Eure-et-Loir : une mère condamnée pour avoir refusé de rendre sa fille au père qu'elle accuse d'inceste
« Je ne rendrai pas ma fille, je préfère retourner en prison s’il le faut », insiste Sophie Abida, 38 ans. Samedi 22 avril, écrit Le Parisien, cette mère de famille de cinq enfants a été condamnée à une peine de 10 mois de prison avec sursis probatoire sous plusieurs conditions. Elle a été libérée après trois semaines passées en détention provisoire.
Elle est accusée de soustraction d’enfant, sa fillette Iris de deux ans, qu’elle a refusé de rendre à son père, comme l’oblige une ordonnance d’une juge aux affaires familiales de Chartres. Sophie Abida était également poursuivie pour « messages malveillants » envers cette magistrate.
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Trois enfants ont dénoncé les violences du père
La prévenue l’assure, le père de l’enfant, Vincent T., son ex-conjoint de 49 ans, est un homme « violent », « dangereux » et « incestueux », note le quotidien. Elle a expliqué que trois autres enfants du couple, deux garçons de 6 et 8 ans et une fille de 5 ans, lui avaient confié des faits de violences sexuelles et physiques, dont des viols, de la part de leur père. L’aîné de la fratrie en avait également parlé à un professeur.
Après un dépôt de plainte de la part de la mère en juillet 2022, les enfants auraient confirmé leurs propos auprès des gendarmes. Mais le père n’a jamais été placé en garde à vue, il a simplement été auditionné, et l’affaire a été classée sans suite en février 2023 par le parquet de Chartres.
Le Parisien relate qu’une expertise psychologique, critiquée par la défense de Sophie Abida, a remis en cause la méthodologie du recueil des témoignages. Une seconde, basée uniquement « sur les explications du père » selon la défense de la mère, a aboutie à la même conclusion.
Un micro placé dans le doudou d’une fillette
Selon Me Pauline Rongier, avocate pénaliste chargée de représenter Sophie Abida, un enregistrement audio capté grâce à un micro dissimulé dans le doudou de la fillette de 5 ans aurait pourtant révélé une conversation étrange entre son père et la petite. Durant l’audience, l’avocate a lu la retranscription de cet audio qui décrit que le père, soupçonné de s’être allongé sur le lit de sa fille, lui aurait demandé de se calmer afin qu’il lui fasse « un petit massage ». La petite fille aurait alors geint et hurlé : « Je ne veux pas, je ne veux pas ! ». Au procès, le père aurait assuré qu’il voulait simplement soulager sa petite fille qui avait des douleurs de croissance aux jambes.
L’avocate regrette également que « monsieur » a eu accès à cet enregistrement avant d’être entendu par les enquêteurs. « Les investigations ont été bâclées », assure-t-elle. C’est pourquoi la mère n’a pas encore communiqué l’endroit où se trouvait Iris.
« Un état de nécessité et un principe de précaution m’obligent à protéger ma fille », avait-elle défendu pendant l’audience. Sophie Abida précise tout de même que Iris est « en sécurité ». L’enquête pour retrouver la fillette est toujours en cours.
Sophie Abida déjà condamnée pour soustraction d’enfant
Vincent T., lui, dément formellement les accusations de son ancienne femme avec qui il a divorcé en 2021. Sauf celles de violences physiques « légères », dit-il, pour lesquels il a eu un rappel à la loi, cette même année, précise Le Parisien. La juge aux affaires familiales, elle, a estimé que la mère était une « menteuse », « manipulatrice », et qu’elle avait poussé ses enfants à prononcer de fausses accusations envers son ancien conjoint. La magistrate lui a alors retiré la garde de ses quatre enfants issus de cette union, la transférant au père depuis le 13 février 2023.
« La justice me reproche de ne pas me taire et de ne pas avoir respecté la loi du silence qui prévaut dans les affaires d’inceste. C’est bien connu, les mères qui dénoncent des faits d’inceste sont souvent considérées comme des mères aliénantes », a dénoncé la prévenue au tribunal de Chartres.
En 2013 et 2014, Sophie Abida avait été déjà condamnée pour non représentation de l’enfant dans le cadre d’un litige avec un ex-compagnon au sujet de leur fille née en 2009. Elle avait accusé le père de violences sexuelles et, là encore, l’affaire avait été classée sans suite.
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