Marquis n’est plus Sade et sort « Aurora », son nouvel album
En faisant le deuil de leur chanteur Philippe Pascal, les trois membres du légendaire groupe rennais ont changé de nom. Ils publient, ce vendredi 5 février, Aurora, un album où ils se réinventent sans tirer un trait sur le passé.
Septembre 2019, Philippe Pascal, chanteur de Marquis de Sade, se donne la mort. La nouvelle crée d’autant plus d’émotions que le groupe, légende du rock rennais de la fin des années 1970, était revenu, depuis 2017, sur le devant de la scène, porté par des concerts à la vitalité et à l’intensité intactes.
Un nouveau disque était même sur les rails. « Après le concert de reformation à Rennes, Philippe m’avait dit qu’il était partant pour continuer, notamment pour de nouveaux titres », se souvient le guitariste Frank Darcel.
Avec Thierry Alexandre (basse) et Éric Morinière (batterie), il se pose la question : faut-il tout arrêter ? « On savait pertinemment que si on mettait les disques durs à la poubelle, on arrêtait définitivement la musique. »
Parce qu’il y a déjà eu des maquettes, des sessions d’enregistrement aux États-Unis avec les guitaristes Ivan Julian et Richard Lloyd, héros du punk new-yorkais, et le saxophoniste James Chance.
Parce que des esquisses de chansons existent, nourries pour certains par les indications de Philippe Pascal : « Il souhaitait une chanson avec des cassures rythmiques. Plutôt que de regarder derrière, on a décidé d’écrire ce morceau qui est devenu Glorie. »
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« On savait que ce serait dur »
Après quelques mois de flottement, Marquis de Sade reprend le chemin des studios, fort du soutien de Christian Dargelos et Sergeï Papaïl, présents sur un titre de l’album, membres historiques du groupe, du saxophoniste Daniel Pabœuf, qui jouait sur les deux premiers albums de Marquis de Sade et, forcément, d’Étienne Daho, dont l’histoire est liée au groupe : « Le fait qu’ils nous apportent leur soutien, ça a été très important. On savait que ça serait dur, Étienne m’avait prévenu que nous serions jugés sur le fait de continuer… »
D’autres voix – le Néerlandais Dirk Polak, Marina Keltchewsky de Tchewsky & Wood – viennent donner corps aux chansons. Le groupe pense ainsi faire appel à plusieurs invités pour finir le disque.Et puis le musicien belge Ad Comminato, qui joue des claviers sur le disque, glisse à Frank Darcel le nom d’un jeune chanteur belge qu’il connaît, Simon Mahieu.
Un disque « plein de cicatrices »
Des musiques lui sont envoyés, il y pose sa voix. Ça fonctionne ! « À partir de là, on s’est décidé à monter un groupe avec Simon. Et c’est devenu Marquis . »
Simon Mahieu n’avait jamais entendu parler du groupe avant, sa voix offre une unité à Aurora. Ce Flamand de 32 ans apporte une nouvelle fraîcheur à un disque « plein de cicatrices », comme le dit lui-même Frank Darcel.
Un album dont l’enregistrement s’étale sur trois ans, de Rennes à New York en passant par Amsterdam, Bruxelles et le Finistère, en pleine pandémie… Un disque qui a mobilisé vingt-quatre musiciens, qui s’exprime aussi bien en français qu’en anglais, en allemand ou en portugais. Une œuvre gigogne, à la fois hommage et nouveau départ, qui désarçonne avant de séduire.
Une étonnante vitalité
L’ombre de Philippe Pascal accompagne Aurora : dans Je n’écrirai plus si souvent, la chanson hommage d’Étienne Daho, dans les thèmes abordés (l’obsession européenne, les espérances déçues), dans Le voyage d’Andrea, cet instrumental qui termine le disque et sur lequel sa voix absente semble planer.
Celle de Dominic Sonic, décédé en juillet, fait aussi passer un frisson sur Ocean, belle reprise du Velvet Underground. Mais le disque ne sombre pas dans le pathos. Au contraire.
Malgré les épreuves, Marquis garde une étonnante vitalité, dans sa rythmique imparable, ses guitares agressives, ce son post-punk parfaitement maîtrisé.
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Avec Aurora, une histoire commence, une autre s’achève sans que Marquis n’y pose un point final. Après être resté en suspens, le groupe espère désormais tourner. Plusieurs concerts sont déjà programmés. Frank Darcel évoque même les États-Unis. « Marquis de Sade à New York, Philippe en rêvait. J’y tiens vraiment. Qui sait… »
Aurora, Caroline distribution/Universal. 13 titres, 44 min.
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