ENTRETIEN. Inspiré des Beatles et de Divine Comedy, Olivier Rocabois voit la pop en grand
L’album le plus pop « anglaise » de ces derniers mois est l’œuvre d’un Breton exilé en région parisienne. À 46 ans, Olivier Rocabois réussit, pour son premier disque sous son nom, un pur chef-d’œuvre. Amoureux des Beatles et de Divine Comedy, précipitez-vous : « Olivier Rocabois Goes Too Far » va illuminer vos journées.
Le débit est rapide, le ton volubile. Les propos passent du coq à l’âne sans jamais se départir d’un enthousiasme communicatif. Olivier Rocabois est à l’image de sa musique : exubérant.
À 46 ans, ce Morbihannais d’origine réussit, pour son premier disque sous son propre nom, un pur chef-d’œuvre. Il s’intitule Olivier Rocabois Goes Too Far (Olivier Rocabois va trop loin). Parce que dans la vie, parfois, il paraît qu’il en fait un peu trop, Olivier. « C’est ce qu’on me dit », sourit cet activiste de la pop depuis une vingtaine d’années, régisseur de théâtre en région parisienne dans le civil.
Mais il en faut de l’audace, et un brin de folie, pour gravir les montagnes. Les siennes sont musicales : les Beatles, Divine Comedy, les Beach Boys, David Bowie, Harry Nilsson… De sacrées références auxquelles Olivier Rocabois se frotte avec panache.
Certains ont trouvé une formule pour résumer le personnage : « La voix de Paul McCartney dans le corps de Philippe Katerine. » Pour le corps, on ne se prononcera pas ; pour la voix, c’est parfois troublant.
Loin d’être un simple copiste, Olivier Rocabois écrit des chansons fortes en émotions : « Mon album, c’est à la fois une célébration de la vie et une oraison funèbre. » Délire égomaniaque ? Olivier Rocabois pousse peut-être le bouchon loin mais il le fait tellement bien !
Quand on entend ton nom, on ne s’attend pas à écouter un album de pop baroque anglo-saxonne…
Oui, j’ai un patronyme qui sonne plus musique de nos terroirs (rires). Mais ça fait 46 ans que je l’habite, ce nom, il est grand temps de l’assumer. À quoi ça servait de me cacher derrière « The quelque chose » ou de prendre le nom d’un bled inconnu du Sussex pour garder un ancrage pop anglaise. Cela aurait été ridicule.
Tu sors ton premier album à 46 ans, tu as pris ton temps…
C’est mon premier album sous mon nom mais j’avais déjà publié au sein de All If, un groupe créé dès 2008, un album en 2017. J’ai dû sortir une demi-douzaine d’albums autoproduits et on a beaucoup tourné avec All If. Cela fait des années que je joue de la musique. J’ai fait partie de plusieurs groupes, à Rennes où j’ai fait mes études puis à Paris, dans des styles souvent pop et glam-rock.
Tu as aussi prêté ta voix à d’autres groupes…
Cela fait une dizaine d’années que je participe à différents projets plus portés sur l’électronique, Slove, Kool Bandits. J’ai aussi collaboré avec Christophe Vaillant de Superhomard, mais j’hésitais à me lancer vraiment en solo. Pourtant, je me sentais souvent à l’étroit, j’avais envie de prendre les commandes. Mais, comme beaucoup de musiciens, je souffre du complexe de l’imposteur. J’ai appris la guitare et le piano en autodidacte, je suis un piètre instrumentiste mais j’arrive à reproduire les mélodies que j’ai en tête, c’est l’essentiel.
Ton album s’intitule Olivier Rocabois Goes to Far (Olivier Rocabois va trop loin). C’est vrai ?
C’est ce que certains me disent (rires). C’est ma nature profonde. Depuis gamin, je suis tout feu tout flamme. Intituler mon album comme cela, c’est un acte de foi. Et puis c’est aussi une référence à Paul McCartney qui avait pensé intituler l’album solo qu’il envisageait de sortir en 1965-1966, quand il était encore avec les Beatles, Mc Cartney Goes to Far.
Les Beatles sont une grosse référence pour toi. On sent dans ton album ton respect et ton amour pour la pop des sixties…
Pas que mais oui, il y a des clins d’œil dans les collages sonores par exemple de Arise Sir Richard qui est dédié à Ringo Starr, dans mon envie d’avoir un album où les titres s’enchaînent à travers de petits singles. Il n’y a pas de trou. Je sais bien que ce n’est plus trop la tendance d’écouter les albums en entier mais j’espère que certains se laisseront tenter par l’expérience : elle ne dure que 42 minutes.
D’où te vient cette passion pour la pop britannique ?
J’ai une nature anglophile. J’adore les Monty Python, Peter Sellers. À la fin des années 1980, au lycée Lesage, à Vannes, j’avais des potes qui étaient dans le délire Madchester. On dansait sur les Happy Mondays, les Stone Roses… J’aimais bien mais sans plus. C’est en arrivant à Rennes en 1993, pour mes études, que j’ai vécu une épiphanie pop avec l’album des Boo Radleys, Giant Step. J’avais l’impression d’être au bon endroit au bon moment. Il y avait des groupes locaux comme Lighthouse très pop et beaucoup de concerts : Suede, Blur, Divine Comedy…
Comme Neil Hannon de Divine Comedy, tu as un penchant pour la pop orchestrale…
Mes années rennaises sont liées à Divine Comedy : il a sorti ces cinq premiers albums durant mes cinq ans à Rennes. C’est une grosse influence. Mais, lors des ces années, j’ai aussi vécu les premières rave partys, les soirées Guy L’Éclair et de l’association Praxis. J’ai des souvenirs de fêtes en forêt de Brocéliande, où en after on écoutait aussi bien The Orb que Coltrane et le folk de Nick Drake et John Martyn.
Toutes ces références ont-elles nourri ton album ?
Oui, évidemment. J’en parle dans une de mes chansons, Hometown Boys. Il y a de tout ça et même un peu de jazz dans les cuivres. Mais ça reste tout de même accessible avec des mélodies mémorisables. J’ai eu envie que ce disque soit à la fois une célébration de la vie et une oraison funèbre. En fait, si je devais résumer mon disque, je dirais que c’est la teuf au funérarium !
Olivier Rocabois Goes Too Far, Acoustic Kitty/Microcultures, 42 min, 9 titres
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