Les plus beaux intérieurs japonais

Leur esthétique minimaliste leur vaut une réputation d’expert en la matière. On envie les caractéristiques stylistiques emblématiques de leurs maîtres comme Tadao Ando. On copie les astuces de leur papesse du rangement Marie Kondo. On s’arrache toujours leurs pièces cultes comme les sculptures lumineuses de Isamu Noguchi. Mais que connaît-on réellement des origines de ce minimalisme envié, inextricablement lié non seulement à l’habitat japonais mais aussi plus largement à un véritable mode de vie ? Loin des fantasmes et des clichés, l’autrice et journaliste Mihoko Iida tente d’esquisser une réponse passionnante et plus complexe que les apparences sages et monochromes du style japonais le laissent à penser depuis des décennies… 

L’architecture japonaise en osmose avec la nature

On ne pense pas la décoration intérieure de la même manière au Japon qu’en Occident. Là où les occidentaux imaginent une décoration recentrée sur l’emploi des couleurs, la mise en forme de l’espace par la sélection et la position d’objets ou d’œuvres, les japonais se concentrent davantage sur l’endroit et son rapport aux éléments comme la lumière, le vent… Par essence, l’intérieur japonais, qu’il soit construit sur un terrain urbain ou à la campagne, est ainsi conditionné par l’extérieur. Quand les intérieurs occidentaux se présentent sous la forme d’une extension de la personne qui y habite, les intérieurs japonais accordent de la valeur à la fonction communautaire. Choix architecturaux comme décoratifs ne doivent jamais mettre en danger le groupe. Depuis des siècles, la position vulnérable de l’étroite archipel a façonné son rapport si spécial à l’architecture, intégrant ainsi toujours le paysage dans la construction dans un but de protection. « La maison avant d’être lieu de beauté est un leu de sécurité, évalué en fonction de son harmonie avec son environnement naturel » précise Mihoko Iida dans une introduction captivante car différente de notre rapport à l’habitat de ce côté-ci du globe.

Au Japon, comme ailleurs, l’architecture est une histoire de culture qui prend son origine dans la doctrine boudhiste propagée à partir du XII ème siècle. Boudha l’aurait formulée ainsi « Moins on possède de choses, moins on a de quoi s’inquiéter ». Ironique toujours, l’Histoire a conduit cette terre emblème du minimalisme, une archipel un peu plus petite que la Californie, à devenir la troisième économie de consommation du monde. La complexité est aussi japonaise. 

Les intérieurs japonais entre rêve et fonctionnalité exacerbée

A travers 28 résidences d’exception, classées en trois grandes thématiques – les idylliques, les fonctionnelles et les historiques – l’auteure dresse le panorama de cette architecture fascinante tantôt rêvée, tantôt fonctionnelle, parfois minimaliste, parfois maximaliste mais toujours optimisée. Une architecture propre au pays du Soleil-Levant. Une terre à l’avant-garde du micro habitat, comme le prouve dès 1966 la construction de la maison Tour de Takamitsu Azuma et d’une architecture biophile en osmose avec la nature comme l’incroyable maison Lotus de Kengo Kuma. Captivant.

La preuve en images.

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La Maison Lotus de Kengo Kuma

Chef-d’oeuvre d’un architecte multi primé, Kengo Kuma, la Maison Lotus incarne la quintessence de l’architecture japonaise. Une maison rêvée où les espaces de vie sont démesurés, ouverts et lumineux, sensation exceptionnelle renforcée par une nature maîtresse des lieux. Situé à l’est de l’archipel, cette maison aux murs audacieux composés de dalles de travertin suspendues grâce à un complexe système de chaînes joue avec la légèreté apparente de sa structure et celle absolue des lotus voisins. Définitivement divin !

La Maison S de Keiji Ashizawa Design

Lignes franches tempérées par des bois organiques chauds et des oeuvres d’art aux couleurs réconfortantes peuplent cette maison moderne et spacieuse en béton en plein coeur de Tokyo. Oeuvre de l’agence Keiji Ashizawa Design, cette structure ouverte a été pensée pour évoluer au rythme de la nature environnante pour emplir l’espace de l’infini richesse des différentes saisons particulièrement marquées au pays du Soleil-Levant.

La Maison Akashi de l’agence Arbol d’Osaka

D’extérieur, la maison Akashi réalisée par le cabinet Arbol d’Osaka s’apparente à une intrigante boîte en bois. A l’intérieur c’est un tout autre monde qui se déploie. Des pièces parées de bois ouvertes sur des patios puissamment apaisants, via de grandes fenêtres et également des surprenantes petites fenêtres placées ras du sol évoquant un « yukimi shoji » moderne, des ouvertures coulissantes typiques de l’architecture traditionnelle nippone, conçues pour diriger les regards vers la vue extérieure et observer la neige tomber au sol, entre autres…

La Maison Peninsula de Mount Fuji Architects Studio

Brutaliste et aérienne à la fois, la Maison Peninsula conçue par Mount Fuji Architects Studio semble surgir du paysage. Entre vents et vagues, sa structure en L est encadrée de grandes baies vitrées qui s’ouvrent sur le spectacle conjugué de la mer et du ciel. Ici le panorama naturel vole la vedette au reste et devient l’élément le plus significatif de la décoration intérieure. Complètement japonais !

La Maison Escalier de Nendo

Située dans une rue tranquille de Tokyo, la Maison Escalier subjugue en extérieur comme en extérieur par son escalier en béton monumental qui débute dès le jardin pour gagner les trois étages de la bâtisse moderne.  Signée Nendo, studio réputé pour ses réalisations insolites et fonctionnelles, cette maison répond à une problématique majeure de l’habitat japonais et plus précisément de la vie actuelle sur l’archipel : vivre à plusieurs générations sous le même toit. L’escalier fait figure de réponse fonctionnelle et surréaliste : il relie tous les membres de la famille au sein d’une unique série d’espaces pourtant privés.

La Maison Fusuma-e de Kaori Kikushima et Kazuki Nagasawa

Au Japon, il est courant de voir des maisons abritées différentes générations mais aussi diverses fonctions. Vivre et travailler sous le même toit est ainsi une coutume qui ne date pas d’hier au pays du Soleil-Levant, et elle a naturellement influencé la décoration intérieure. La Fusuma-e, la maison des architectes Kaori Kikushima et Kazuki Nagasawa à la tête du studio Knof, est un exemple en la matière. Basée dans un quartier populaire et créatif de Tokyo, cette maison construite il y a une trentaine d’année a été revue et corrigée sous un angle plus moderne, un espace ouvert compartimenté avec subtilité et style par une immense gravure de baleine qui s’étire sur neuf panneaux. Chaque panneau cache un élément fonctionnel du quotidien : salle de bains, WC, rangement bibliothèque ou pour les vêtements… Un 80 m2 urbain et créatif, profondément japonais !

La résidence Il Terrazzo di Yatsugatake du cabinet M’s Architects

La forme simple et compacte de cette résidence secondaire réalisée par le cabinet M’s Architects contraste pleinement avec sa position. Située sur une colline à 1 000 m d’altitude, cette bâtisse moderne revisite les codes de l’architecture nippone. Un grand toit flottant et épuré convoque l’esthétique emblématique des temples traditionnels japonais, des baies vitrées à perte de vue pour vivre en harmonie avec une nature à la beauté remarquable… 

La Maison Polygone de Makoto Yamaguchi

Parti pris futuriste de Makoto Yamaguchi, la maison Polygone est bâtie sur une pente raide de la forêt de Karuizawa à une heure de Tokyo. Un ovni semé en pleine nature qui comme son nom l’indique prend l’apparence d’une forme polygonale. Son intérieur a été imaginé sur un mode page blanche à réinventer sans cesse au rythme des saisons et de ses habitants. Plus surprenant encore les pièces dites fonctionnelles sont encastrées dans le sol en béton et les lieux combinent parois en verre et miroirs réfléchissants pour amplifier la lumière. Une pureté décomplexée.

Intérieurs Japonais

Retrouvez plus d’Intérieurs Japonais dans l’ouvrage Intérieurs Japonais de Mihoko Iida publié chez Phaidon

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