Santé : les promesses de l'épigénétique
Non, les gènes ne font pas tout ! On sait qu’ils s’expriment différemment selon notre mode de vie…
Avoir de « bons gènes » ? On en rêve tous ! Pour tenir à distance maladies physiques et psychiques. Pour bien vieillir, en profitant des plaisirs de la vie. Pourtant, les gènes ne sont pas aussi puissants qu’on le pense. « Longtemps, on a cru qu’ils étaient responsables de tout, précise le Dr Olivier Courtin-Clarins, auteur de Devine mon âge si tu peux (éd. Marabout). On sait aujourd’hui que l’impact des facteurs d’environnement sur l’expression de nos gènes oscille entre 80 et 85 %« .
Cette science, nommée épigénétique, se situe « au-dessus » (epi en grec) de la génétique. Comme le précise l’Académie nationale de médecine (Bulletin d’août 2021), ce terme a été créé en 1942 par l’embryologiste britannique Conrad Waddington pour désigner les mécanismes par lesquels les interactions entre les gènes et l’environnement donnent naissance au phénotype, qui correspond à notre morphologie et physiologie.
Depuis une trentaine d’années, les recherches se sont multipliées. On a découvert les mécanismes impliqués dans ces interactions. « On peut dire que l’épigénétique consiste à permettre à certains gènes, soit de s’exprimer, soit de se taire, et ce en faisant appel des mécanismes chimiques ou physiques », écrit le Dr Ghéorghiï Grigorieff, auteur de L’Épigénétique (éd. Eyrolles). Par ailleurs, ces « marques épigénétiques » se transmettent lors des divisions cellulaires. Et sont réversibles.
À la lumière de cette science, on comprend mieux pourquoi des jumelles homozygotes (ou vraies jumelles, issues du même œuf), qui ont le même patrimoine génétique, peuvent vieillir différemment. Des études ont montré que la jumelle dont le mode de vie laisse à désirer (tabagisme, expositions solaires excessives, alimentation déséquilibrée…) paraît plus âgée que sa sœur.
Comment agir sur nos gènes pour garder ou retrouver une belle santé ? En activant certains leviers, comme l’alimentation, l’activité physique, ou encore la gestion du stress. Côté alimentation, le régime méditerranéen (qui privilégie une kyrielle de végétaux colorés, des légumineuses, de l’huile d’olive, des épices, des herbes aromatiques…) est excellent pour notre épigénome*. Les polyphénols des végétaux que l’on trouve aussi dans le thé vert, y seraient pour beaucoup. « Ils sont antioxydants et diminuent l’inflammation tout en rééquilibrant notre microbiote », ajoute le Dr Courtin-Clarins.
Autre pilier : l’activité physique. En 2013, une équipe suédoise a prouvé que l’exercice régulier agissait épigénétiquement au niveau même du noyau des cellules. Natation, course à pied, marche rapide, vélo… Pour une pratique pérenne, choisissez celle qui vous plaît. Prévoyez 150 minutes d’activité physique intense ou modérée (ou 75 minutes d’activité plus intense) tous les deux jours. Vous êtes stressé ? Le stress, surtout chronique, est très impliqué dans l’épigénétique.
Heureusement, nous disposons aujourd’hui d’une large palette d’outils pour mieux le gérer : de la méditation à la cohérence cardiaque en passant par le yoga et la sophrologie. Vous avez un agenda très chargé ? Vous devriez pouvoir trouver ne serait-ce que 10-15 minutes dans votre planning quotidien à consacrer à des exercices de respiration ou de méditation. Souvenez-vous que seule la régularité vous apportera des bénéfices. Et que le jeu en vaut la chandelle : votre santé est précieuse !
*Ensemble des modifications qui interviennent dans la régulation des gènes d’une cellule
Au cœur de l’ADN
Dans le noyau de chacune de nos cellules, on trouve 46 chromosomes hérités de nos parents sur lesquels figurent quelque 25 000 gènes, impliqués dans l’hérédité. Les gènes sont des petits fragments d’ADN, une double hélice compactée, qui s’enroule autour des histones, des protéines formant une sorte de collier de perles. Ils codent des protéines (essentielles à la vie), via les ARN messagers, Elles ont de multiples missions : facilitation des réactions chimiques, transmission des hormones dans la cellule… Quant à l’épigénétique, elle ne modifie pas la séquence des gènes, mais agit sur leur expression, en « allumant » ou « éteignant » certains gènes.
Les anomalies épigénétiques
Si l’épigénétique peut jouer en notre faveur, elle est aussi capable… de nous rendre malades. « Les modifications épigénétiques peuvent être à l’origine de pathologies et pratiquement tous les domaines de la médecine peuvent être concernés, des maladies chroniques aux infections microbiennes« , note l’Académie nationale de médecine. Raison de plus pour avoir un mode de vie le plus sain possible !
Êtes-vous optimiste ?
Si oui, vous avez tout bon ! Une étude parue dans Psychosomatic Medicine (janvier 2023) conclut qu’un taux d’optimisme élevé est associé à une réduction de la mortalité et un moindre risque des maladies liées à l’âge. Des liens positifs qui pourraient être dus à des mécanismes épigénétiques. Vous êtes un pessimiste invétéré ? Pas de panique, l’optimisme, ça se travaille !
À lire…
ÉGLANTINE GRIGIS
Source: Lire L’Article Complet