François Mitterrand et Anne Pingeot, le récit d'une passion secrète qui dura 30 ans
En vidéo. – Quarante ans après l’élection du 10 mai 1981, le documentaire François Mitterrand & Anne Pingeot, fragments d’une passion amoureuse, retrace les 30 années les plus secrètes de l’ancien président de la République.
Ignorée du grand public durant trente ans, leur histoire d’amour a défié les conventions, la politique et le temps. Pour la première fois, Anne Pingeot a accepté que les fragments de cette passion amoureuse, soient diffusés à la télévision, avant d’être remis à la Bibliothèque nationale. Documentée par une impressionnante correspondance de 1200 lettres, et de 700 pages d’un journal intime tenu par François Mitterrand, leur relation s’est pourtant écrite sous le sceau du secret et dans l’ombre de l’histoire. Documentaire inédit, François Mitterrand & Anne Pingeot, fragments d’une passion amoureuse (1) dévoile l’histoire du couple et une facette insoupçonnée de l’homme politique.
Rencontre à Hossegor
Été 1963. François Mitterrand passe des vacances en famille à Hossegor. À 46 ans, la carrière de l’homme politique est au point mort et son mariage avec Danielle s’étiole. Le couple fait chambre à part et accepte que chacun vive des aventures de son côté. Frappé par une crise existentielle et une dépression qui ne dit pas son nom, celui qui est alors député de la Nièvre et leader de l’UDSR se détend en jouant au golf, avec son ami Pierre Pingeot, un industriel clermontois. Les couples se reçoivent, et c’est par une belle soirée estivale que François Mitterrand fait la connaissance d’Anne, une des filles de Pierre Pingeot. Vive d’esprit et jolie, la jeune fille de 19 ans capte aussitôt l’attention du quadragénaire. Flattée qu’un homme aussi cultivé s’intéresse à elle, elle accepte de le retrouver pour une promenade sur la plage.
Anne Pingeot
Le goût de vivre et d’aimer
Les vacances se terminent et l’homme politique obtient de la jeune fille qu’elle lui écrive à son retour à Paris. François Mitterrand et Anne Pingeot échangent des courriers réguliers dans lesquels ils fixent les lieux de leurs promenades amicales. Irrésistiblement attiré par la pétillante jeune femme, l’homme qui est au seuil de sa maturité, sent que sa vie s’apprête à basculer. L’étudiante en histoire de l’art lui redonne le «goût de vivre, de rire, d’aimer, de chercher, de comprendre», écrit-il. Au bout d’un an de missives parfois quotidiennes et d’escapades platoniques en région parisienne, il n’y tient plus et lui déclare sa flamme. Déboussolée par cet homme marié de 47 ans éperdument épris d’elle, Anne Pingeot continue de résister. Comme toutes les jeunes filles de bonne famille, elle pressent que son avenir consiste à l’époque à faire un bon mariage et à devenir mère.
Anne Pingeot
Noces secrètes sur les bords de Loire
Mais François Mitterrand poursuit sans relâche, son entreprise de séduction. Une conquête amoureuse dont il consigne les souvenirs dans des carnets remplis de collages, de photos, d’annotations et de mots tendres. Anne ne cesse d’occuper ses pensées et devient «une présence fondamentale dans sa vie». Conquise, la jeune femme cède durant l’été 1965. Et c’est sur les bords de la Loire, dans la bourgade de Chênehutte-les-Tuffeaux, que le couple célèbre ce qu’il considère son «voyage de noces» en secret.
Mais au fil du temps, Anne souffre de la solitude et de cette relation qu’elle doit cacher à tous, même à sa famille. En 1971, elle a 28 ans et se sent épuisée par cette vie dans l’ombre qui la mène à une impasse. Le couple traverse sa première crise. Alors qu’un jeune ingénieur lui fait une demande en mariage, elle décide de rompre avec François. «Je n’ai pas de devoir envers toi. […] Je te demande de me laisser choisir», lui écrit-elle.
Une « passion éblouissante »
Désemparé, François Mitterrand veut la reconquérir. Et une fois encore, ce sont ses mots passionnés qui auront raison du cœur de la jeune femme. Ne pouvant résister à cette «passion éblouissante», ni à son «créateur de joie», elle décide de tout mettre en œuvre pour vivre cet amour. Il lui faut d’abord devenir financièrement indépendante de tous, y compris de François. Grâce à ses études en histoire de l’art, elle réussit le concours des conservateurs des musées nationaux. Passionnée de sculpture, elle deviendra une spécialiste du domaine. Le couple retrouve une forme de sérénité et un certain équilibre. Seul un enfant manque à son bonheur. Anne se sent prête et le souhaite. François aussi, même si cela risque de compromettre son ascension politique.
La double vie du président
Mazarine et Anne Pingeot aux obsèques de François Mitterrand
Leur fille, Mazarine, naît le 18 décembre 1974 à Avignon. Mais être mère célibataire dans la France des années 1970 n’est cependant pas une situation enviable. Anne en souffre. Elle suspecte aussi François d’avoir d’autres maîtresses. Entre 1976 et 1979, le couple traverse plusieurs crises. Le 10 mai 1981, François Mitterrand est élu président de la République. Avec cette élection, sa double vie avec Anne et Mazarine, devient un secret d’État. Contre toute attente, le nouveau locataire de l’Élysée décide de s’installer avec sa deuxième famille, dans un appartement appartenant à l’État. Mais leur bonheur sera de courte durée. En novembre 1981, le président est diagnostiqué d’un cancer de la prostate. Ses médecins, Claude Gubler et Adolphe Steg, ne lui donnent que quelques mois à vivre. Un nouveau secret d’État s’installe, avec des bulletins de santé officiels qui ne font pas mention de la maladie.
Luttant ensemble contre le mal, Anne et François n’ont jamais été aussi conscients de la fugacité du bonheur. Le cancer s’éloigne, avant sa récidive en 1992. Réélu en 1988, le président socialiste est déjà très affaibli. En 1994, il décide de révéler aux Français l’existence de sa deuxième famille. En 1995, se sentant à bout de force, il organise une ultime escapade avec Anne. Durant 4 jours, ils se rendent sur les lieux qui leur sont chers. «Tu as été ma chance de vie», écrit-il dans sa 1218e et dernière lettre à Anne. Une dernière déclaration d’amour avant de s’éteindre dans la nuit du 7 au 8 janvier 1996. Au petit matin, c’est Anne qui appelle l’Élysée pour annoncer la nouvelle.
(1) Un film de Hugues Nancy, Pierre Favier et Yvan Gaillard, avec les voix de Chloé Rejon et Didier Sandre, sociétaire de la Comédie française. À voir dimanche 16 mai à 22h40 sur France 5.
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