"Il disait qu'il aimait le fait que je sois jeune": en vidéo, 6 victimes présumées de Norman Thavaud livrent des récits glaçants

  • Un mode opératoire nourri par le chantage
  • "Il disait qu’il aimait que je sois jeune"
  • Fellations forcées et stealthing
  • Norman Thavaud réfute toutes les accusations

Interpellé et placé en garde à vue lundi 5 décembre 2022 pour « viol » et « corruption de mineur », dans le cadre d’une enquête préliminaire menée par la Brigade de la protection des mineurs (BPM), comme le révélait alors Libération, le Youtubeur Norman Thavaud (alias « Norman fait des vidéos ») a été libéré mardi 6 décembre au soir. 

Selon les informations du parquet de Paris à l’AFP relayées par La Dépêche, « sa garde à vue été levée ‘pour poursuite d’enquête’, sans poursuites à ce stade ».

Le même soir, un autre vidéaste publiant sous le pseudonyme « Le Roi des Rats », a mis en ligne une vidéo dans laquelle il dévoile les témoignages de six victimes présumées. Suivi par près de 2 millions d’abonnés, le Youtubeur est connu pour révéler « les pièges qui se trouvent sur les réseaux sociaux », décrivait Télérama en 2018.

Sur la plateforme, il aurait été l’un des premiers à aborder, dans des vidéos fouillées qu’il qualifie d’enquêtes, le travail dissimulé des enfants sur YouTube ou encore, à alerter d’un réseau de pédophilie actif sur la plateforme, comme reprenait 20 Minutes en 2018.

Un mode opératoire nourri par le chantage

Agrémentée de captures d’écrans attestant des messages que Norman Thavaud aurait échangés avec les victimes présumées, la vidéo de 40 minutes dessine les contours de ce qui semble être un mode opératoire nourri par le chantage affectif.

Pour rappel, le parquet de Paris a indiqué que la procédure (ouverte en janvier 2022) concernait six plaignantes. D’après Libération, cinq d’entre elles l’accuseraient de viol, dont deux mineures.

La Québécoise Maggie Desmarais témoigne dans la vidéo à visage découvert (une autre jeune femme dévoile son visage, les quatre autres restent partiellement anonymisées, leurs voix n’ayant pas été modifiées). Unique victime à avoir « publiquement porté plainte », elle devait être confrontée à son agresseur présumé durant sa garde à vue. Pour le moment, aucune information n’a été diffusée quant à cette potentielle rencontre.

Tu n’es pas assez mature pour comprendre que les gens qui s’aiment font ça.

En 2020, l’ancienne fan avait déjà publiquement accusé Norman Thavaud « de l’avoir manipulée pour obtenir des photos et vidéos à caractère sexuel ». Dans une enquête publiée par Urbania en avril 2021, elle décrivait déjà un « petit jeu malsain d’attachement affectif ».

Alors qu’elle avait 16 ans – et lui 30 – au moment de leur première discussion, l’homme lui aurait « excessivement » demandé « des photos nues ». Devant son refus, il aurait argué : « Si tu ne fais pas ça, je vais te supprimer », »tu n’es pas assez mature pour comprendre que les gens qui s’aiment font ça », cite-t-elle. 

« Il disait qu’il aimait que je sois jeune »

Une technique de persuasion par la pression et le chantage qui se retrouve dans les histoires des autres plaignantes. Certaines parlent d’un premier contact sur Snapchat (elles étaient ensuite redirigées vers le compte privé « NonoSuperSecret »), d’autres auraient directement été abordées par le vidéaste lors de meet-up ou d’évènements. 

« Il m’a rapidement demandé des photos. Sans le soutif, puis sans la culotte », relate une jeune femme, âgée de 16 ans au moment des faits présumés.

Il disait que je lui devais des photos. 

« Il me disait qu’il aimait le fait que je sois ronde et jeune. Puis, quand j’ai voulu stopper nos échanges il disait que j’allais le regretter, que je lui devais des photos », se remémore une autre victime potentielle. Jouant sur son « accessibilité », il aurait usé d’arguments tels « C’est Norman, tu me connais », pour pousser ces jeunes femmes à partager des contenus intimes avec lui. 

« J’étais une gamine qui se foutait de lui quand je ne voulais pas envoyer les photos demandées. Sur les premières photos, il fallait que je sois nue, sur les suivantes que j’écarte les cuisses », précise une autre.

Toutes s’accordent à dire que le youtubeur envoyait également des photos, qu’elles ont toutes reconnues comme « les mêmes » après avoir mis en commun leurs histoires.

De même, une des jeunes femmes – qui raconte l’avoir rencontré lors d’une convention mettant en place des « meet-ups » entre fans et créateurs de contenu – atteste qu’il lui aurait glissé un post-it avec son numéro lors de leur rencontre, qu’elle ne l’a pas « vu écrire », laissant penser qu’il était déjà préparé. 

Fellations forcées et stealthing 

Dans la seconde partie de la vidéo, les jeunes femmes décrivent les agressions sexuelles et viols qu’elles auraient subis.

Fellation forcée, préservatif retiré, « comportement violent » : elles témoignent toutes d’évènements traumatiques. Pour certaines d’entre elles, c’était la première fois qu’elles avaient un rapport sexuel.

Repoussé par les jeunes femmes, Norman Thavaud aurait poursuivi son chantage : « Tu ne m’aimes pas », « tu es trop jeune », « tu es comme les autres”, leur aurait-il dit.

Pendant la fellation il tenait ma tête, il m’a éjaculé dans la bouche, sans mon consentement.

Sous la pression, plusieurs finissent par « accepter de le soulager ». « Pendant la fellation, il tenait ma tête, il m’a éjaculé dans la bouche, sans mon consentement », tandis qu’une autre raconte qu’il aurait retiré le préservatif pendant l’acte (alors qu’il savait qu’elle n’était pas sous contraceptif). 

« À la fin du rapport, je me rends compte qu’il a retiré le préservatif« , relate-t-elle. Alors que la jeune femme le questionne, il répond avoir « fini dans les draps » et que la sensation qu’elle ressent découle du fait qu’elle était « vachement mouillée ». « Il m’a même proposé de prendre la pilule du lendemain (…), mais j’avais trop honte », témoigne-t-elle. 

Le retrait de préservatif non consenti, nommé stealthing estconsidéré au Canada comme une agression sexuelle depuis août 2022. En France, comme le souligne BFMTV « un flou juridique persiste, faute de jurisprudence ».

Norman Thavaud réfute toutes les accusations

Des accusations que Norman Thavaud réfute, comme le rapporte TF1 Info, qui relaie les propos qu’il aurait tenu face aux enquêteurs.

Ainsi, il aurait décrit Maggie Desmarais comme une fan obsédée qui « avait un compte Instagram qui lui était entièrement dédié et qui comportait 98 poèmes dont il était l’unique sujet ».

Face aux preuves de discussion, il aurait également assuré ne pas connaître l’âge de l’adolescente au moment des faits. « Norman Thavaud a aussi expliqué aux enquêteurs que c’est en 2020 qu’il a découvert sur Instagram la version que Maggie Desmarais donne de leurs échanges.

Le vidéaste a précisé en larmes subir depuis ‘menaces de mort, hordes d’insultes et cyberharcèlement. (…) Tout ce qu’elle fait contre moi est très orchestré' », informe le média. 

Pourtant, Maggie Desmarais assure, dans la vidéo du Roi des Rats, qu’à la suite d’un tweet du Youtubeur Squeezie – à l’origine du hashtag #BalanceTonYoutubeur – Norman Thavaud l’aurait recontactée lui écrivant « t’as pas parlé ? ».

« Il m’a réécrit au moment du tweet de Squeezie en août 2018, pour me dire de ne pas parler et que si je parlais ça allait ajouter encore plus de poids aux témoignages qui étaient déjà là« , précise la jeune femme.

Selon les informations de TF1 Info, d’autres vidéastes ont été auditonnés dans cette affaire, dont Squeezie (Lucas Hauchard) et Cyprien (Cyprien Iov). 

Toujours d’après le témoignage filmé de Maggie Desmarais, une « trentaine de victimes » se seraient rapprochées d’elle, après la publication de l’enquête Urbania en 2021. « La majorité des histoires ressemblait à la mienne », assure-t-elle. 

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