Viande et écologie, est-ce compatible ?

Au-delà de nos préférences alimentaires, l’élevage a un impact sur la planète. Etat des lieux et solutions pour faire des choix plus vertueux.

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« Adieu veau, vache, cochon, couvée … » pleurait Perette dans La Laitière et le pot au lait. Ce vers de La Fontaine revient à l’esprit dès que nous entendons parler des émissions à effet de serre du bétail ou que nous voyons les vidéos chocs de maltraitance de l’association L214. Renoncer aux viandes industrielles et transformées au profit de produits carnés locaux, bio ou labellisés que l’on dégusterait en petite quantité, voilà qui pourrait concilier plaisir, santé et meilleure conscience environnementale et éthique.

Un impact écologique mondial avéré

Les filières de l’élevage produisent au niveau mondial 14,5% (source : Organisation pour l’alimentation et l’agriculture des Nations Unies (FAO), 2013) des émissions de gaz à effet de serre à l’origine du réchauffement climatique. Les principales sources d’émissions sont la production, le transport de l’alimentation animale, et le méthane issu de la digestion des ruminants. Ainsi 1kg de viande bovine équivaut à une émission de 27kg de gaz à effet de serre (source : INRAE) ; 1kg de viande d’agneau émet 39kg de GES. Bien loin devant le porc (12,1kg), la dinde (10,9kg) ou le poulet (6,9kg), mais qui, élevés de façon industrielle posent le problème de la pollution de l’eau.

Un bétail mieux nourri, de multiples bienfaits

« Interdire le soja pour nourrir les animaux ferait du bien à la planète et améliorerait la qualité des viandes. En mangeant de l’herbe, le bétail absorbe des antioxydants et fabrique des Omega 3 en ruminant » soutient Pierre Weill, fondateur et président du label Blanc-Bleu-Cœur. En diversifiant les cultures avec du lin, de la luzerne et du lupin, les 8.000 éleveurs affiliés à son projet développent des modes de production favorables à la santé des sols, à la biodiversité et à l’environnement.

Le bien-être animal, un nouveau gage

Plusieurs scandales ont certainement coupé l’appétit des Français qui ont baissé leur consommation de viande de 12% (INSEE). L’occasion pour la Commission européenne et le Conseil national de l’alimentation (CNA) de réviser la législation sur le bien-être animal et d’expérimenter des étiquetages sur les modes de production et d’élevage. Cinq libertés fondamentales garantissent le bien-être animal et favorisent la qualité de la viande : ne souffrir ni de faim ni de soif ; ne pas connaître l’inconfort ; ne subir ni douleurs, blessures ou maladies ; vivre dans un environnement approprié à ses besoins et enfin n’éprouver ni peur ni stress (source : L’Organisation mondiale de la santé animale).

Plus de bio, moins d’antibios

Depuis 2011, l’État français a lancé deux plans Eco-antibio pour réduire l’usage des antibiotiques dans les élevages. Le résultat semble être un succès avec une réduction, entre 2011 et 2018, de 17% pour les bovins, 45% pour les porcs, 55% pour la volaille et 42% pour les lapins. Sinon, le cahier des charges européen pour l’élevage bio préconise des produits phytothérapeutiques et homéopathiques plutôt que des médicaments chimiques.

Une question de santé aussi

Dix-neuf ans après la crise de la vache folle (1996) qui a tari l’appétence pour la côte de bœuf, l’OMS a accusé la viande rouge et la charcuterie d’augmenter le risque de cancer et recommandé de n’en consommer que 500g par semaine. Pour le nutritionniste Laurent Chevallier, « il n’est pas question d’arrêter les produits carnés, (surtout pour les ados, les jeunes femmes et les seniors), mais plutôt de la réduire à 50g par jour en privilégiant le bio pour ses animaux mieux nourris. » À son menu : viandes maigres (steak haché à 5% de matières grasses), rumsteak, blanc de poulet ou aiguillettes de canard.

Sauver l’élevage

880 000. C’est le nombre de personnes en France qui dépendent de l’élevage. Renoncer à la viande reviendrait à mettre en péril notre terroir. En revanche, en consommer à petites doses et de qualité ferait prospérer notre patrimoine de pâturages et de prairies où les animaux sont mieux traités et soutiendrait paysans, producteurs comme artisans volontaires au bio.

L’avis de notre expert

Haye Van der Werf, ingénieur de recherche à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (l’INRAE) de Rennes.

« Au niveau mondial, les terres agricoles sont rares. Il suffit de regarder le Brésil pour voir les désastres de la déforestation au bénéfice de cultures de soja, pour l’alimentation animale. Cela est très mauvais pour la biodiversité et pour le changement climatique. Cette dépendance au soja n’est pas en accord avec le souhait généralisé de manger local. Quant à l’agriculture biologique émettant moins de polluants et de gaz à effet de serre que l’agriculture conventionnelle, elle est moins productive et nécessite plus d’espace. Si l’on mange bio sans réduire notre consommation de viande, ce sera toujours nocif pour la planète. »

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