Sur les routes du recyclage du plastique agricole
Au cœur du maraîchage nantais, un entrepôt qui ne paie pas de mine, aux abords duquel des tractopelles se croisent et se recroisent, la gueule pleine de ballots de plastique: c’est le printemps, le recyclage des déchets plastifiés agricoles bat son plein.
La journée a commencé chez Alain Robillard, à quelque 150 kilomètres de là, en plein cœur du bocage ornais, où les pâtures succèdent aux pâtures, entrecoupées de champs de blé ou de maïs.
« Donner aux plastiques une nouvelle vie, c’est important pour moi. Autrefois, mes parents les brûlaient », témoigne cet éleveur de 65 vaches normandes laitières nourries avec le maïs, le blé et l’herbe produits sur l’exploitation de 67 hectares, d’où sortent 400.000 litres de lait par an.
« On demande de renvoyer les emballages sans les mélanger », explique Pierre de Lépinau, directeur d’Adivalor, la filière de recyclage des déchets des fournitures agricoles, créée en 2001.
Elle est financée à plus de 70% par des éco-contributions acquittées par les metteurs en marché des produits, gérées par les actionnaires d’Adivalor qui représentent notamment les producteurs de pesticides, d’engrais, de plastiques, de produits d’hygiène et de semences.
« L’autre principal poste de recettes est lié à la vente de déchets recyclables », explique M. de Lépinau. En 2020, 85.000 tonnes d’emballages et plastiques ont ainsi été collectées dans les fermes françaises, en progression de 5.000 tonnes, dont près de 90% ont été recyclées. En moyenne, l’agriculture recycle ainsi 72% du plastique qu’elle utilise, précise M. de Lépinau.
Soit un taux de recyclage presque trois fois supérieur à celui des emballages plastiques ménagers (27%) collectés en France, selon les chiffres publiés mardi par le ministère de la Transition écologique.
La filière agricole vise le 100% collecté, 100% recyclé, en 2030.
Dans les 85.000 tonnes, 65% de polyéthylène basse densité qui sert à fabriquer les films plastiques d’enrubannage protégeant les balles de fourrage. « Derrière ces chiffres, il y a des enjeux de logistique forts: environ 1,1 million de mètres cubes sont transportés chaque année, soit quelque 38.000 demandes d’enlèvement » sur tout le territoire, explique Pierre de Lépinau.
Dans son étable, M. Robillard a entreposé quatre sacs jaunes contenant ficelles, filets, films plastiques, pré-triés. « Mon père avait cinq vaches et consommait peut-être 10 tonnes de paille par an, moi il m’en faut 150 », explique l’agriculteur.
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Ils doivent notamment s’assurer que les plastiques ne sont pas trop pleins de paille, de terre ou de sable, ce qui compliquerait le recyclage. Des vérifications d’autant plus importantes qu’on a « une grosse saisonnalité de collecte, avec un pic en avril, mai, juin », explique Pierre de Lépinau: « Les bêtes sortent, c’est le moment où on utilise engrais et fertilisants ».
Sur un parapheur, Mme Guillier note le détail de la cargaison. « On déclare le nombre de sacs et le poids des différents plastiques, ça permet de mieux organiser la logistique ». Bilan: 300 kilos de plastique, dont 100 kilos de bâche d’ensilage, six sacs de film d’enrubannage, un sac de ficelles et trois de filets.
Après avoir chargé les plastiques, un camion rutilant part au centre de recyclage qui appartient au groupe Suez, à Landemont, quelque 150 kilomètres plus loin.
Ici, 25.000 tonnes de matières sont traitées chaque année, dont 18 à 20.000 issues du secteur agricole.
« Une tonne de plastique recyclé représente une économie en moyenne de cinq barils de pétrole », explique Yann Ménigaud, directeur du site. Après déchargement, dans une atmosphère crépusculaire et une pénombre sapée de néons, les matières plastiques subissent prélavage, broyage, lavage, essorage, séchage, extrusion.
Réduit en flocons, le plastique est chauffé et aggloméré en une sorte de pâte, redécoupée en granulés. Ces grains serviront à fabriquer conduits de canalisation ou sacs-poubelle.
« C’est plus propre pour tout le monde », estime M. Robillard, ajoutant: « le plastique n’est pas une ressource inépuisable ».
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