Eurovision 2021 : une forme "de miroir des évolutions géopolitiques européennes", estime un chercheur

Au-delà du concours musical, l’Eurovision, dont la finale se tient samedi 22 mai, est une forme « de miroir des évolutions géopolitiques européennes », estime samedi sur franceinfo Florent Parmentier, secrétaire général du centre de recherches sur la vie politique française (Cevipof) au sein de Sciences Po.

franceinfo : Voyez-vous dans ce concours autre chose qu’un concours purement musical et artistique ?

Florent Parmentier : Je crois qu’il faut regarder l’Eurovision sous deux angles : sous l’angle d’un miroir de l’image que les Européens se font. L’Eurovision, c’est un concours qui a commencé avec sept pays, qui s’est élargi progressivement depuis l’ouest du continent aux pays nordiques, du sud puis d’Europe centrale et orientale dont la Russie. Donc on a vraiment cette dimension de miroir des évolutions géopolitiques européennes. Et puis on a aussi, de la part de ces différents États, quelque chose qui se joue qui est de l’ordre de leur image de marque, c’est aussi notable. Un certain nombre de pays profitent de l’Eurovision, un événement vu par grosso modo 200 000 personnes, pour essayer de montrer une autre image.

Sur cet enjeu d’image, gagner l’Eurovision, c’est gagner l’un des programmes les plus anciens au monde…

C’est effectivement un programme qui remonte aux années 1950. C’est un programme qui permet de mettre en avant un certain nombre d’États qui n’ont pas forcément les industries culturelles et créatives visibles. On peut penser à la Moldavie avec un joueur de saxo qui est devenu « Epic Sax Guy ». On a comme ça un certain nombre d’histoires de l’Eurovision qui sont associées à différents pays. Et disons que l’un des intérêts précisément de l’Eurovision est de nous rappeler aussi un peu ces différentes cartes postales. Et pour ces différents pays, je tiens à dire que l’importance de ce concours est presque inversement proportionnelle, très souvent, à la taille du pays. Un État comme l’Islande, par exemple, est extrêmement mobilisé. Cela a permis à certains États aussi de s’affirmer sur la scène internationale musicale. On peut penser à la Suède, qui a eu de nombreuses victoires ou à l’Irlande.

Y a-t-il aussi des enjeux économiques dans l’organisation de l’Eurovision ?

Clairement, l’Eurovision est peut-être le moment fort de l’Union européenne de radiodiffusion. Il y a tout un marché, en quelque sorte, qui s’est développé, une attention très forte, une audience européenne extrêmement puissante. Donc ça, c’est effectivement ce qui plaide pour cette espèce d’influence économique. Mais le fait d’être un pays organisateur n’est pas nécessairement intéressant en termes économiques, sauf en termes d’image, sans doute. L’Eurovision est également un grand vecteur de transformations sociales du continent européen. Le concours attire l’attention sur des valeurs de tolérance, sur des valeurs diverses qui ont trouvé là un support et un lieu pour s’exprimer.

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