Confinée dans 9 m² à Aix, une étudiante raconte son quotidien dans un livre

  • A 23 ans, Emeline Willocx, passée par le concours Éloquentia de Marseille, publie à compte d’auteur Journal d’une confinée en 9m². 
  • Elle y fait le récit de 55 jours de confinement dans sa chambre d’une cité U à Aix-en-Provence.

En quelques heures, elle a vu sa cité U se vider après l’annonce du premier confinement, au printemps dernier. Etudiante en licence de philo à
Aix-en-Provence, Emeline Willocx n’a pas de plan B. Et un CDI chez Carrefour qui lui paie à la fois son logement et ses études. Alors pour tenir, elle écrit chaque jour des posts sur Facebook et se pique au jeu, jusqu’à autoéditer aujourd’hui à 23 ans un livre intitulé Journal d’une confinée en 9m²*. Elle y tient la chronique de ses journées à occuper le vide, entre absurde, humour et moments de tristesse aussi.

« Même dans une grande maison, avec un jardin, on tourne en rond, lance-t-elle. Le côté 9m² ce n’est pas pour faire du misérabilisme, mais pour faire comprendre que dans un petit espace, on peut quand même trouver de quoi s’échapper mentalement. » Après un texte « pétage de câble », le premier jour du confinement, Emeline Willocx déroule des chroniques presque sans ponctuation, qui font écho au quotidien de nombreux étudiants. Le rendez-vous est fixé sur la page Facebook d’Éloquentia Marseille, qui les publie chaque soir vers 23h30.

« Le confinement a ravivé mon histoire d’enfant placé »

Car c’est par Éloquentia qu’Emeline est arrivée à l’écriture. En 2018, elle est demi-finaliste de la première édition marseillaise de ce concours de joute oratoire. « On passait devant un jury avec des avocats, des journalistes, là je me suis dit que je savais peut-être écrire, et que je pourrais faire quelque chose avec ça ». C’est en visionnant le film A voix haute, dans le dernier foyer où elle est alors placée, qu’elle découvre Éloquentia et décide de se lancer dans l’aventure. Elle fait aussi ses armes sur les scènes ouvertes du
théâtre de l’Œuvre à Marseille. De ses slams du début, son journal garde une trace dans le rythme et la quasi-absence de ponctuation.

« Le confinement a ravivé l’abandon, la solitude, les manques liés à mon histoire d’enfant placé », confie Emeline, qui veut aussi retenir de cette période l’entraide entre étudiants, et le Crous qui est venu lui déposer ses repas jusque devant sa porte les jours où elle n’arrivait pas à descendre. Et le fil de l’écriture qu’elle a réussi à tirer 55 jours durant. Au mois d’août, écoutant les conseils de lecteurs, elle se décide à envoyer son tapuscrit à un éditeur à compte d’auteurs. Elle fait un emprunt à la banque, dépose des exemplaires à la librairie Goulard, sur le cours Mirabeau à Aix-en-Provence, tout en continuant son master d’écopoétique.

De la cité U à la colocation

Avec une association catholique, elle a récemment recueilli les témoignages d’étudiants du campus d’Aix-Marseille pour un projet de livre. « Beaucoup d’étudiants vont mal », a-t-elle constaté. Il y a quelques jours, Emeline a aussi rencontré le président de l’université. « Je ne veux pas être l’exemple d’une génération sacrifiée », a-t-elle fait passer comme message.

Son master et son emploi d’étudiante ne lui laissent pas beaucoup de temps pour écrire ces jours-ci, mais Emeline sait qu’elle y reviendra vite. Toutefois, elle prévient, il ne faut pas compter sur elle pour un journal du confinement saisons 2 et 3. « Je ne vais pas surfer sur la vague », dit-elle. Et puis, entre-temps, elle a pu quitter la Cité U pour une coloc qui ne demandait pas de garant.

*Journal d’une confinée en 9m² de Emeline Willocx, aux éditions Anovi, 12 euros.

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