Comment apprendre à lâcher prise ? Les conseils de Fabrice Midal

Pressuré par mille injonctions, on rêve de « lâcher prise ». Comment puiser de la liberté dans cette formule sans en faire une nouvelle contrainte ?

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Alors que notre société a tenu ses promesses de progrès sur des points essentiels – la plupart d’entre nous vivons mieux que nos ancêtres : accès aux soins, à la propriété, aux études, aux loisirs, aux voyages, à la liberté d’expression, etc. -, un malaise profond s’exprime. L’envers du décor révèle des symptômes de grandes souffrances, dont la frustration, la dépression et le burn out sont les plus commentées. En réponse, les méthodes de développement personnel nous livrent des clés pour tenir le coup en nous invitant, par exemple, à « lâcher prise ». Lâcher pour tenir… Comment rendre ce paradoxe tenable ? En ne le dévoyant pas de son sens véritable, nous dit Fabrice Midal, philosophe et fondateur de l’Ecole occidentale de méditation, qui nous aide à lui rendre sa véritable dimension.

Lâcher prise… une tentation très actuelle. Pourquoi, selon vous ?

Fabrice Midal : Tout en prétendant nous émanciper de certaines normes, notre époque en produit de nouvelles dans tous les domaines de notre vie. Les discours s’uniformisent tous azimuts. Pour ne pas être en reste, nous nous torturons pour les intégrer, alors que ces normes ne nous correspondent pas et que, souvent, elles peuvent se contredire. On aspire donc profondément à « lâcher prise ». Sauf que ce projet même, formidable en soi, n’échappe pas toujours aux injonctions qui nous coupent de nous-mêmes. C’est simple, moi, si quand je suis énervé, on me dit « Lâche prise ! », cela m’énerve encore plus ! Si vous voulez « lâcher prise », abandonnez très vite cette idée…

Comment ne pas en faire une nouvelle injonction intenable ?

F. M. : A quel moment entend-t-on, que ce soit de notre voix intérieure ou de celle de notre entourage ,« Allez, lâche prise ! » ? La plupart du temps, c’est lorsque nous ressentons une émotion dite « négative » : colère, peur, stress, tristesse… Autrement dit, on culpabilise de ressentir ce que l’on ressent. S’il est nécessaire de lâcher prise, c’est justement avec les injonctions contradictoires qui nous intiment d’être « parfaits » : positif, détendu, calme alors que nos modes de vie, et la vie tout court, provoquent en nous des tensions et des heurts parfois extrêmes. C’est pourquoi, avant de pouvoir lâcher prise, il est nécessaire de savoir ce que l’on vit, certainement pas de s’interdire une émotion de la rencontrer, au contraire, pour entendre ce qu’elle a à nous dire, de juste, ou d’injuste.

C’est donc une invitation à prendre des risques, à être plus libre ?

F. M. : Oui. A être véritablement actif. Puisqu’en rencontrant nos émotions, on peut les transformer, et ainsi transformer les choses. Sans quoi, « lâcher prise » devient un encouragement à l’impuissance. Ou à la violence, ce qui revient au même. C’est pourquoi je préfère l’expression « Foutez-vous la paix « ! », qui vise à nous libérer de la comparaison, de l’autoflagellation, du formatage dans une sagesse factice qui nous lobotomise. En se « foutant la paix » nous laissons libre court à nos ressources, nous découvrons notre singularité. Et c’est ce dont nous avons le plus besoin aujourd’hui : de confiance en nos propres ressources pour trouver du courage, de la force d’âme, de la liberté intérieure et la possibilité de faire corps avec l’objet de notre attention.

L’exercice : rencontrer ce que l’on vit

Pour pouvoir faire la distinction entre un objectif important et un autre qui n’a pas de sens.

•Asseyez-vous simplement là où vous êtes. Prenez un instant pour simplement vous poser et donner un peu de place à ce qui vient.

•Essayez de rencontrer ce que vous ressentez, là, maintenant, que ce soit agréable ou difficile.

•Laissez tomber les jugements « je n’ai pas le droit de ressentir ceci, je devrais plutôt ressentir cela ».

• Soyez prêt à rencontrer votre expérience exactement telle qu’elle est. Irritation, colère, gêne, excitation. . . sans aucune critique.

•Explorez, prenez le temps : est-ce de la joie, de l’enthousiasme, de la tristesse ? Est-ce que derrière ma tristesse il y a de la colère ?

• Ce moment fait un bien fou parce qu’il permet de sortir de la confusion. Car nos émotions ne demandent qu’à être reconnues, pas forcément expliquées – ici il ne s’agit pas d’analyser.

A lire

Foutez-vous la paix ! Et commencez à vivre, Rester serein quand tout s’effondre, de Fabrice Midal, aux éditions Flammarion.

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