Yuriko Koike, rare figure japonaise de la lutte pour l'égalité des sexes en politique

Yuriko Koike, gouverneure de Tokyo, est l’une des rares femmes de pouvoir au Japon. Déterminée à faire évoluer la place des japonaises dans la sphère politique mais aussi plus largement dans la société nipone, elle apporte un souffle féministe et optimiste plus que nécessaire.

Yuriko Koike, réélue gouverneure de Tokyo en 2020, est en première ligne dans lutte contre le sexisme en politique au Japon. Femme de pouvoir rare au pays du soleil levant, elle s’est confié sur sa détermination à poursuivre ce combat dans les pages du journal nipon Mainichi Shumbun. Des propos traduits et publiés par le Courrier International ce dimanche 11 avril.

«Depuis des années, je travaille pour qu’il y ait davantage de femmes aux postes à responsabilité, a dit la gourveneure de 68 ans. Pour cela, j’ai créé des mesures et j’ai soutenu Shinzo Abe (l’ancien premier ministre NDLR) lorsqu’il a voulu augmenter la part des femmes parmi les ministres. J’ai demandé à de nombreuses femmes de se présenter aux élections pour favoriser l’accès de tous à la politique.» Elue gouverneure de Tokyo pour la première fois en 2016, devenant ainsi la première femme à accéder à ce poste, elle reconnaît qu’il est «très difficile pour les femmes de se faire sélectionner comme candidates dans les partis politiques existants». «C’est la raison pour laquelle, lorsque je me suis reconvertie en politique, j’ai choisi une formation qui venait d’être fondée», explique cette ancienne présentatrice à la télévision.

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Un cercle vertueux

Successivement ministre de l’Environnement (de 2003 à 2006) et ministre de la Défense (2007), Yoriko Koike est optimiste quant à l’avenir des japonaises. «Au Japon, de plus en plus d’entreprises promeuvent enfin des femmes à des postes à responsabilité, comme cadre exécutif ou administrateur externe», affirme la gouverneure. Elle décrit ainsi un «cercle vertueux» dans lequel il serait reconnu que «la présence des femmes chez les cadres améliore les bénéfices». Constat qui entraînerait ainsi «un changement de la culture d’entreprise, et donc une modification de la structure de la société.» «Les femmes, une fois à un poste à responsabilité, aiguiseront encore davantage leurs compétences et accélèreront ce cercle vertueux.» CQFD.

Un premier mandat sous le signe des JO

Lors de sa première élection au poste de gouverneur, Yuriko Koike, parlant couramment l’anglais et l’arabe, avait pour principale tâche de superviser la préparation des Jeux Olympiques de Tokyo 2020, plus de 50 ans après les précédents jeux d’été de Tokyo en 1964. «Je mènerai la politique de Tokyo d’une manière sans précédent, ce sera le Tokyo que vous n’avez jamais vu», avait-t-elle alors déclaré d’une voix enrouée par deux semaines de campagne. «J’ai appelé à un Tokyo où chacun peut briller, des enfants aux personnes âgées et aux handicapés, afin que la vie de tous devienne meilleure», avait-elle ajouté.

Le premier mandat de gouverneur de madame Koike, qui devait s’achever juste après l’ouverture des jeux, a depuis été prolongé et les JO repoussés en raison de la pandémie de Covid-19. Parmi les dossiers plus ou moins explosifs qu’elle a dû gérer : les préparatifs des Jeux – qui ont déjà connu plusieurs couacs embarrassants (corruption, stade trop onéreux, plagiat du logo…) et leur coût faramineux ; une économie de la taille de celle de l’Indonésie ; le problème du manque de crèches ; la possiblité d’un tremblement de terre majeur… Sa gestion de la crise du coronavirus a par ailleur été saluée.

Ségolène Royal, diplômée de l’ENA en 1980, est la première femme française à avoir accédé au second tour d’une élection présidentielle. (Parempuyre, le 5 février 2020.)

Diplômée de l’ENA en 1985, Florence Parly est l’actuelle ministre des Armées. (Paris, le 10 juillet 2019.)

Brigitte Grésy, diplômée de l’ENA en 1989, est la présidente du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes depuis 2019. (Paris, le 26 janvier 2021.)

Catherine Démier, est la directrice générale du Festival de Cannes depuis 2005. Elle sort diplômée de l’ENA en 1992. (Paris, le 20 avril 2006.)

« Cool Biz »

Yuriko Koike a obtenu un diplôme de sociologie de l’Université du Caire en 1976 et a travaillé dans sa jeunesse comme interprète en arabe. En 1978, elle interview le dictateur libyen Mouammar Kadhafi et le chef palestinien Yasser Arafat pour une chaîne de télévision japonaise. Devenue très connue en tant que présentatrice, Yuriko Koike elle entre en politique en 1992. Lors de son mandat de ministre de l’Environnement, elle mène la campagne antiréchauffement climatique baptisée «Cool Biz» qui encourage fonctionnaires et «salarymen» à retirer la cravate et tomber la veste au lieu de forcer sur la climatisation pendant les étés japonais étouffants et humides. Communicatrice avisée, elle organise un défilé de mode et parcourt les allées elle-même pour promouvoir cette campagne.

Son mandat de ministre de la Défense ne dure, lui, que deux mois. Le ministère est alors aux prises avec une affaire de fuites d’informations sensibles sur le destroyer américain Aegis et empêtré dans des luttes intestines. Effet collatérale de ce scandale auquel elle n’est pas mêlée, elle se voit contrainte de s’éclipser. Un temps perçue comme une étoile montante du Parti libéral démocrate, aux commandes dans l’archipel de façon quasi ininterrompue depuis 1955, elle apparaît même comme la possible première femme Premier ministre du Japon.

Un duo de choc à la tête des J.O

Depuis, une autre femme a rejoint l’organisation des Jeux Olympiques : Seiko Hashimoto, 56 ans, nommée présidente du comité d’organisation des JO de Tokyo-2020 le 18 mars dernier. Elle remplace Yoshiro Mori, contraint de démissionner après des propos sexistes ayant fait scandale. «Si vous augmentez le nombre de membres exécutifs féminins, et que leur temps de parole n’est pas limité dans une certaine mesure, elles ont du mal à finir, ce qui est embêtant, avait-il déclaré. Les femmes ont l’esprit de compétition. Si l’une lève la main, les autres croient qu’elles doivent s’exprimer aussi. Et tout le monde finit par parler en même temps.» La nomination de madame Hashimoto apporte un changement radical à la tête de l’organisation. Avec désormais deux féministes à des postes de pouvoir, il souffle comme un vent de révolution sur le Japon.

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