L’Assemblée nationale vote à l’unanimité la proposition de loi contre les violences sexuelles sur mineur.es

La proposition de loi « visant à protéger les jeunes mineur.es des crimes sexuels », venue du Sénat et adoptée à l’unanimité en janvier, a aussi été votée à l’unanimité par l’Assemblée nationale, dans la nuit du 15 au 16 mars 2021, en première lecture, avec 67 voix pour et aucune contre. 

Elle va maintenant être étudiée en commission mixte paritaire composée de membres du Sénat et de l’Assemblée nationale. Une adoption définitive est envisagée en printemps, pour une instauration rapide de nouvelle législation, espérée par le gouvernement, précise Franceinfo.

L’adoption définitive de ce texte est très attendue, tandis que le début de l’année a été marqué par la sortie du livre choc La Familia grande, de Camille Kouchner, dans lequel elle dénonce l’inceste commis par son beau-père, le politique Olivier Duhamel, sur son frère jumeau « Victor », ainsi que la vague de témoignages puissants qui a suivi sur les réseaux sociaux, via le hastag #MeTooInceste.

On fait le point sur les mesures phares de cette proposition de loi, initiée par la sénatrice UDI, Annick Billon.

  • « Inceste, que justice soit faite », édifiant documentaire sur le long combat des victimes d’inceste
  • 6,7 millions de Français déclarent avoir été victimes d’inceste

Un seuil de non-consentement sexuel fixé à 15 ans

La mesure principale de la proposition de loi est l’instauration d’un seuil de non-consentement à 15 ans. L’article premier stipule qu’est qualifié de viol « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, ou tout acte bucco-génital commis par un majeur sur la personne d’un mineur » de moins de 15 ans. 

Il s’agira alors d’un nouveau crime, et il ne faudra plus prouver qu’il y a eu contrainte et menace, comme c’est le cas actuellement. « Aucun adulte ne pourra se prévaloir du consentement » d’un mineur de moins de quinze ans, avait souligné le ministre de la Justice Éric Dupont-Moretti.

En janvier dernier, les sénateurs avaient voté un seuil de non-consentement fixé à 13 ans. 

Un seuil de non-consentement à 18 ans pour les incestes

Dans les cas d’inceste, le seuil de non-consentement est fixé à 18 ans, et non 15 ans. 

Pour ces deux crimes, qu’ils soient incestueux ou non, l’agresseur encourt vingt ans de prison.

  • Agnès b. témoigne de l’inceste : « C’était l’oncle chéri de la famille. Il avait 45 ans. J’en avais 12 »
  • Isabelle Aubry, présidente de l’association « Face à l’inceste » : « Il faut arrêter de minimiser et cacher ce tabou »

Une clause « Roméo et Juliette »

Pour prendre en compte les histoires et liaisons amoureuses consentantes tissées au moment de l’adolescence et au début de l’âge adulte, la clause « Roméo et Juliette » (en référence à l’héroïne de Shakespeare qui n’a pas encore 14 ans quand elle rencontre Roméo, ndlr) encadre les possibles sanctions évoquées précédemment. Elles s’appliqueront uniquement si la différence d’âge entre le majeur et le mineur (de moins de 15 ans) est d’au moins cinq ans. L’intention est que ce type de relation ne devienne pas illégal dès que l’un des deux partenaires franchirait le cap des 18 ans. 

« Je ne veux pas renvoyer devant les assises un gamin de 18 ans et un jour parce qu’il a une relation consentie avec une gamine de 14 ans et demi », a justifié le ministre Eric Dupond-Moretti.

Evidemment, en cas d’agression sexuelle ou de viol, la clause « Roméo et Juliette » n’est pas applicable.

L’écart d’âge de cinq ans est cependant contesté par plusieurs associations de protection de l’enfance. Martine Brousse, présidente de “La voix de l’enfant” a confié à l’AFP, repris par le Huffington Post, qu’un écart d’âge de trois ans aurait été préférable. Sur Twitter, la présidente de l’association « MoiAussiAmnesie », Mié Kohiyama, a aussi affiché son opposition : « Le gouvernement romance les amours adolescentes au lieu de protéger les 13-14 ans victimes de tournantes par ex. Et de fixer un seuil d’âge clair et global dans un pays où l’impunité de la pédocriminalité et de l’inceste est majeure. #Lamentable »

Renforcement du délai de prescription

Alors que le délai de prescription pour un viol sur mineur.e est actuellement fixé à trente ans, et que plusieurs personnalités et associations se battent pour l’imprescriptibilité de ces crimes, la proposition de loi prévoit une prolongation du délai si une même personne récidive et agresse un.e autre mineu.re. Dans ce cas, le délai pourrait être prolongé indéfiniment.

  • Muriel Salmona : « D’innombrables victimes d’inceste ont été abandonnées »
  • Vanessa Springora dénonce les actes pédocriminels de Gabriel Matzneff dans son livre « Le Consentement »

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