Misophonie : d'où vient cette aversion pour le bruit et comment vivre avec ?

Vous ne supportez pas entendre les bruits de bouche de votre voisin de bureau lorsqu’il mange, vous devenez irritable si quelqu’un renifle près de vous ou respire un peu trop fort à votre goût ? Vous souffrez peut-être de misophonie ! Voici comment mieux vivre avec cette aversion pour le bruit.

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Environ 10 à 15% des Français souffriraient de misophonie. Un trouble qui désigne une intolérance aux bruits organiques des autres, comme lors de la mastication d’un aliment, lors de reniflements, par exemple. Tour d’horizon de ce trouble qui peut être source de colère, d’anxiété, voire de repli sur soi, avec le Docteur Anne-Marie Piffaut, ORL et psychothérapeute.

Misophonie : qu’est-ce que c’est ?

La misophonie est un symptôme, ce n’est pas une maladie, comme le rappelle le Docteur Anne-Marie Piffaut.

Ce terme désigne l’impossibilité de réagir normalement aux sons organiques émis par autrui. Si vous ne supportez pas d’entendre quelqu’un mâcher un chewing-gum ou manger la bouche ouverte, par exemple, vous êtes peut-être misophone, sans le savoir !

Tous les bruits organiques (les bruits du corps) des autres, peuvent déranger les personnes dites « misophones », mais en revanche, leurs propres bruits ne les dérangent.

Il peut s’agir de bruits de bouche comme :

  • La mastication d’un aliment ou d’un objet
  • L’aspiration de liquides avec une paille
  • Le fait de chercher à retirer des résidus alimentaires collés entre les dents

Il peut aussi s’agir de bruits provenant du nez, comme :

  • Les reniflements
  • La respiration

Ou des bruits provenant de la gorge, comme :

  • A la déglutition
  • Des raclements (hemmage)

Mais aussi des bruits issus de l’appareil digestif, comme :

  • Avaler sa salive bruyamment
  • Pendant la digestion
  • Les gargouillis
  • Les rots
  • Les gaz

Comment savoir si je suis misophone ?

Tout le monde peut être concerné par la misophonie, homme ou femme, et à tout âge de la vie.

Cette intolérance, qui se limite donc à des bruits organiques (provenant de la bouche, du nez, de la gorge ou encore de l’appareil digestif, comme nous venons de le voir), peut être associée au fil des années à d’autres intolérances.

D’autres bruits peuvent déranger également par la suite, si cette première sensibilité n’est pas prise en compte, comme :

  • Les bruits de la vie quotidienne (hyperacousie)
  • Les mouvements répétitifs (misokinésie)
  • Les bruits particulièrement répétitifs (tapotement sur la souris d’un ordi, goutte d’eau, horloge…)

« Il n’existe pas de signes spécifiques, toutes les associations d’intolérances peuvent exister, en fonction de l’histoire de chacun… Mais on associe fréquemment la misophonie à l’hyperacousie et à la misokinésie (intolérance aux mouvements) », explique le Docteur Anne-Marie Piffaut.

Seul le patient peut identifier ce trouble, simplement en observant les désagréments engendrés, et lui mettre un nom en étant informé par des proches, les soignants ou les médias.

Pourquoi je suis sensible au bruit ?

Les personnes dites « nerveuses » sont susceptibles de souffrir de misophonie, explique la psychothérapeute.

« En cause, le stress de la vie moderne, les contrariétés liées à des conflits interpersonnels, le silence à table dû à une mésentente entre les parents, les bruits sont alors plus audibles, ou encore un terrain anxieux et dépressif. Mais aussi, la sexualité (au moment de la puberté), le manque de respect de l’entourage, leur comportement intrusif, et plus grave encore, les traumatismes liés à des abus. », détaille-t-elle.

D’autres causes peuvent être plus anciennes, comme une prématurité et une souffrance néonatale (un séjour en couveuse), les rapports sexuels bruyants des parents quand l’enfant dort dans leur chambre… « Les émotions sont alors très fortes. Plus tard, tous les bruits qui rappellent ces bruits perçus à une période précoce de la vie refont ressurgir ces émotions », ajoute la professionnelle.

Misophonie : les conséquences possibles de ce trouble

La misophonie peut avoir des répercussions sur la personne et provoquer des sensations désagréables.

Les émotions suscitées par ces bruits s’accompagnent de manifestations physiques neurovégétatives, comme le détaille la spécialiste :

  • Sueur
  • Palpitations
  • Respiration bloquée
  • Nausées
  • Vomissements
  • Vertiges
  • Tremblements
  • Tensions musculaires…

À ces réactions physiques, peuvent s’ajouter des problématiques d’ordre psychologique.

« Les patients qui souffrent de misophonie, peuvent ressentir de la honte et de la culpabilité quand ils s’emportent au moindre bruit », décrit la thérapeute.

Un sentiment d’injustice peut également venir s’associer à cette honte et cette culpabilité : Pourquoi moi ?

Sur le long terme, la spécialiste a pu observer chez certaines personnes « des comportements asociaux, des colères terribles ou un isolement allant jusqu’au refus de partager les repas avec l’entourage, une anticipation anxieuse conduisant à l’évitement de nombreuses situations avant même d’entendre les bruits dérangeants. »

Misophonie et traitement : comment en sortir ?

« Cette hypersensibilité aux bruits a pour cause une hyperexcitabilité. Le premier objectif sera donc de favoriser le calme, l’écoute, la compréhension. », conseille la thérapeute.

Pour la prise en charge de la misophonie, il est intéressant, soit de se tourner vers les Thérapies Comportementales et Cognitives (qui vont proposer des techniques d’affirmation de soi), soit d’opter pour la thérapie EMDR, qui va être utile pour traiter les cas plus sévères, notamment le stress post-traumatique.

Les praticiens certifiés EmRes quant à eux vont apprendre à la personne à gérer ses émotions, en instantané et en autonomie.

« L’association d’EmRes et de la cohérence cardiaque est ce que je conseille à la plupart des personnes qui souffrent de misophonie. Elle est efficace et a l’avantage de se pratiquer en autonomie (trois à cinq séances en moyenne suffisent à l’apprentissage). Je réserve l’EMDR pour les cas les plus graves, quand les traumatismes psychologiques sont très intenses. », recommande le Docteur Anne-Marie Piffaut.

Pour trouver un praticien :

Pour l’EMDR :

  • www.emdr-france.org

Pour EmRes :

  • www.apese.pro (Association de Praticiens En Santé Émotionnelle)
  • www.insitut-sante-emotionnelle.fr (Institut International de Santé émotionnelle)

Pour les TCC :

  • www.aftcc.org (Association Française de Thérapie Comportementale et Cognitive)
  • www.ifforthecc.org (Institut Francophone de formation et de recherche en thérapies comportementales et cognitives)

Merci au Docteur Anne-Marie Piffaut, ORL et psychothérapeute, auteure de Misophonie, soulager l’intolérance aux bruits des autres, (Éditions Leduc.S), www.api-listen.net, www.anne-marie-piffaut.overblog.com

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