Gerda Holzinger-Burgstaller, la PDG qui bouscule la finance à Vienne
À 42 ans, elle a pris les rênes en janvier de la Erste Bank, une institution deux fois centenaire. Rare femme à la tête d’une banque, Gerda Holzinger-Burgstaller entend secouer le monde de la finance et briser le plafond de verre.
Dans le microcosme de la finance, elle fait encore figure d’exception. En fonction depuis le 1er janvier, Gerda Holzinger-Burgstaller est l’une des rares femmes à la tête d’une banque. Et pas n’importe laquelle : la Erste Bank, une institution vieille de plus de 200 ans, forte de 2 500 employés et d’un million de clients. Au dernier étage du siège du groupe, juste à coté du célèbre Palais du Belvédère à Vienne, la femme d’affaires aux lunettes noires et au regard clair a retracé son ascension auprès de l’AFP.
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Au départ, rien de prédestinait cette autrichienne au monde de la finance. Gerda Holzinger-Burgstaller a changé d’avis après une première expérience en 2003 à l’Autorité autrichienne des marchés financiers (FMA), en voyant que travailler dans le secteur bancaire permettait d’être actif dans tous les domaines économiques.
À chaque étape de son ascension, elle confie avoir dû affronter invariablement les mêmes préjugés. « Quand un homme devient chef, on ne lui demande pas comment il compte concilier sa vie privée et sa vie professionnelle », sourit la PDG, surprise d’avoir à répondre à ce genre d’interrogations lors de rencontres publiques. « Les premières questions sont toujours spécifiquement liées au fait que je sois une femme », dit-elle. « Ensuite seulement viennent les demandes concernant ma stratégie ou mes ambitions pour l’entreprise. »
Briser le plafond de verre dans les pays germaniques
Au cœur de l’Europe, le puissant secteur bancaire demeure un bastion masculin : en Autriche, seules 12% des entreprises financières sont actuellement dirigées par des femmes. « Je ne compte plus le nombre de fois où je me suis retrouvée entourée d’hommes en réunion », se remémore Gerda Holzinger-Burgstaller. Une tendance d’autant plus forte en Autriche, où les femmes subissent une importante pression de la société pour rester à la maison à l’arrivée de leur premier enfant. Près d’une sur trois est au foyer, selon les chiffres officiels. Et quand elles reprennent un travail, c’est souvent à temps partiel.
Résultat, la situation des femmes sur le marché de l’emploi se détériore. Dans le classement « Women in Work » de la société de conseil aux entreprises PwC, l’Autriche occupait en 2018 la 25e place parmi les 33 pays de l’OCDE. En 2013, elle était 13e.
« Nous sommes en retard. Je crois que c’est particulièrement un sujet dans les pays de langue allemande », lance Mme Holzinger-Burgstaller. « On doit tous s’interroger sur les stéréotypes qui perdurent : quel partage des rôles une société valorise-t-elle ? Comment les filles sont-elles orientées dans leur scolarité ? », détaille la PDG.
« Je ne veux plus qu’une femme se retrouve seule en salle de réunion »
Prévenir le sexisme est une nécessité pour Gerda Holzinger-Burstaller. « Plus de diversité apporte de nouvelles idées pour gérer les problèmes », affirme-t-elle.
« Il y a autant d’hommes que de femmes dans notre conseil d’administration et nous avons comme objectif de généraliser cette égalité à l’ensemble de l’entreprise », explique-t-elle. Pour atteindre cet objectif, la Erste Bank rédige des offres d’embauche neutres sur le plan du genre et prend soin de les illustrer par des photos de femmes. Elle incite explicitement ces dernières à candidater pour les postes de direction.
Mais le quadragénaire souhaite aller plus loin. « Il faut instaurer des quotas. C’est un instrument utile pour une évolution », dit-elle. À la Erste Bank, un quota de 40% de femmes à des postes d’encadrement a déjà été instauré, même si la loi ne l’impose pas. Le gouvernement allemand prévoit d’ailleurs de franchir le pas.
« La société est prête, j’en suis la preuve ! On est là pour rester. L’un de mes objectifs, c’est de faire en sorte qu’une femme ne se retrouve plus jamais seule en salle de réunion », conclut Gerda Holzinger-Burstaller.
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