L'avocat, un fruit healthy ?

Fer de lance de la vague végane, ce fruit exotique « healthy », instagrammé à outrance pour ses toasts, n’est pas aussi vertueux qu’on le pense. Explications.

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Frites, pancakes, burgers ou glaces : tout est à l’avocat au Avocado Show. Inauguré en juin dernier à Paris, ce temple de la chaîne de restaurants éponyme, créée en 2017 à Amsterdam, ne désemplit pas. Il faut dire que les Français sont les plus gros consommateurs d’avocats en Europe, les variétés Hass et Fuerte en tête. Le souci ? Les fruits sont principalement importés d’Amérique du Sud, où leur culture intensive impacte grandement l’environnement écologique et sociétal. En revanche, ceux issus des filières bio et équitables, situées autour du bassin méditerranéen, ont un autre goût… bien plus durable.

L’avocat est un fruit tendance

L’avocat ne devient le nec plus ultra des assiettes saines et végétalisées que dans les années 2000. La mode venue de Californie se propage. Face à cet engouement, des pays producteurs se regroupent en 2016 au sein de L’Organisation mondiale de l’avocat (WAO) dont l’objectif consiste à autofinancer des actions pour pousser sa consommation en Europe, au Royaume-Uni et en Asie. Campagnes publicitaires, recettes et conseils diététiques, le pari est gagné : deux ans plus tard, les ventes européennes avaient augmenté de 65%. Soit 650.000 tonnes, mais la WAO visait le million.

L’avocat n’est pas un superaliment

« Difficile de résister à la texture onctueuse d’un avocat me direz-vous, mais au-delà d’un visuel attirant, il n’est pas le super-aliment espéré, qui contrebalancerait son impact environnemental important » dénonce le docteur Philippe Pouillart, enseignant-chercheur en pratique culinaire et santé à l’Institut polytechnique UniLaSalle à Beauvais. « Certes, il possède des qualités nutritionnelles : minéraux comme le potassium, le phosphore, le cuivre, le manganèse, le fer et le zinc, et également des vitamines K, B9, C et E« , énumère-t-il. « Pour autant, il n’est pas meilleur qu’un autre fruit. De plus, il est calorique. » Sa consommation responsable serait d’un avocat seulement par semaine.

La production de l’avocat nuit à la planète

Elle a presque doublé en dix ans, passant allègrement en 2019* à 7,2 millions de tonnes dans le monde ! S’il est produit au Kenya, en Afrique du Sud ou en Israël, le gros du marché est entre les mains de l’Amérique du Sud avec en tête le Mexique et le Pérou. Leurs monocultures intensives et leur non-respect des droits humains défraient la chronique. Ils abreuvent les plantations gourmandes en eau en asséchant les rivières. Ils détruisent les forêts afin d’en cultiver plus. Le tout au détriment de la biodiversité. Ils utilisent des pesticides interdits depuis longtemps en Europe qui affectent la population locale de différentes maladies.

*Source : L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO)

Des avocats d’origine européenne

Pour éviter l’impact carbone et les travers d’un long transport en containers où les avocats sont aspergés de gaz éthylène pour arriver mûrs sur les étals (avec souvent un côté pourri et l’autre pas mûr, à cause des chocs subis), il vaut mieux suivre les saisons et les acheter d’origine européenne. L’Espagne a pris la tête du peloton, devant le Portugal, la Grèce, Chypre et la France. Proche de la surproduction (elle en exporte 38.000 tonnes en France), elle va devoir davantage irriguer et traiter. Enfin, même si grâce à leur carapace brune, très peu de résidus de pesticides pénètrent leur chair, le label bio est une sécurité pour la santé, mais aussi pour les enjeux environnementaux et sociétaux.

La France produit de délicieux avocats

Grâce à leur climat, la Guadeloupe produit 73 tonnes d’avocats par an, la Martinique 128 tonnes, la Guyane 440 tonnes, La Réunion 562 tonnes et Mayotte 608 tonnes*. Initiées au début des années 1980, puis abandonnées, les cultures d’avocatiers corses ont repris et ont insufflé d’autres vocations sur le continent. Les Pyrénées et la Côte d’Azur possèdent désormais leurs filières durables et responsables. Ce qui permet de les déguster au cœur de leur saison, en hiver.

*Source : Interfel

Une cueillette de l’avocat à la main

« Il y avait un avocatier d’une cinquantaine d’années sur l’une de nos parcelles d’agrumes. Mon père en a planté trois autres et, bientôt, il y en aura une dizaine. Avec la montagne qui tombe dans la mer, le climat et le sol des Alpes-Maritimes se prêtent à leur culture. Nos récoltes varient de 500 à 2.000 fruits, car le réchauffement climatique crée de sévères épisodes de gel. Nous avons choisi de les laisser vivre leur cycle naturel, sans jamais chercher à les optimiser. Le gros de la cueillette se fait, à la main, entre janvier et mars, quand les avocats ont déjà leur taille adulte mais bien avant qu’ils ne soient mûrs, puis ils sont expédiés sous 24 heures.« 

Merci à Adrien Gannac, producteur et président de la Maison Gannac, autrefois Maison du Citron, sur les hauteurs de Menton. Lui et son père, Laurent, produisent des agrumes d’excellence (IGP bio) et soignent avec amour quelques avocatiers. Environ 2,90 € pièce.
www.maisongannac.com

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