« Paris Police 1900 » fait résonner la Belle époque avec la nôtre

  • Canal+ lance ce lundi à 21h05 Paris Police 1900, ambitieux polar sur fond de thriller politique, créé par Fabien Nury.
  • La série mêle personnages historiques et protagonistes de fiction.
  • Dans le contexte politique trouble de l’affaire Dreyfus, elle suit l’enquête autour de la sordide affaire criminelle de la malle sanglante.

Une fresque éblouissante, foisonnante et passionnante ! Canal+ lance ce lundi à 21h05 Paris Police 1900, ambitieux polar sur fond de thriller politique créé par
Fabien Nury, à qui l’on doit sur le petit écran Guyane et les scénarios des romans graphiques Il était une fois en France et
La Mort de Staline. Paris, 1899. Nous sommes à la veille du second procès d’Alfred Dreyfus. Marguerite Steinheil (Evelyne Brochu) prodigue au président de la République, Félix Faure, une fellation fatale. Alors que les tensions entre groupes anarchistes et ligues antisémites et nationalistes sont à leur paroxysme, le préfet Lépine (Marc Barbé) est rappelé en urgence pour maintenir l’ordre dans Paris.

Dans ce contexte politique trouble, le cadavre d’une inconnue, retrouvé découpé dans une malle dans la Seine, entraîne Antoine Jouin, inspecteur ambitieux de la criminelle (Jérémie Laheurte) et Jeanne Chauvin (Eugénie Derouand), une femme avocate, une première dans le pays, au cœur d’une affaire complexe. Ce féminicide intéresse aussi Joseph Fiersi (Thibaut Evrard), inspecteur corrompu, qui engage comme moucharde Marguerite Steinheil sous le douteux sobriquet de « Pompe funèbre ». S’enracinant dans la tradition du roman noir et des romans-feuilletons de la Belle époque (Gaston Leroux, Eugène Sue,
Pierre Souvestre…) et les serials (Louis Feuillade,
Fritz Lang), Paris Police 1900 fait puissamment résonner la Belle époque avec la nôtre.

Un subtil mélange d’Histoire et de fiction

Les intrigues de Paris Police 1900 sont basées sur des personnages historiques et des faits avérés, liés entre eux par la fiction. « Au lieu d’inventer, j’essaye d’extrapoler sur la base d’une réalité », explique Fabien Nury, avec qui 20 Minutes s’est entretenu lors d’une table ronde virtuelle organisée par Canal+.

Et de résumer une année dédiée aux recherches : « L’affaire du Fort Chabrol est très bien documentée. L’horrible ligue antisémite de France, l’état de la politique française en 1899, aussi. L’affaire de la valise sanglante est bien documentée au début : la découverte du corps, les premiers éléments de l’enquête, etc. Le sens de mon travail, c’est que ces deux affaires n’ont rien à voir et par la fiction, je vais essayer d’inventer un lien. »

Paris Police 1900 est « un récit qui met en place des mécaniques lourdes : récit historique, enquête policière, thriller politique. Des récits avec beaucoup de rouages et des intrigues à tiroirs », prévient-il. Autour de l’affaire de la malle sanglante, se croisent protagonistes de fiction (Antoine Jouin) et personnages réels, dont le préfet Lépine. « Je suis incapable d’inventer que des mecs ont créé un journal qui s’appelle L’Antijuif. Du coup, quand je découvre cela, je comprends mieux la nécessité de la
loi Gayssot », s’exclame Fabien Nury.

Les problèmes de l’époque font écho à ceux d’aujourd’hui

« L’histoire politique bégaye trop souvent, explique le créateur de la série. Il y a des enjeux et des questions posées à l’époque qui nous sont encore posées aujourd’hui. En tant que citoyen, cela peut m’attrister, en tant que narrateur, je suis plutôt content, parce que je sais que les spectateurs peuvent comprendre très facilement quels sont les enjeux de la période. »

Parmi eux, le racisme, l’antisémitisme, la tentation populiste et réactionnaire : « Un siège armé de trente-huit jours avec des émeutes dans tout Paris, une bande criminalo-politique qui s’appuie sur une force de frappe constituée des bouchers de la Villette, et de plusieurs milliers de suiveurs, armés et violents. L’espèce de montée du facisme. Je veux dire qu’on en voit beaucoup sur nos écrans en ce moment, des meutes qui envahissent les bâtiments politiques », remarque Fabien Nury, faisant référence à l’invasion du Capitole par les partisans de Donald Trump.

Une fiction ancrée dans la première vague féminisme

L’enquête de Paris Police 1900 porte sur un féminicide. Dans la « dictature masculine » d’alors, les femmes sont cantonnées à un rôle domestique, victimes de « violences conjugales insensées ». Elles n’ont pas les mêmes droits que les hommes (le droit de vote ne sera obtenu en France qu’en 1944). Elles seules font l’objet de « constats d’adultère », « alors qu’il y a des bordels dans tout Paris. Paris en 1900, ce n’est pas vraiment la ville de l’amour, c’est la ville de l’amour tarifé, ça n’a rien à voir », constate Fabien Nury.

Les femmes prises en flagrant délit d’adultère sont enfermées à la prison de Saint-Lazare. « Dans six mois, on la retrouvera au bordel. Dans un an, à la morgue », peste l’inspecteur Antoine Jouin après une arrestation.

L’action se déroule pendant la première vague féministe et ces femmes cherchent à s’émanciper, comme le personnage de Jeanne Chauvin, première femme de France à se présenter à la cour d’appel de Paris pour prêter le serment d’avocat ou Marguerite Steinheil, qui se bat pour subvenir aux besoins de sa fille. « Dans ce cadre-là, on a des personnages de femmes extraordinairement puissants et décisifs, influents et courageux », salue Fabien Nury.

« L’idée centrale [de la série] est l’existence et la nécessité du progrès », estime Fabien Nury. La série montre aussi une époque riche de progrès scientifiques au travers la genèse de la police scientifique et le personnage d’Alphonse Bertillon, de progrès technologiques au travers l’arrivée du téléphone par exemple et l’émergence des medias de masse. S’ancrant dans le même rapport cru à la chair que The Knick  et distillant la même violence esthétisée que
Peaky Blinders,Paris Police 1900 tend finalement un miroir haletant et stylisé à la belle époque que nous vivons.

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