"Nos maternités sont devenues des usines" : le cri d'alarme des sages-femmes en grève
« La crise que nous traversons aura plus que jamais démontré que les sages-femmes sont les grandes oubliées parmi les professionnels de santé », signe le texte appelant la profession à se mobiliser, ce mercredi 5 mai. Hier, celles et ceux qui accompagnent les mères pendant l’accouchement et assistent aux premières heures de la vie des nourrissons, ont sonné une fois de plus l’alarme. Cause majeure de leur indignation depuis le début de l’année : une pénurie bien réelle et un quotidien éreintant.
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Car si sur le papier, leur nombre est passé de 18 000 à 24 000 en 10 ans, il faut davantage disséquer ces chiffres pour saisir les conditions « inacceptables » qui sévissent dans les services. Sur ce total, 60 % seulement exercent ainsi dans les hôpitaux, contre 74 % en 2011. Le secteur libéral, lui, a vu ses rangs grossir de 20 % – la quête de davantage de confort en cabinet, malgré des horaires en semaine considérables, peut-on imaginer – et devrait représenter 70 % de l’activité d’ici 2030, prévoit le DRESS dans un rapport publié en mars dernier. Et puis, il y a la durée d’exercice, que cette dernière décennie a vu chuter de 30 ans à 20 ans en moyenne.
Au Figaro, Angélique, sage-femme au CHU de Créteil (Seine-et-Marne), témoigne d’une réalité douloureuse. « Je n’en peux plus, je suis en permanence épuisée », confie-t-elle. « Nous sommes en sous-effectif depuis deux ans, il nous manque une dizaine de sages-femmes en temps plein ». Sur 60 personnes qui l’entourent, 7 sont parties en arrêt maladie, dont deux pour épuisement professionnel, précise le journal. Et cette fatigue a des conséquences directes sur la santé et la qualité de l’accueil des patientes, ô combien décisive pour leur bien-être futur.
« La rentabilité prime sur l’humain »
Qui dit moins de personnel, dit forcément moins de temps passé auprès des femmes qui accouchent et des jeunes mères. Un accompagnement pourtant précieux qui demande de la patience. Le président du Collège national des sages-femmes, Adrien Gantois, avertit en ce sens : « les mères, de moins en moins bien soignées, sont les premières victimes ». Et poursuit : « On a une grande attention dans les maternités sur le bien-être des femmes, sauf qu’à l’heure actuelle, on en suit plusieurs en même temps et on ne peut pas assurer cette exigence. »
La dlgation des sages-femmes qui seront entendues par le ministre sur le point d’entrer @lacgtcommunique @Sante_Gouv @ANESF_FR @CNOSF pic.twitter.com/6rHUDahNMQ
Le manifeste interpelle de son côté : « Nos maternités sont devenues des usines, où la rentabilité prime sur l’humain », et les sages-femmes de marteler : plus question d’être « complices de cela ». La profession réclame ainsi « plus de reconnaissance et de valorisation [du] métier », notamment salariale. « Pour les nouveaux diplômés, les modalités d’embauche sont précaires », précisent les signataires, ajoutant que « hors structure, certains de leurs actes ne sont pas rémunérés, car aucune cotation n’existe ».
Résultat : « Pour un tel niveau de formation et de responsabilités, une évolution de carrière limitée et non valorisée lors de l’obtention de qualifications supplémentaires amène les sages-femmes à fuir les maternités et à se reconvertir en nombre ». Une perte dangereuse pour les soignant·e·s comme les soignées.
Déjà dans la rue les 26 janvier, 10 et 24 février, et 8 mars, les « blouses roses » attendent encore aujourd’hui du gouvernement « des mesures fortes, concrètes, pour stopper l’hémorragie ». Mercredi 5 mai, leur mobilisation n’est pas passée inaperçue : une délégation a finalement été reçue par le ministère de la Santé, rapporte l’Organisation Nationale Syndicale des Sages-Femmes. Reste à voir si les promesses qui sortiront probablement de cet échange, se concrétiseront sur le terrain.
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