Variant brésilien P1 : face à l’inquiétude du corps médical, faut-il interdire les vols en provenance du Brésil ?

Depuis plusieurs mois, la circulation des variants du coronavirus inquiète. Au Brésil, la situation sanitaire est critique, notamment à cause du variant « P1 ». Pour limiter les risques, certains pays européens ont interdit les vols en provenance du Brésil ou imposé une quarantaine. Une décision qui n’a pas été prise par la France et qui inquiète certains professionnels de santé.

Restez informée

Au Brésil, l’épidémie de Covid-19 est hors de contrôle. En mars dernier, 66.000 personnes sont décédées d’une infection au coronavirus, un chiffre alarmant jusqu’alors jamais atteint dans le pays. Si le virus circule autant, c’est notamment à cause du variant brésilien aussi appelé « 20J/501Y.V3 » ou « P1 ». Particulièrement contagieux, il pourrait aussi, selon certaines études, favoriser les risques de réinfection après une contamination avec la souche classique du virus, favoriser les formes et mettre à mal l’efficacité de certains vaccins.

Des travaux parus en mars sur le site de pré-publication scientifique medRxiv révèlaient ainsi que le variant brésilien pourrait être jusqu’à deux fois et demi plus contagieux que les autres souches du coronavirus. Mais ce n’est pas tout : il pourrait aussi être associé à un risque de réinfection de 6,4%, ce qui correspond à une personne sur 16. Une nouvelle étude de l’Association brésilienne des soins intensifs (AMIB) a également révélé que le variant brésilien pourrait entraîner des formes plus graves de la Covid-19. Elle a aussi indiqué que la majorité Brésiliens hospitalisés en soins intensifs dans le pays à cause d’une infection au coronavirus ont moins de 40 ans.

Test PCR avant le vol, attestation sur l’honneur… Des mesures jugées insuffisantes

Face à cette menace, certains pays européens comme le Portugal ont décidé d’interdire les vols en provenance du Brésil ou de prendre des mesures de précaution, à l’instar du Royaume-Uni. Une telle décision n’a pas été prise dans l’Hexagone. Faut-il réellement craindre les conséquences du variant brésilien en France et en Europe ? « Vous devriez vous inquiéter (…) Je voudrais souligner sa gravité car ça pourrait saper les efforts de l’Europe, des États-Unis et de l’Asie à contenir cette pandémie », a expliqué le 13 avril sur Europe 1 Miguel Nicolelis, neuroscientifique et ancien président du comité anti-Covid au Brésil. En cause notamment ? La capacité de mutation de ce variant. « On en est à 17 mutations jusqu’à présent, c’est beaucoup et c’est ce qui peut expliquer que c’est si transmissible », a-t-il précisé.

Pour l’heure, les voyageurs en provenance du Brésil qui arrivent en France doivent justifier d’un motif impérieux et présenter une attestation de déplacement international. Ils doivent également fournir un test PCR négatif de moins de 72h lors de l’embarquement ainsi qu’une déclaration sur l’honneur s’engageant à s’isoler pendant 7 jours à leur arrivée en France. Les voyageurs doivent aussi refaire un deuxième test PCR à l’issue de cette période de 7 jours.

Des mesures jugées insuffisantes par certains professionnels de santé. « Si vous vous contaminez la veille ou l’avant-veille de votre départ et que vous faites un test PCR juste avant de prendre l’avion, ce test sera négatif. Il ne devient positif qu’au bout de quatre, cinq ou six jours après la contamination. De même, le test antigénique qu’on ferait à l’arrivée à Paris serait tout aussi négatif. Donc on va manquer toute une partie des gens qui se seront contaminés dans les jours qui précèdent leur départ », a souligné le 13 avril sur France Inter le professeur Rémi Salomon, président de la commission médicale d’établissement de l’AP-HP.

Variant brésilien : un nombre de voyageurs déjà limité ?

Pourquoi la France n’interdit-elle pas les vols en provenance du Brésil ? Clément Beaune, secrétaire d’État chargé des Affaires européennes, a expliqué que le nombre de voyageurs en provenance du Brésil qui arrivent en France est limité. « Il y a très peu d’arrivées : d’habitude vous avez près de 50.000 personnes qui arrivent du Brésil, on est à 1.000 par semaine aujourd’hui. On a été très sérieux sur la fermeture des frontières », a-t-il expliqué le 11 avril sur LCI.

Le ministre délégué aux Transports, Jean-Baptiste Djebbari, a donné davantage de précisions en expliquant sur LCI que le maintien des lignes était « imposé par le droit ». « Le Conseil d’État nous a dit que les ressortissants français et les résidents en France au nom de la liberté de circulation devaient pouvoir continuer à venir. Raison pour laquelle nous avons encore renforcé le protocole sanitaire et gardé quelques lignes », a-t-il détaillé.

Faut-il imposer une quarantaine pour lutter contre le variant brésilien ?

Pour l’heure, le variant brésilien circule peu sur le territoire français. Selon la plateforme Géodes, proposée par Santé Publique France, le pourcentage de suspicions pour ce variant et le variant sud-africain confondus parmi les tests criblés est de 4 %. Il représenterait à lui seul environ 0,5% des infections au coronavirus dans l’Hexagone.

Certains professionnels de santé préconisent des mesures renforcées pour limiter les risques. Le professeur Rémi Salomon suggère soit d’interdire les vols, soit d’imposer une quarantaine. Une seconde option choisie par le Royaume-Uni. « Si vous ne la respectez pas, actuellement (…) c’est 10 000 livres d’amende. Il faut être sûr que les gens appliquent cet isolement pour diminuer au maximum le risque que de nouvelles personnes viennent avec le variant en France », a-t-il expliqué.

Un avis partagé par Eric Billy, chercheur en immuno-oncologie. Sur Twitter, il s’est adressé directement au gouvernement, afin de lui rappeler « qu’il serait bien d’appliquer de vraies quarantaines pour les voyageurs en provenance du Brésil et des pays touchés par le variant P1 ».

A lire aussi :

⋙ Covid-19 : qu’est-ce que les recombinants et comment les différencier des variants ?

⋙ Variant breton : les huit porteurs de cette mutation de la Covid-19 sont décédés

⋙ Covid-19 : quel variant du virus circule le plus près de chez vous ?

Source: Lire L’Article Complet