Que peut bien signifier le corset ultraféminin de Billie Eilish ?

Elle a fait des tenues extralarges sa signature mode. Et pourtant, Billie Eilish a su bousculer cette silhouette immédiatement identifiable en faisant la couverture du Vogue britannique moulée dans un corset. De quoi faire parler.

On a plutôt l’habitude de voir Billie Eilish en tenues amples, dans un style sportswear clinquant, cheveux noir et vert. Jamais en blond platine, ou en silhouette moulée version pin-up. Alors forcément, lorsque la chanteuse américaine a les honneurs de la couverture de l’édition britannique de Vogue et s’offre une apparition en corset satiné Alexander McQueen, – arrangée façon Marilyn Monroe ou Madonna (en réalité, son look est tout droit inspiré de la pin-up Betty Brosmer, star des années 50 et pionnière du fitness) selon les références des observateurs – la photo suscite l’attention.

À fortiori quand la jeune pop star de 19 ans a fait jusqu’ici du vêtement extra-large un acte militant : un, pour rappeler que son corps lui appartient et deux, pour s’éloigner des remarques bilieuses dont elle est parfois victime sur les réseaux sociaux. Les années de souffrance dûe à la dysmorphie corporelle que la chanteuse a subies dans son adolescence étant encore vives dans son esprit.

Le corset, un symbole avilissant ?

Billie Eilish en Une du Vogue britannique, juin 2021.

Pas du genre à montrer d’habitude sa peau ou ses courbes, Billie Eilish apparaît ici sanglée dans un corset soulignant parfaitement sa taille, affirmant une féminité frontale et désinhibée. À ceux qui s’interrogent sur l’utilisation de cette pièce connotée, symbole d’oppression du corps des femmes, elle répond sans détour dans les colonnes du Vogue : «Si je suis honnête avec vous, je déteste mon ventre, voilà pourquoi». Et tant pis, si cela apparaît comme un paradoxe, une contradiction dont elle est bien consciente. «Montrer son corps et montrer sa peau – ou pas – ne devrait pas vous enlever le respect», ajoute-t-elle.

La question du corps formaté a souvent été au cœur des revendications de la chanteuse. L’une des dernières remonte à mars 2020, lorsqu’elle a projeté sur scène une vidéo la montrant en train de se déshabiller. En voix off, ses paroles dénonçaient les injonctions sexistes et contradictoires subies depuis le début de sa carrière. Et pointaient en particulier ceux qui l’accusent de ne pas jouer la carte du sexy. «Si ce que je porte est confortable, je ne suis pas un femme. Si je retire des couches (de vêtement, NDLR), je suis une salope», expliquait-elle.

Retour à la vie normale

Plus globalement, la vue d’une Billie Eilish haut perchée et moulée dans des vêtements sexy en une du magazine de mode britannique laisse poindre une nouvelle tendance qui tranche avec le «tout confort» amplifié par les confinements et la généralisation du télétravail de ces derniers mois. Celle d’une mode féminine et d’apparat, qui célèbre le retour à une vie normale.

«Au sortir de la crise, le fait de recintrer sa taille, d’afficher un joli décolleté un brin plus profond que d’habitude, de choisir un tailleur-pantalon à l’imprimé hyperflamboyant ou de dévoiler un peu plus de peau que les saisons passées est une manière pour les femmes de dire : “Regardez-moi, je suis en pleine santé, en pleine forme. Même si j’ai été déprimée, comme tout le monde, je m’en suis sortie et je suis prête à me relancer dans de nouveaux projets.” », analysait Florence Müller, historienne de la mode et directrice du département textile et mode du Denver Art Museum dans un article du Madame Figaro décryptant la mode dans le monde d’après. Faut-il donc voir le corset en déclaration d’optimisme ? On vous laisse trancher.

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