Deuil : après la mort de ses deux filles, cette maman raconte ce qui l'a aidée à tenir
Face au deuil, la consolation. Anne-Dauphine Julliand a perdu ses deux filles atteintes d’une maladie grave. Dans un livre, elle parle de la puissance de la consolation, des phrases et des gestes de proches ou d’inconnus qui l’ont aidée à faire face à cette épreuve ainsi qu’à sa souffrance. Témoignage.
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« Quand la foudre tombe, on a vraiment le sentiment que l’épreuve et le malheur que l’on éprouve à ce moment-là va contaminer tous les aspects de notre vie. Et puis petit à petit, on s’aperçoit que comme un enfant, le bonheur essaie de se faufiler ». Dans son livre intitulé Consolation (éd. Les Arènes), Anne-Dauphine Julliand, réalisatrice et romancière, s’interroge sur le sens de la vie après la perte de ses deux enfants et raconte comment elle a appris la consolation.
Il y a une quinzaine d’années, une maladie grave est diagnostiquée chez sa fille de deux ans : « une leucodystrophie métachromatique qui allait la condamner en très peu de temps », explique-t-elle. Après cette annonce, elle apprend qu’une autre de ses filles est atteinte de la même pathologie.
« Je ne vais pas vous expliquer ce qu’il se passe dans le cœur d’une maman quand elle apprend que deux de ses enfants sont appelés à vivre une vie compliquée et courte », indique Anne-Dauphine Julliand. Repli sur soi, sentiment d’être hors du monde, larmes… Cette maman raconte à quel point cette épreuve, cette peine immense, l’a bouleversée.
« Il me faudra toute une vie pour être consolée »
Face à cette souffrance qui ne la quitte pas, elle apprend la consolation. « On vit chacun des épreuves différentes mais finalement, la souffrance est la même avec des degrés divers, certes, et surtout, la consolation est la même ». Elle parle de cette consolation comme quelque chose de simple et de délicat à la fois : « C’est toujours la même phrase dont on a besoin : ‘Je suis là’. Et si dans ce ‘je suis là’ résonne un ‘je t’aime’, ce ‘je t’aime’ qui unit notre humanité, qui fait la force de notre humanité, on est sûr de trouver la consolation », explique-t-elle.
Évidemment, Anne-Dauphine Julliand n’est pas « consolée définitivement ». « Je pense qu’il me faudra toute une vie pour être consolée de cette très grande peine là, mais j’ai été consolée tant par des gens que j’aime que par des inconnus », indique-t-elle.
La consolation, « c’est s’approcher, rentrer dans le périmètre de la souffrance »
Elle se souvient notamment de cet homme dans la rue, qui l’a vue pleurer et qui lui a demandé s’il pouvait faire quelque chose pour elle, avant de lui faire une petite caresse sur le bras. « J’ai aimé ce simple geste qui a demandé beaucoup de courage certainement à cet homme, pour le faire et pour que ce geste ne soit pas mal interprété. Moi j’y ai vu vraiment une preuve de son amour dans l’humanité », se souvient-elle.
Anne-Dauphine Julliand repense aussi à cette infirmière, qui s’est approchée d’elle alors que sa fille était hospitalisée dans un état critique et lui a simplement dit : « Je suis là ». « Dans cette toute petite phrase qui a une force absolument incroyable, il y a tout ce dont j’avais besoin : que quelqu’un s’approche, que quelqu’un me dise que je n’étais pas toute seule pour vivre ça », se rappelle-t-elle.
Pour cette maman, c’est de cette façon que pourrait être décrite la consolation : s’approcher. « C’est rentrer dans le périmètre de la souffrance, et c’est dire ou faire comprendre, parce que parfois c’est au-delà des mots, à l’autre, qu’on est là », précise-t-elle.
« J’ai appris à laisser éclore dans ma vie des petites bulles de bonheur »
Anne-Dauphine Julliand l’affirme : face à cette épreuve, elle n’a pas de recette miracle. « J’y suis juste allée un jour après l’autre » et avec le temps, « j’ai appris à laisser éclore dans ma vie des petites bulles de bonheur », indique-t-elle. La preuve de ce cheminement à ses yeux ? Ses ongles vernis. « Ça paraît très anodin, il y a plein de femmes qui sont comme moi avec les ongles vernis. Pour moi, c’est vraiment un acte de résistance ».
Et pour cause : lorsque ses deux filles étaient malades, cette maman avait laissé de côté toute forme de coquetterie, jusqu’au jour où elle est tombée sur un petit flacon de vernis et a décidé de se faire les ongles. « J’ai éprouvé dans ce petit bonheur une très grande joie et un sentiment de victoire en me disant : ‘Là j’ai un peu chassé le malheur’. Cette légèreté, c’est la seule chose qui permet d’éviter que la gravité nous plombe et nous fasse couler, donc je continuerai à avoir les ongles vernis aussi longtemps que je vivrai », conclut-elle.
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