Chapelle royale et cabinet d'angle : deux joyaux restaurés au Château de Versailles

Une chapelle royale étincelante au-dessus des toits, un cabinet du roi qui retrouve ses teintes vives d’origine : deux joyaux viennent d’être restaurés au Château de Versailles, témoins à la fois de la majesté et de l’intime des Bourbons.

« Vous contemplez la chapelle telle que voulue par (l’architecte Jules) Hardouin-Mansart, telle que Louis XIV a pu la contempler, à l’exception du grand lanternon, supprimé en 1765″, se félicite auprès de l’AFP Frédéric Didier, architecte en chef des monuments historiques qui pilote le chantier depuis quatre ans.

Un chantier de restauration de la chapelle lancé en 2018 qui a nécessité plus de 16 millions d’euros d’investissements, financés notamment grâce à la Fondation suisse Philanthropia et plusieurs mécènes, dont Saint-Gobain et LVMH. 

« Après avoir traversé les siècles avec seulement quelques rénovations mineures, la Chapelle royale avait besoin d’une restauration générale », souligne le service presse du Château de Versailles dans un communiqué.

Une « forêt » de chênes pour la charpente

Charpente, vitraux et décor sculpté ont ainsi pu bénéficier d’une rénovation, dans le respect des traditions et grâce à l’intervention d’une multitude de corps de métiers et d’experts sur secteur de la conservation du patrimoine.

« C’est éblouissant, cette toiture irradie la ville, l’ensemble Versailles est rééquilibré », s’enflamme Catherine Pégard, présidente de l’Etablissement public, relevant qu’il s’agit de « travaux de même ampleur que ceux de la Galerie des glaces en 2007 ».

Frédéric Didier accompagne l’AFP sous la charpente datant de 1705 : une « forêt » de chênes de couleur blonde, comme l’était celle de Notre-Dame de Paris détruite par l’incendie de 2019. « On a pu restaurer à l’identique en conservant les bois anciens », dit-il.

La quasi totalité des sabliers, pièces horizontales de plusieurs tonnes soutenant la charpente, ont dû être remplacés. Les infiltrations avaient provoqué des affaissements de 20 cm.

Une centaine d’ouvriers et de métiers d’art pour la restauration

La présence d’amiante dans le mastic des vitraux a obligé à les déposer et à les décontaminer. Et pour la première fois depuis l’Ancien Régime, les dorures sur tous les plombs devenus ternes, ont été refaites et étincellent.

Des bas-reliefs abîmés ont été restaurés en modelage. Les statues n’ont pas été remplacées mais seulement restaurées. « Ces grands anges, de beaux bébés de 200 kg, on a dû les démonter, les gruter, les restaurer en atelier, remplacer les armatures internes et les replacer », raconte l’architecte. 

Cette chapelle royale est « le seul édifice des XVIIe-XVIIIe siècles encore intact avec toute sa statuaire d’origine », souligne-t-il. Le chantier a mobilisé une centaine d’ouvriers de nombreux métiers d’art, permettant la formation d’apprentis. Des recoins n’étaient documentés que par des photos noir et blanc des années 50.

« Certains historiens considèrent que c’est ce qu’il y a de plus abouti dans le palais. Cette fin du règne de Louis XIV, c’est un moment de perfection« , souligne Laurent Salomé, directeur du musée. A 40 mètres de haut, « elle émerge de la ligne horizontale des toitures et brouille la symétrie, représente un élan vertical. Elle a été voulue pour symboliser l’idée que la maison de Dieu domine la demeure des hommes », explique l’architecte.

Des tiroirs secrets dans le cabinet d’angle du Roi

Chef-d’oeuvre de l’art rocaille, le cabinet d’angle du Roi, salle de travail de Louis XV, a retrouvé lui aussi son éclat, financé notamment par le mécénat de Rolex. Avec en son centre le génial bureau à cylindre, muni de tiroirs secrets et dont la réalisation a pris neuf ans.

« Ce cabinet est une de pièces emblématiques du château par cette dualité d’un lieu de pouvoir et d’un lieu très intime », où les rois gardaient leurs collections de médailles, note Catherine Pégard. La dorure ancienne des glaces et des boiseries a été complétée. Et la peinture à la colle en « blanc de Roi », couleur froide et contrastée, a été retrouvée à l’identique, explique Laurent Salomé.

« Au XXe siècle, on croyait qu’un blanc crème était plus juste historiquement, on le trouvait plus élégant », s’amuse-t-il, en comparant le cabinet d’angle avec les salles voisines beaucoup plus ternes. « Ces réalisations, dans cette période Covid, manifestent l’engagement de Versailles pour tous les métiers d’art et l’emploi », souligne la présidente de l’Etablissement public.

Et les restaurations ne cessent jamais : l’un, celle du cabinet du Dauphin, est en cours, celle des appartements de Madame du Barry, favorite de Louis XV, vient de débuter. Son achèvement coïncidera avec une grande exposition inédite à Versailles consacrée à Louis XV, pour l’automne 2022, révèle à l’AFP Mme Pégard.

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