La crise du Covid pousse les célèbres fanfares britanniques au bord du gouffre

Au centre de la vie des régions minières depuis des décennies, les fanfares britanniques sont menacées par le coronavirus et ses restrictions. Même la plus célèbre d’entre elles, The Grimethorpe Colliery Band, de la région du South Yorkshire, dans le nord de l’Angleterre, n’est pas épargnée.

« C’est vraiment une question de survie », explique à l’AFP son directeur Andrew Coe, « on est au bord du gouffre, on risque d’être à court d’argent sans doute cet été ».

De nombreuses fanfares ont déjà disparu à l’époque de Margaret Thatcher

Les fanfares minières, célèbres pour leurs uniformes colorés et leur concurrence féroce, ont déjà traversé des périodes difficiles, notamment lors des grèves de 1984-1985 contre la fermeture des mines. L’histoire de la fanfare de Grimethorpe, fondée en 1917, a même été portée à l’écran en 1996 dans le film Les Virtuoses avec Ewan McGregor.

Selon le directeur de la fanfare, celles-ci ont connu un tournant à l’époque de Margaret Thatcher, Première ministre de 1979 à 1990. « Soumises à une forte pression, nombre d’entre elles ont malheureusement disparu », souligne-t-il.

Mais pendant la pandémie, ce ne sont pas fermeture des mines et licenciements qui pèsent sur les fanfares, mais l’impossibilité de jouer pour gagner de l’argent, et même celle de simplement pouvoir répéter.

Un financement participatif et des aides pour renflouer les caisses

Avec l’assèchement des caisses en mars l’année dernière, les groupes se sont tournés vers le financement participatif sur internet. Plus de 140 000 livres sterling (160 000 euros) ont jusqu’ici été récoltés sous l’égide de l’association de soutien des fanfares Brass Bands England. L’organisme a aussi bénéficié de 227 000 livres de la part du fonds de soutien pour la culture. Au total, le gouvernement britannique a déboursé 1,6 milliard de livres pour aider la culture pendant la pandémie.

Ces aides se sont révélées vitales pour certaines fanfares, qu’elles soient célèbres comme celle de Grimethorpe ou modestes. « Elles sont au bord de l’extinction sans rentrées d’argent », observe Kenny Crookston, directeur général de Brass Bands England.

Les revirements successifs concernant les restrictions pour lutter contre la propagation du virus ont suscité à plusieurs reprises de faux espoirs. « Notre plus gros problème, c’est l’incertitude », explique Kenny Crookston. L’été dernier, certaines régions ont vu un assouplissement des restrictions, qui ont permis aux fanfares de jouer devant un public observant des règles de distanciation.

Au centre de la vie locale

« Nombre de groupes ont dépensé et se sont donné du mal pour avoir une salle impeccable, installer des écrans, une bonne ventilation, juste pour pouvoir se rassembler, ne serait-ce que partiellement », souligne Kenny Crookston. Mais avec le resserrement des règles, et le troisième confinement depuis début janvier, les répétitions ont dû cesser. On ignore pour l’heure quand répétitions et spectacles pourront reprendre.

En plus des difficultés financières, les groupes s’inquiètent également de l’effet à long terme de la pandémie sur la vie locale. A l’entrée de la ville de Sandbach, dans le nord-ouest de l’Angleterre, un panneau la désigne comme le berceau du mondialement connu Foden’s Brass Band. Selon son manager Mark Wilkinson, qui y joue depuis 29 ans, la fanfare se trouve au coeur de la vie sociale.

Des concours sur internet

En temps normal, le groupe né en 1900, donne 30 concerts par an et répète chaque mardi et jeudi pendant deux heures. « On a tellement à faire, on passe beaucoup de temps ensemble », souligne-t-il. « Au-delà du groupe, on est amis, nos femmes sont amies. On a tous de jeunes enfants qui sont amis. »

Il n’a pas ménagé ses efforts pour que le groupe joue sur internet, y compris lors de concours pour se mesurer aux autres fanfares de la région. Mais pour lui, il a été difficile de manquer en tant que représentant de l’Angleterre les championnats d’Europe de fanfare en Lituanie en mai dernier.

Jouer manque aussi à John Barber, trombone solo et directeur de l’orchestre. « Quand vous êtes 25 ou 26 sur scène à tout donner, ce n’est pas simplement le volume et le timbre du son qui vous cloue à votre siège », souligne-t-il, « il y a une responsabilité collective, et une fierté, parce que vous représentez votre groupe ».

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