Pourquoi les lions bâillent-ils si souvent ?
Des chercheurs ont mené une nouvelle étude sur le bâillement chez les lions. Ils ont constaté non seulement que la pratique est contagieuse, comme chez de nombreux animaux, mais qu’elle semble aussi aider les félins à synchroniser leurs mouvements en groupe.
Humains, chiens, chats, macaques, lapins, chevaux ou encore hippopotames… Le bâillement est un réflexe partagé par de très nombreux animaux. Mais s’il semble simple en apparence, le phénomène conserve une grande part de mystère. Pourquoi bâille-t-on ? Et à quoi cela sert-il vraiment ?
Les recherches ont montré que le bâillement spontané se produit communément en cas de fatigue ou d’ennui et est associé à des réactions physiologiques bien précises : il augmente le flux sanguin au niveau de la tête, ce qui permet d’oxygéner et de rafraichir le cerveau, rendant l’individu plus alerte.
Il existe toutefois une facette bien plus intrigante : le bâillement contagieux. Autrement dit, la tendance à bâiller face à la simple vision de quelqu’un qui bâille. Là encore, le réflexe a été observé chez de nombreuses espèces, soulevant des questions quant à ses raisons réelles. Une étude apporte aujourd’hui un nouvel éclairage.
Publiées dans la revue Animal Behaviour, ces recherches ont porté sur des lions. D’autres animaux largement connus pour se décrocher la mâchoire plusieurs fois par jour. Et elles suggèrent non seulement que le bâillement est également contagieux chez ces félins mais aussi qu’il leur permettrait de synchroniser leurs mouvements.
19 lions filmés pendant quatre mois
C’est alors qu’ils étudiaient les comportements de jeu chez des hyènes sauvages que les scientifiques ont commencé à s’intéresser aux lions. Ils ont constaté que ces derniers bâillaient assez régulièrement mais concentraient ces gestes sur de courtes périodes qui étaient régulièrement suivies d’un déplacement collectif.
Pour en savoir plus, Elisabetta Palagi, éthologue de l’université de Pise en Italie, et ses collègues ont décidé de mener une vaste étude sur ce comportement. Pendant quatre mois, ils ont filmé 19 lions appartenant à deux groupes évoluant au sein de la réserve de Makalali dans la région de Limpopo en Afrique du Sud.
L’analyse des vidéos a montré que les bâillements spontanés étaient particulièrement fréquents lorsque les lions étaient décontractés et passaient du sommeil au réveil ou inversement. Des observations qui soutiennent l’hypothèse selon laquelle ce réflexe permettrait de rendre l’individu plus alerte.
Les données ont également révélé que les félins étaient 139 fois plus susceptibles de bâiller lorsqu’ils avaient vu un autre membre du groupe le faire au cours des trois précédentes minutes. Comme le soupçonnaient les chercheurs, ils seront donc bien eux aussi sensibles au bâillement contagieux.
Une contagion du bâillement… et des mouvements
Les observations ne se sont pas arrêtées là. Grâce aux vidéos, l’équipe s’est aperçue qu’un lion ayant bâillé après un autre était ensuite 11 fois plus susceptible d’imiter les mouvements de ce dernier. Par exemple, si le premier ayant bâillé se levait et se déplaçait sur une courte distance, le second l’ayant imité avait tendance à se déplacer aussi.
Ceci suggère que le bâillement contagieux pourrait favoriser la synchronisation des mouvements au sein d’un groupe et booster sa vigilance. « Les lions partagent de nombreuses choses telles que les chasses organisées et les soins [aux petits]« , a expliqué Elisabetta Palagi au New Scientist.
« De toute évidence, ils ont donc besoin de synchroniser leurs mouvements, de communiquer et d’anticiper les actions de leurs compagnons » pour faire face à d’éventuelles menaces ou partir en quête de nourriture, a-t-elle poursuivi. Dans ce contexte, le bâillement pourrait jouer un rôle important de maintien de la cohésion sociale.
Une étude inédite et de nouveaux arguments
Selon Andrew Gallup, biopsychologue du State University of New York Polytechnic Institute non impliqué dans l’étude interrogé par Science News, des hypothèses avaient déjà avancé que ce geste pouvait aider à coordonner les comportements de groupe chez certaines espèces sociales.
« Mais à ma connaissance c’est la première étude qui a véritablement tenté de quantifier cela« , a-t-il assuré. A travers leurs recherches, Elisabetta Palagi et ses collègues n’ont pas observé si ces mouvements collectifs chez les lions augmentaient les chances de succès à la chasse et conduisaient à d’autres issues favorables. Difficile donc d’aller plus loin.
Ces découvertes apportent néanmoins de nouveaux arguments pour percer les secrets du bâillement chez les humains comme chez les animaux. Une autre théorie suggère que le caractère contagieux pourrait être lié à l’empathie et l’existence d’une connexion émotionnelle entre les individus.
Si ce lien n’a pas été exploré directement ici, il n’est pas exclu d’après l’éthologue interrogée par le National Geographic. « Si vous bâillez et que je réponds en bâillant, et qu’immédiatement après nous nous engageons dans le même comportement, cela peut améliorer notre capacité à interpréter le comportement de chacun« , a-t-elle conclu.
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