Retour sur la stratégie de communication de Richard Berry, accusé d'inceste
- Richard Berry a pris les devants en publiant une story pour répondre aux accusations d’inceste dont il fait l’objet.
- Dans un premier temps, cette stratégie a semblé donner l’avantage à la version des faits dans la séquence médiatique.
- Mais la stratégie de défense de l’acteur, sur le fond, s’est avérée contre-productive.
La parole de Coline Berry-Rojtman a-t-elle été « confisquée » ? Une chose est sûre, Richard Berry n’a pas attendu que l’affaire paraisse dans la presse pour s’exprimer. Dès mardi soir, il a publié une story sur son compte
Instagram anticipant de quelques heures les accusations d’inceste dont il fait l’objet. A 22h23, mardi dernier,
franceinfo sort l’information. Une enquête préliminaire a été ouverte le 25 janvier après une plainte déposée le même jour par sa fille aînée Coline Berry-Rojtman.
Le lendemain soir, l’enquête du Monde, qui est parvenu à recueillir de nombreux témoignages de proches de l’entourage de Richard Berry et de sa fille, est publiée. Si l’article donne la parole à Coline Berry-Rojtman, qui détaille sa version des faits, la séquence médiatique semble dans un premier temps donner l’avantage au comédien. Certains sites de la presse people n’ont pas peur d’aborder l’affaire avec légèreté, utilisant des tournures parfois désinvoltes. « Richard Berry accusé d’inceste : sa fille Coline persiste et signe », peut-on lire notamment sur le
site de Gala. Ou : « Sa nièce Marilou Berry enfonce le clou », titre le même média.
« Les rôles sont distribués au départ »
Comme si, en parlant le premier, Richard Berry avait réussi à imposer sa version des faits sur celle de sa fille qui, rappelons-le, dénonce dans sa plainte « des faits de viols et agressions sexuelles sur mineur de 15 ans par ascendant et corruption de mineur ». « Il a choisi de prendre les devants médiatiquement en s’exprimant avant que l’enquête en cours ne paraisse, observe Marine Périn, porte-parole de
Prenons la une. C’est une particularité qui modifie forcément le traitement médiatique de l’affaire, ne serait-ce que dans sa chronologie », observe-t-elle. De son côté, l’avocate de Coline Berry-Rojtman, Karine Shebabo, regrette que « comme dans les agressions sexuelles sur mineur, c’est encore une fois l’auteur présumé qui donne son rythme ».
Aux premières heures de la médiatisation de l’affaire, la story Insta semble avoir porté ses fruits. Si, pour certains conseillers en communication, comme Anne Hommel, il n’y a pas de règle, pour Florian Silnicki, fondateur de l’agence La FrenchCom, dans ce genre d’affaires, il vaut mieux prendre la parole le premier. « Vous avez plus de chances d’imposer dans le débat public vos arguments et vos messages face à ceux de la concurrence qui vont être valorisés dans l’enquête journalistique, explique l’expert en communication de crise qui accompagne de nombreux dirigeants d’entreprises et chefs d’État dans des situations similaires. En communication de crise, les rôles sont distribués au départ. Si vous êtes à l’origine de la diffusion de l’information, vous êtes écouté. Si vous êtes en réaction, la posture n’est plus la même, vous êtes dans une posture plus défensive ».
Le choix du réseau social n’est pas non plus anodin. En diffusant son message sur Instagram, Richard Berry s’est adressé directement à sa communauté sur le canal où il a le plus d’audience (plus de 86.000 abonnés). Il a anticipé la crise en jouant la transparence auprès de ses fans qui, flattés par cette confession, seront enclins à le soutenir. L’acteur a fait un sans-faute… sur la forme. Mais il a multiplié les erreurs sur le fond.
Richard Berry se présente comme une victime
Dans son message, Richard Berry écrit, au sujet de sa fille : « Son récit a évolué avec le temps. Il a été démenti, renouvelé et enrichi par elle au gré des interlocuteurs, ou de l’actualité. Pendant des années, j’ai tenté de lui parler, de mettre un terme à ses mensonges, de comprendre ce dont elle avait besoin, sans succès. Je m’en suis ouvert à des psychiatres, à ma famille, à mes amis. Après la parution du témoignage de Camille Kouchner, ma fille a remanié à nouveau son récit », a-t-il expliqué dans une démarche de décrédibilisation de la parole de la victime.
« C’est souvent celle qui dénonce qui est traitée de folle ou de déséquilibrée en premier lieu, note Karine Shebabo. La cellule familiale suite à des infractions sexuelles sur mineur en son sein se reconstitue souvent plus facilement autour de l’auteur plutôt que de la victime. Ce qui est souvent dur à accepter c’est que celui qui est censé nous protéger soit en fait celui qui nous agresse. »
Pour Florian Silnicki, attaquer la victime est inapproprié. « C’est le meilleur moyen d’apparaître comme coupable », note-t-il. Au lieu de garder l’avantage, Richard Berry retourne sa stratégie de communication contre lui-même. « On a là une forme de violence médiatique en action », conclut l’avocate. Apparaître agressif fragilise d’autant plus son discours que dans le même article du Monde, l’acteur a reconnu avoir violenté ses ex-compagnes, Catherine Hiegel et Jeane Manson. Adopter une posture empathique aurait certainement eu plus d’efficacité.
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