Instagram pour les plus jeunes : les défenseurs des droits de l’enfant s’y opposent

Une coalition internationale de professionnels a adressé jeudi une lettre au patron de Facebook, Mark Zuckerberg, lui intimant d’abandonner son projet d’Instagram pour les moins de 13 ans.

« Lancer une version d’Instagram pour les enfants de moins de 13 ans n’est pas le bon remède et mettrait les jeunes utilisateurs en grand danger », écrivent les signataires de la lettre, envoyée par la Campaign for a commercial-free childhood (CCFC), un collectif qui milite contre le marketing ciblant les enfants. Cette coalition internationale (le courrier a été signé par des organisations nord-américaines, européennes, africaines et australiennes) a adressé une requête à Marck Zuckerberg, patron de Facebook, mais aussi d’Instagram ou encore de WhatsApp. Ces défenseurs des droits de l’enfant exigent que le projet d’une version d’Instagram pour les moins de 13 ans ne voie pas le jour. Le réseau social de partage de photos et de vidéos requiert actuellement un âge minimum de 13 ans pour s’inscrire. 

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De jeunes enfants « vulnérables » 

« Si la collecte de précieuses données familiales et la fidélisation d’une nouvelle génération d’utilisateurs d’Instagram sont sans doute bonnes pour le bilan de Facebook, cela va probablement augmenter l’utilisation d’Instagram par de jeunes enfants particulièrement vulnérables aux fonctions de la plateforme favorisant la manipulation et l’exploitation », s’alarment les rédacteurs de la lettre. 

« Nous avons tout juste commencé à explorer une version d’Instagram pour les adolescents les plus jeunes », a confirmé auprès de l’AFP Stephanie Otway, une porte-parole de Facebook. Le 18 mars, le site américain BuzzFeed a révélé que les salariés d’Instagram travaillaient sur un modèle junior. « Nous avons identifié le travail sur la jeunesse comme une priorité pour Instagram et l’avons ajouté à notre liste de priorités », assurait ainsi un collaborateur dans un message privé. « Nous convenons que toute expérience que nous développons doit avoir pour priorité la sécurité et le respect de la vie privée, et nous consulterons des experts du développement de l’enfant, de la sécurité et de la santé mentale de l’enfant ainsi que des défenseurs de la vie privée », a précisé Stephanie Otway. « Face au succès de certaines autres applications très prisées par la jeunesse, comme Snapchat et TikTok, [Facebook] cherche à se placer encore plus en amont, en s’adressant à une classe d’âge encore plus jeune, pour les inciter à venir plutôt chez lui que chez la concurrence », analysait Numerama dans un article paru en mars. 

Interrogée par BuzzFeed, Priya Kumar, doctorante à l’Université du Maryland, qui étudie la façon dont les réseaux sociaux affectent les familles, a déclaré qu’une version d’Instagram pour les enfants est aussi un moyen pour Facebook d’accrocher les jeunes et de normaliser l’idée « que les connexions sociales existent pour être monétisées ». Facebook a indiqué cependant qu’aucune publicité ne sera affichée dans la version d’Instagram pour les plus jeunes. 

Pas de messages privés entre majeurs et mineurs inconnus  

La question de la sécurité des plus jeunes sur Instagram est récurrente, notamment parce qu’elle expose des mineurs à des majeurs. Le contrôle de l’âge minimum (13 ans) requis pour s’inscrire sur la plateforme, facilement contournable, est également régulièrement remis en question. À ce sujet, Instagram avait déjà posté, le 16 mars, un long message réaffirmant sa volonté de s’assurer de la sécurité des mineurs sur le réseau. Ainsi, la société annonçait que pour assurer la protection des enfants, les personnes majeures ne pourraient plus envoyer de message privé à des mineurs qui ne sont pas abonnés à leur compte sur le réseau. « Quand un adulte essaie d’envoyer un message à un adolescent qui ne le suit pas, il reçoit une notification l’informant qu’envoyer des messages privés à cet adolescent n’est pas une option », expliquait ainsi Instagram dans son post.  

Également développé par Facebook, Messenger Kids existe depuis 2017. Certaines mesures ont été mises en place pour veiller à la sécurité de l’enfant sur le réseau social : par exemple, les parents doivent valider à chaque fois les conversations de leurs enfants avec un nouveau contact. En 2018, plusieurs pédiatres, universitaires, psychologues, psychiatres et médecins avaient eux aussi signé une lettre invitant Mark Zuckerberg à renoncer à sa messagerie instantanée pour enfants, sans succès.

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