VIDEO. Quand Annie Girardot a voulu réhabiliter Gabrielle Russier en jouant dans le film "Mourir d’aimer" sorti en 1971
« Elle aimait ses élèves, et, parmi ses élèves, elle aimait Christian, dit au magazine ’20h30 le samedi’ Michel Viot, prêtre et ami du jeune homme. C’est une suite d’amour, parce que c’est une histoire d’amour. » Les parents du lycéen de seize ans et demi, qui vit une liaison amoureuse à Marseille avec sa professeure d’une trentaine d’années, portent plainte. Gabrielle Russier est incarcérée. Condamnée en juillet 1969 à un an de prison avec sursis pour détournement de mineur, elle est menacée de révocation.
« Elle ne va pas supporter l’univers carcéral, ce qui va énormément la fragiliser, explique Agnès Grossman, auteure du livre Annie Girardot, le tourbillon de la vie (éd. Pocket). Sa vie se détruit, commence à se défaire. Et ça, elle ne le supporte pas. » L’enseignante se suicide dans son appartement marseillais le 1er septembre 1969. Cet événement devient un fait de société. Georges Pompidou, élu trois mois plus tôt président de la République, est interpellé par un journaliste lors d’une conférence de presse : « Qu’avez-vous pensé de ce fait divers qui pose, je crois, des problèmes de fond ? »
« Elle se sentait une grosse responsabilité »
Le chef de l’Etat, normalien reçu premier à l’agrégation de lettres et auteur d’une Anthologie de la poésie française (éd. Hachette), répond en citant quelques vers d’un poème de Paul Eduard : « Comprenne qui voudra / Moi mon remords ce fut (…) / La victime raisonnable (…) / Au regard d’enfant perdue (…) / Celle qui ressemble aux morts / Qui sont morts pour être aimés. » Pour les Français, Gabrielle Russier a désormais un nom. La comédienne Annie Girardot va lui prêter son visage. « C’est la première fois que cela m’arrive et ce n’est pas du tout de la présomption, mais je m’étais dit que si on doit faire un film là-dessus, il était évident que je devais le faire, je ne sais pas pourquoi… » disait l’actrice dans un entretien télévisé.
Annie Girardot, disparue en 2011, va incarner l’enseignante dans le film Mourir d’aimer, réalisé par André Cayatte. « Il ne faut pas essayer de démystifier les miracles. Si elle a eu ce rôle, c’est qu’elle le méritait. Et elle l’a rendu totalement crédible », rappelle le cinéaste Claude Lelouch. La biographe Agnès Grossman précise : « Elle voulait réhabiliter Gabrielle Russier et se sentait une grosse responsabilité. Elle vomissait avant de jouer… C’était dur. Le film [sorti en 1971] est une lame de fond qui bouleverse la société française. Sa notoriété se confond avec celle de Gabrielle Russier. Et il y a une telle identification que quelqu’un, en la croisant dans la rue, lui a dit : ‘Madame, si on avait su, on vous aurait sauvée.' »
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