écrans du monde entier pour dénoncer avec humour les actualités parfois absurdes qui rythment notre quotidien. Avec ses 45 saisons, SNL fait partie des séries les plus longues de la télévision américaine et a permis à de nombreux talk-shows de prendre leur envol. Non seulement parce que de nombreux acteurs et présentateurs sont passés par la série, mais aussi grâce à son style satirique qui a pu inspirer des présentateurs de talk-shows américains célèbres comme Jon Stewart, Stephen Colbert, Bill Maher, Trevor Noah, John Oliver et d’autres.

4. Dynasty (1981-1989)

Ce n’est pas un hasard si la série de Richard et Esther Shapiro a fait son retour sur le petit écran dans un reboot en 2017 et n’a pas tardé à trouver son public. Soap mythique, c’est en partie à Dynasty qu’on doit de nombreuses séries récentes qui n’auraient peut-être jamais vu le jour sans l’existence des Carrington. De Gossip Girl à Desperate Housewives en passant par Devious Maids, le succès des soaps d’aujourd’hui dépend en grande partie de celui des séries comme Dallas et Dynasty qui leur ont ouvert la voie. Bien que les choses se soient mal terminées pour Dynasty, sa renaissance en 2017 est la preuve que le soap-opera est intemporel et qu’il plait, peu importe l’époque.

5. Les Simpson (1989-présent)

Les séries animées pour adultes se sont multipliées ces dernières années et elles le doivent en grande partie à la cultissime série Les Simpson, créée par Matt Groening et diffusée sur la FOX depuis 1989. Homer, Marge, Lisa et Bart font désormais partie intégrante de la culture télévisée, et c’est grâce à un élément en particulier qu’elle restera dans l’histoire. Eh oui, c’est grâce aux Simpson que les références pop-culture sont devenues ultra-populaires partout. Qu’elles soient évidentes ou obscures, les références des Simpson sont devenues sa marque de fabrique avant de s’exporter dans de nombreuses autres séries qui aiment ainsi jouer avec leurs téléspectateurs. Ayant émergé à une époque où les séries animées diffusées en primetime étaient quasi-inexistantes, Les Simpson a donc permis à de nombreuses autres séries animées de suivre son exemple, et notamment Family Guy, Archer, Bob’s Burgers, Rick and Morty ou encore BoJack Horseman.

6. Law & Order (1990-2010)

On ne présente plus la franchise Law & Order – New York, police judiciaire en version française – tant elle fait partie intégrante du petit écran depuis plusieurs décennies. Elle a d’ailleurs été diffusée pendant des années sur TF1 en France et fait l’objet de nombreuses rediffusions sur d’autres chaînes du groupe. Si Law & Order : SVU – New York, unité spéciale est entrée dans l’histoire grâce à ses 21 saisons, c’est bien avec la série originale que Dick Wolf a influencé le genre du procedural drama. Law & Order est si bien intégrée au paysage télévisuel américain qu’il est désormais fréquent d’en retrouver des parodies ou des imitations, facilement reconnaissables grâces au générique de la série et à sa mise en scène. D’un épisode entier de Community à une scène de The Office, de nombreuses séries se sont nourries de ce classique de la télévision reconnaissable par tous. Et au vu du succès de la franchise, le phénomène semble avoir encore de beaux jours devant lui.

7. Twin Peaks (1990-1991 ; 2017)

Jusqu’où peut aller l’étrangeté ? Jusqu’où le public acceptera-t-il de suivre des intrigues surréalistes et une expérience unique avant de lâcher l’affaire ? Avec Twin Peaks, David Lynch et Mark Frost n’ont pas fait que repousser les frontières de l’étrange acceptable à la télévision, ils les ont délimitées. Malgré un pitch en apparence ordinaire – l’agent du FBI Dale Cooper est envoyé dans la ville imaginaire de Twin Peaks enquêter sur le meurtre de Laura Palmer – on découvre vite que la série n’a rien d’un simple drama policier.

Sa cinématographie si particulière continue d’influencer les réalisateurs jusqu’à aujourd’hui mais elle a aussi aidé de nombreux chefs d’oeuvre désormais cultes à voir le jour, comme l’a expliqué le créateur des Soprano, David Chase, au Time. “Tout était mystérieux. Et je ne parle pas juste de savoir quand le criminel a tué la victime. Je veux dire la météo, les arbres, les doughnuts. Les séquences rêvées étaient plus cauchemardesque que tout ce que j’avais pu voir avant – Fellini, Hitchcock. Lynch les a conjurées du fin fond de son inconscient. N’importe quel réalisateur qui fait un drama d’une heure aujourd’hui et qui dit ne pas avoir été influencé par David Lynch ment”.

8. The X-Files (1993-2002 ; 2016 ; 2018)

https://youtube.com/watch?v=YKFxAJ8yH-8

Les notes de son générique sont désormais cultes et même si elle a commencé dans les années 90, X-Files a toujours une influence énorme sur la télévision d’aujourd’hui. Notamment grâce à son univers ultra complexe et étendu qui a lancé une réelle tendance comme nous l’a déclaré Sarah Sepulchre, auteure de Décoder les séries télévisées. “X-Files est la première série à avoir mis en place une mythologie. C’est la première fois que j’entendais ce mot utilisé de cette manière et c’était pour X-Files. Cette mythologie était aussi très novatrice à l’époque”. L’idée d’avoir non seulement une affaire à résoudre par épisode sur le modèle du feuilleton, mais d’avoir aussi une intrigue plus globale qui s’étend sur des saisons entières permet de créer un univers bien plus vaste et d’investir le téléspectateur d’une toute autre façon. Et la mise en place de ce “fil rouge” est un procédé qu’on retrouve désormais dans quasiment toutes les séries.

“X-Files a fortement influencé plein de séries qui viendront ensuite comme Alias ou Lost. D’ailleurs les créateurs de Lost ont fait partie de l’équipe de scénaristes de X-Files. Ils ont repris autant le “bon” (le mystère, le complot, le suspense, la volonté de travailler les biographies des personnages) que les « impasses » (il y a des incohérences, des choses abandonnées dans X-Files, et Lost va clairement se perdre aussi dans sa mythologie). X-Files a aussi lancé plus largement les séries de la méfiance, notamment celles qui remettent en question les appareils d’état (House of cards, Boss) ou les institutions phares comme les avocats et la magistrature (The Good Wife, Damages), l’institution policière (The Wire, The Shield), etc.” Que ce soit sur le fond ou sur la forme, la série de Chris Carter a donc réellement transformé le monde des séries.

9. Friends (1994-2004)

On ne la présente plus aux fans de séries, et pour cause. Près de 16 ans après la diffusion de son tout dernier épisode – qui a attiré 52,5 millions de téléspectateurs et est ainsi devenu l’épisode de série le plus vu des années 2000 aux Etats-Unis et le 5e season finale le plus vu de l’histoire de la télévision – Friends a toujours autant de succès auprès des sériephiles. Déjà à ses débuts, le réalisateur James Burrows, qui était familier avec le concept d’une série basée sur un groupe d’ami grâce à son travail pour The Mary Taylor Moore Show ou encore Cheers, a su que Friends allait être un hit. Lors d’une récente apparition publique, il est revenu sur un de ses moments clés avec le casting. “J’ai voulu emmener les 6 gamins à Vegas pour leur parler. C’était juste moi et eux-six, et je leur ai dit “C’est la dernière fois que vous pouvez choisir de rester anonymes”. Je savais que Friends avait de grandes chances de réussir”. Et il avait visé juste.

Courteney Cox, Jennifer Aniston, Lisa Kudrow, David Schwimmer, Matt LeBlanc et Matthew Perry sont devenues des stars internationales et ont révolutionné le petit écran grâce à deux facteurs : leur bande d’amis soudée et leur alchimie à l’écran et en-dehors. Bien que Seinfeld lui ait ouvert la voie et que la sitcom Living Single, centrée sur la vie de 6 amis noirs vivant à Brooklyn ait eu un concept très similaire, c’est bien Friends qui est entrée dans l’histoire. Et c’est notamment parce qu’elle est unes des premières sitcoms à succès à avoir été focalisée sur un groupe d’amis plutôt que sur des couples déjà formés ou une famille, comme c’était plus souvent le cas dans les années 1990. Aucun personnage plus âgé que Rachel, Monica, Phoebe, Joey, Chandler et Ross ne vient leur servir de figure de mentor ou de chaperon. Et si les producteurs se sont d’abord inquiétés du manque de crédibilité que cela pouvait apporter à la série, c’est sûrement ce même facteur qui est devenu déterminant pour le public.

Comment ne pas s’identifier à une bande de jeunes dans la vingtaine en (relative) galère financière et qui ne savent pas ce qu’ils veulent faire de leur vie ? Comme les jeunes adultes qui les ont regardés, les Friends ont dû comprendre et s’adapter au monde autour d’eux en s’aidant les uns les autres et en donnant au monde entier une nouvelle perception de la “famille”. En 2019, Friends était la 2e série la plus regardée sur Netflix US après The Office, prouvant ainsi qu’elle a toujours de beaux jours devant elle.

10. Buffy contre les vampires (1997-2003)

Monument de la télévision, de nombreux livres ont été dédiés à Buffy contre les vampires et à la façon dont la série de Joss Whedon a complètement transformé la télévision. Il existe même des cours universitaires dédiés à la série, les “Buffy Studies”, qui montrent l’importance de l’impact de la série dans le monde réel. Disons simplement que sans Buffy, les séries qui existent aujourd’hui seraient radicalement différentes puisque, diffusée à quelques d’années d’écart, elle a eu un impact tout aussi fort que Les Soprano sur les productions télévisées. Difficile d’imaginer des séries comme The Vampire Diaries avoir le succès qu’elle a eu sans que Buffy n’ait servi de précurseure au teen-show fantastique. De son héroïne figure de proue du féminisme à la télévision à ses thèmes complexes illustrés par des démons en passant par la représentation des lesbiennes grâce à Willow et Tara à une époque où les LGBTQ+ se faisaient plus que rares à l’écran, Buffy a servi – et sert toujours – d’inspiration à des centaines de séries, de showrunners et de scénaristes.

En plus du fond, Buffy a aussi changé la façon dont les scénaristes envisageaient les séries sur la forme. Continuant sur la même lancée que X-Files, Buffy contre les vampires est devenue une série dans laquelle les épisodes indépendants avec un démon détruit dans les dernières minutes côtoyaient des fils rouges qui s’étendaient sur toute la saison. La sérialisation des intrigues a poussé d’autres séries à suivre cet exemple et à écrire des arcs plus longs qui s’achèvent à la fin d’une saison avant qu’un nouvel “ennemi”, littéral ou figuratif, ne débarque. Normal que ça vous dise quelque chose, c’est un schéma qu’on retrouve dans The Walking Dead, Supernatural ou même Scandal.

11. Sex & the City (1998-2004)

Carrie Bradshaw a beau avoir fait quelques faux-pas, la série Sex and the City diffusée sur HBO il y a des années reste une référence en matière de séries. De son langage débridé à sa représentation de la sexualité en passant par l’énonciation du désir féminin, Sex and the City a révolutionné de nombreux aspects de la représentation des femmes à la télévision, et on lui doit notamment des séries comme Girls, Broad City ou même Big Little Lies. Même si Carrie, Miranda, Samantha et Charlotte incarnent de nombreux clichés, on ne peut enlever à la série de Darren Star le fait qu’elle ait été une des rares séries de l’époque focalisée sur des femmes et dans laquelle les hommes n’étaient que les accessoires à leurs intrigues. A leur façon, les héroïnes ont grandement contribué à changer l’image des personnages féminins à la télévision, sans parler de leur impact sur la popularité d’HBO… Tellement d’ailleurs, que la série revient bientôt dans le revival « And Just Like That… »

12. Les Soprano (1999-2007)

On ne présente plus la série de David Chase qui, pendant 6 saisons, a captivé l’attention de milliers de téléspectateurs. Et en plus de ses intrigues au poil et de ses personnages cultes, Les Soprano a aussi entraîné une révolution sur les petits écrans, ouvrant la voie à des séries comme The Wire, Mad Men ou encore Breaking-Bad. Eh oui, pendant que les “procedural dramas”, ces séries au format fixe avec un crime – une enquête – une résolution et pouvant se regarder plus ou moins dans n’importe quel ordre prospéraient sur les chaînes de network, le câble a pris le contre-pied pour proposer l’anti-héros et le développement de ses personnages sur long terme. Les Soprano s’appuie sur un thème connu et apprécié du public pour le remettre en scène d’une façon nouvelle et apporter aux séries un tout nouveau genre de respect, autant de la part des critiques que des téléspectateurs.

Comme Brett Martin le souligne dans son livre Des hommes tourmentés : L’âge d’or des séries, “Des hommes qui tantôt vacillent, tantôt réfrènent leur nature sauvage, telle est, depuis toujours, la fabuleuse histoire de l’Amérique, celle que l’on retrouve, quoiqu’il arrive, dans le média dominant du moment. (…) Dans sa complaisance, sa concupiscence, sa cruauté alternant avec ses regrets, son mal-être dévorant, Tony était (…) l’Américain moyen”. Les Soprano a grandement contribué au développement d’un nouveau genre de drama, notamment sur le câble, et, sans elle, beaucoup de personnages désormais cultes n’auraient jamais vu le jour. Bryan Cranston a d’ailleurs rendu hommage à l’acteur James Gandolfini en soulignant que sans Tony Soprano, Walter White, anti-héros de Breaking Bad, n’aurait jamais existé.

I’m saddened by James Gandolfini’s passing. He was a great talent & I owe him. Quite simply, without Tony Soprano there is no Walter White.

13. Lost (2004-2010)

Passée l’année 2004, il est impossible de voir une série avec une île et/ou un crash d’avion sans penser à Lost, monument de la télévision crée par Jeffrey Lieber, J. J. Abrams et Damon Lindelof. Dès son tout premier épisode, Lost a montré la couleur en balançant un pilote événement. Grâce à environ 14 millions de dollars investis dans le pilote – faisant de ce double épisode le plus cher de la télévision à l’époque – ABC a marqué le début d’un phénomène qui a changé notre façon de regarder les séries.

En plus de faire du fantastique un style mainstream apprécié par tous, Lost a aussi donné lieu à une communauté de fans acharnée et très dévouée qui a passé des heures à spéculer et à établir des théories pour résoudre les nombreux mystères de la série. C’est grâce à la fameuse “mystery box” de JJ Abrams que le public est devenu plus engagé et plus suspicieux envers tout ce qu’il voit. Puisque Lost a eu recours à de nombreux easter eggs, références et autres clins d’oeil, cela a poussé le public des séries à penser que tout est lié, que dans chaque série avec quelques mystères il est possible de trouver des easter eggs et de prédire la fin en regardant le premier épisode.

Lost transforme le téléspectateur lambda de consommateur passif à fan actif de façon globale et plus seulement pour les séries de niche. Mais cette nouvelle façon de regarder une série a un gros inconvénient : elle mène souvent à de grosses déceptions voire désillusions. Même si cela peut paraître difficile à envisager pour certains fans, les showrunners et les scénaristes n’ont pas forcément trouvé les réponses à toutes leurs questions dès le début de leur série. Lost a donné naissance à un nouveau standard de cohérence qu’elle-même n’a pas su respecter et certaines séries, notamment Game of Thrones, continuent d’en souffrir. Et s’il faut une preuve supplémentaire que la série a bien sa place dans l’histoire de la tv, il suffit de voir à combien de reprises Lost a été imitée sans jamais être égalée.

14. The L Word (2004-2009)

Il a fallu attendre 2004 pour qu’une série soit entièrement dédiée à la représentation des lesbiennes, et rien que ce fait en lui-même en dit déjà assez sur la façon dont The L Word a définitivement transformé le paysage télévisuel. La série créée par Ilene Chaiken souffre de nombreux défauts, notamment de manque de diversité dans son casting, mais on ne peut lui enlever le mérite d’avoir été unique en son genre lors de sa diffusion sur Showtime. Il faut dire que les séries focalisées entièrement sur le quotidien d’un groupe de femmes lesbiennes et bisexuelles ne couraient pas les rues… (Et les choses n’ont pas tant changé que ça aujourd’hui).

Dans la série documentaire Sex and the series d’Iris Brey, diffusée sur OCS, la showrunneuse Ilene Chaiken souligne que la série est née de l’importance de représenter la catégorie de population lesbienne qui, malgré sa présence très discrète à l’écran, existe bien. The L Word est faite par des femmes, pour les femmes et son succès prouve que le public pour ce genre de série est bien présent. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles Bette, Shane et Alice ont fait leur retour le 8 décembre 2019 auprès de nouveaux personnages dans le reboot The L Word : Generation Q.

Bien qu’elle n’ait pas été la première à s’intéresser au désir féminin, TLW est une des rares séries qui nous donne à voir des femmes à travers le regard d’autres femmes, que ce soit devant ou derrière la caméra. Depuis sa diffusion, The L Word est et restera donc LA série lesbienne de l’histoire de la télévision, celle à laquelle les séries LGBTQ+ des années futures seront toujours comparées et celle qu’on a en tête lorsqu’on parle de lesbiennes à la télévision. En devenant une référence dans son entièreté, The L Word a marqué le paysage télévisuel mais reste, encore aujourd’hui malheureusement, unique en son genre.

15. Community (2009-2015)

Si vous avez vu Community, vous savez déjà pourquoi la série de Dan Harmon se trouve dans la liste des séries qui ont transformé la télévision. Alors qu’elle raconte simplement l’histoire d’un groupe d’étudiants d’université publique qui, a priori, n’ont aucun intérêt en commun, Community se transforme vite en comédie bourrée d’humour et d’amour. Jamais aucune série avant elle – ni aucune série depuis – n’a joué avec les codes de la télévision d’une façon aussi poussée. Community est la série qui casse le 4e mur de la façon la plus évidente, et la plus réussie, que n’importe quelle autre série.

En grande partie grâce au personnage d’Abed, féru de pop-culture, Community possède une dimension méta qui pousse le téléspectateurs à constamment remettre en question son statut de téléspectateur et de consommateur de pop-culture. La série fait des références à elle-même, mais aussi à des films et à d’autres séries (Cougar Town, The Office…), de sorte que les personnages donnent parfois l’impression de savoir qu’ils sont des personnages de séries. Bien qu’elle n’ait pas été la première à le faire, la popularité de Community a fortement encouragé les séries à jouer subtilement sur leur dimension méta pour, de temps en temps, briser le 4e mur et faire un clin d’œil à ses téléspectateurs comme une sorte de “private joke” entre eux et la série.

16. Black Mirror (2011-présent)

Les dystopies, ces récits fictifs d’un futur proche qui semble inévitable tant il est basé sur notre propre présent, n’ont pas attendu Black Mirror pour nous terrifier ; mais la série de Charlie Brooker et Annabel Jones créée pour Channel 4 a clairement redéfini le genre. D’abord grâce à son format qui permet aux téléspectateurs de regarder les épisodes dans n’importe quel ordre puisqu’ils sont tous indépendants les uns des autres. Et ensuite avec un épisode interactif lancé sur Netflix qui pourrait changer la façon dont on consomme les séries à l’avenir.

Black Mirror : Bandersnatch, diffusé le 28 décembre 2018 sur Netflix, permet au téléspectateur de prendre des décisions pour le personnage principal et ainsi d’influencer la suite de l’épisode. Selon les choix effectués, les gens ne vont donc pas regarder la même chose. Un concept qui existait déjà et notamment dans « les livres dont vous êtes le héros », mais que Netflix a mis à disposition d’un public global grâce à sa plateforme de streaming. Le service de VOD, qui utilise déjà des algorithmes pour prédire les goûts de ses abonnés, continue de créer du contenu fait sur-mesure pour ses utilisateurs, quitte à individualiser une expérience qui était jusque-là partagée par les fans des mêmes programmes.

17. Game of Thrones (2011-2019)

S’il y a bien une série qui a complètement changé la façon dont on regarde la télévision, c’est Game of Thrones. La création de David Benioff et Dan Weiss a explosé tous les records ces dernières années, et elle a montré que les séries sont devenues un phénomène global dont le succès peut désormais se mesurer à l’échelle mondiale. Mise en ligne par le site Winter is Coming, la carte ci-dessous montre tous les pays dans lesquels la première saison a été diffusée.

Des dizaines de pays ont pu découvrir Game of Thrones la même année à part quelques exceptions, et les téléspectateurs du monde entier se sont tous retrouvés devant la diffusion du tout dernier épisode de la saison 8 de Game of Thrones pour voir la série se terminer. Un autre aspect révolutionnaire de la saga de George R.R. Martin réside dans son genre puisque grâce à son très large public, la série a prouvé que la fantasy n’est pas réservée à une minorité d’adeptes mais peut séduire le grand public. Enfin le budget colossal de Game of Thrones, qui a investi 15 millions de dollars par épisode pour sa dernière saison, a propulsé les budgets de séries vers les sommets. Convaincues que l’investissement peut largement être rentabilisé, de nombreuses productions n’hésitent plus à verser des milliers pour leur série. Et si Amazon s’apprête à investir plus d’un milliard de dollars dans sa série Le Seigneur des Anneaux, c’est notamment parce que Game of Thrones et son succès retentissant sont passées avant elle.

18. Girls (2012-2017)

La série créée par Lena Dunham et produite par Judd Apatow a révolutionné un aspect du petit écran en particulier et son titre annonce directement la couleur. C’est évidemment la représentation des femmes, de leurs corps, de leur plaisir et de leurs relations que Girls a mis en avant, en brisant au passage pas mal de tabous et en repoussant toujours un peu plus les limites de ce qu’on pensait pouvoir montrer à la télévision. Avec une cinquantaine de scènes de sexe pour 62 épisodes, Girls en a fait voir de toutes les couleurs à ses héroïnes et, par-là, à son public aussi. Mais comme le souligne Iris Brey dans sa série documentaire Sex and the Series, tirée de son livre éponyme et disponible sur OCS, si Girls a marqué une génération ce n’est pas seulement à cause des relations amoureuses et des scènes de sexe les accompagnant, c’est aussi et surtout grâce à la représentation de la complexité des amitiés féminines qui peuvent se révéler aussi intimes voire davantage encore qu’un rapport sexuel.

Le sexe dans Girls n’est pas tant un élément érotique qu’un outil utilisé par les héroïnes pour se découvrir et pour essayer tant bien que mal de trouver leur place dans le monde. Plutôt que des scènes sexy et parfaitement orchestrées, la série montre donc les réalités déplaisantes qui peuvent accompagner les rapports sexuels, les corps loin des diktats de beauté habituellement véhiculés dans les séries, les gênes ou les rires qu’ils peuvent provoquer. Mais c’est grâce à ces mêmes rapports que Marnie (Allison Williams), Hannah (Lena Dunham), Jessa (Jemima Kirke) et Shoshanna (Zosia Mamet) peuvent poursuivre leur quête d’identité qui se suffit à elle-même comme base de l’intrigue de la série.

Girls a ainsi montré que les séries peuvent représenter le quotidien avec une authenticité parfois brutale mais réaliste. Sans être glamour, sexy et sans se soumettre aux codes habituels de la représentation du sexe dans les séries, elle a prouvé qu’il est possible de captiver son public avec un autre élément crucial : l’amitié féminine. Difficile d’imaginer le succès de Broad City et de ses 2 héroïnes à l’amitié fusionnelle sans une série comme Girls et, avant elle, comme Sex & the City pour lui ouvrir la voie. Cela ne signifie pas pour autant que la série est sans défauts puisqu’elle a beaucoup été pointée du doigt à cause de ses personnages cantonnés à une catégorie de population : blanches, issues de milieu privilégié et vivant confortablement à New York malgré leurs “galères”, signe qu’il y a encore des progrès à faire.

19. La Casa de Papel (2017-présent)

Elle a beau être très récente, La Casa de Papel n’a pas fini de faire parler d’elle. La série d’Alex Pina a été créée pour une chaîne espagnole mais c’est en arrivant sur Netflix qu’elle a connu un succès international. Et c’est notamment grâce à elle qu’en 2018, Netflix a gagné plus d’argent grâce à ses abonnements partout dans le monde que grâce au contenu streamé aux Etats-Unis. Le monopole de la langue anglaise pour les séries est terminé et les téléspectateurs du monde entier ont pu avoir la preuve que les séries non-anglophones valent le détour. Grâce à La Casa de Papel qui a connu un succès retentissant, Netflix est plus à même d’investir dans des productions européennes et le public sait désormais que s’aventurer en terrain inconnu en termes de découvertes télévisuelles peut être très payant. Preuve en est le succès international d’autres créations européennes comme Elite (Espagne), Dark (Allemagne) ou encore Lupin (France).

20. Pose (2018-présent)

La télévision continue d’évoluer et il y a toujours moyen d’améliorer la représentation sur les petits écrans, c’est ce qu’a prouvé la série Pose, créée par Ryan Murphy, Brad Falchuk et Steven Canals. Comme l’a souligné un récent rapport GLAAD  – Alliance gay et lesbienne contre la diffamation – Pose est entrée dans l’histoire de la télévision grâce à son casting qui rassemble le plus grand nombre de personnages transgenres réguliers jamais vus dans une série. Rien qu’à elle, Pose a représenté plus de la moitié des personnages transgenres des séries diffusées sur le câble en 2018-2019.

Contrairement à la plupart des autres séries, les personnages transgenres de Pose sont au cœur des intrigues et forment leur propre petite famille qui interagit régulièrement, de la même façon qu’on a pu voir les lesbiennes de The L Word avoir leur groupe ou les gays de Queer as Folk. Le graphique ci-dessus venant du rapport de GLAAD déjà cité souligne que les personnages transgenres restent très rares à la télévision, d’où le statut unique en son genre de Pose. En 2018-2019 dans les séries diffusées sur le câble, seules 7 femmes transgenres et un personnage non-binaire étaient présents, preuve que beaucoup pourraient s’inspirer de Pose et de sa représentation.

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