Marc Pulvar accusé d’inceste : Audrey Pulvar explique que ce n’était pas à elle de "dénoncer son père"

« Je suis là comme fille d’un pédocriminel. » Ce lundi 15 février, sur France Inter, Audrey Pulvar est revenue sur les accusations d’inceste portées par trois cousines à l’encontre de son père, Marc Pulvar. Professeur de mathématiques et figure du syndicalisme à la Martinique, il est décédé en 2008 à 71 ans.

Si les faits présumés ont été rendus publics le 7 février dans une lettre transmise à l’AFP, la famille était au courant depuis une vingtaine d’années. L’élue EELV et adjointe à la mairie de Paris, actuellement candidate à la Présidence de la région Île-de-France, se voit reprocher de ne pas en avoir informé les autorités auparavant. 

Sur France Inter, Audrey Pulvar a expliqué pourquoi ce n’était pas son rôle, et a rappelé son soutien à ses cousines. Elle est aussi revenue sur le bouleversement entraîné par ces accusations. 

Ne pas parler à la place des victimes

« Non, il ne m’est pas venu à l’idée de dénoncer mon père », déclare Audrey Pulvar. « Ce n’était pas à moi de le faire, et je ne savais pas que je savais. Ces choses-là ne se font pas en 24 heures, c’est un peu plus complexe que ça, surtout pour les victimes. »

Il faut énormément de conditions pour qu’une victime puisse parler, et c’est à elle de parler, pas aux autres de dire avant elles ce qui s’est passé.

L’élue EELV et ancienne journaliste explique qu’elle ne pouvait pas parler à la place des victimes présumées. « Il faut énormément de conditions pour qu’une victime puisse parler, et c’est à elle de parler, pas aux autres de dire avant elles ce qui s’est passé. »

« Les victimes nous parlent quand elles peuvent parler, quand les conditions sont réunies pour elles pour avoir la force de pouvoir se les dire à soi-même », ajoute-t-elle. « Le dire à ses parents, puis à un cercle plus large, ça prend du temps. Et quand elles le disent, il faut respecter cette parole, il faut l’entendre, il faut l’écouter, la respecter, et non la dévaloriser en la mettant en doute. »

« Si je me suis tue depuis huit jours, c’est parce que je trouvais important qu’elles puissent s’exprimer. Mais ici, à Paris, c’est pas l’affaire Marc Pulvar, c’est pas la parole des victimes qu’on a entendue, c’est mon nom qui a été mis en exergue », remarque-t-elle.

Auprès de France Inter, l’élue estime que la publication de La familia grande, où Camille Kouchner accuse son propre beau-père, Olivier Duhamel, d’inceste envers son frère jumeau, et la vague de libération de la parole qu’il a entraîné avec #MeTooInceste, a « sans doute […] été la petite impulsion supplémentaire » pour que ses cousines rendent leurs accusations publiques.

Des souvenirs « cadenassés pendant 25 ans »

Par ailleurs, Audrey Pulvar insiste sur le fait que leur prise de parole n’est en rien une « manoeuvre politique », alors qu’elle se présente à la présidence de la région Île-de-France : « Je suis là pour dire à tous ceux qui pensent que l’action de mes cousines serait une manœuvre politique, soit pour m’atteindre moi soit pour abîmer la mémoire de mon père, qu’ils ont tort. »

Elle revient sur le moment où elle a appris les accusations de ses cousines : « Il y a 20 ans, quand ma mère m’a annoncé ce qu’une de mes cousines avait dit, je l’ai crue. C’était en 2002. Elles avaient 30 ans, et on a globalement le même âge. Je les ai crues parce que je suis toujours du côté des victimes, de celles et ceux qui dénoncent ce type de crimes. »

Quand ma cousine avait 7 ans, on s’était disputées et elle m’avait dit ‘Ton père, il met sa main dans ma culotte’. Ça m’avait tétanisée.

L’élue réitère son soutien envers ses cousines : « Je les ai crues parce que les faits se sont produits il y a 45 ans, et depuis 45 ans je sais qu’il s’est passé des choses, confusément », a-t-elle raconté. « J’étais une enfant mais il se passait des choses dont je sentais qu’elles n’étaient pas normales. Il y avait un climat que je ne comprenais pas. »

« Dans ma mémoire, quand ma cousine avait 7 ans, on s’était disputées et elle m’avait dit ‘Ton père, il met sa main dans ma culotte’. Ça m’avait tétanisée, j’avais 6 ans », se souvient-elle. « Et après, ces souvenirs-là ont été cadenassés dans mon cerveau pendant 25 ans, en revenant par flash, sans que je sache ce que c’était. »

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Prévenir les violences sexuelles

« Les violences sexuelles en général, et les violences à l’égard des enfants, l’inceste en particulier, sont extrêmement répandues dans l’ensemble de la société », rappelle Audrey Puylvar. Fin 2020, une étude a établi qu’un Français sur 10 est victime d’inceste.

« Il ne faut pas seulement écouter la parole des victimes, il faut faire en sorte que ça n’arrive plus. Ce que veulent les victimes, c’est pas d’être protégées, c’est qu’on ne viole plus », défend-elle.

« Je suis là en tant que moi, et en tant que fille d’un pédocriminel, d’un monstre au sens actuel du mot. Et quand vous êtes la fille d’un monstre, forcément vous vous demandez si vous êtes un monstre vous-même », confie également Audrey Pulvar. « C’est un processus presque automatique. » 

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