Après la pose d'un implant contre les fuites urinaires, 44 femmes dénoncent des effets secondaires graves et portent plainte
- Douleurs intenables et septicémies
- Un taux de complications à 3% et des patientes mal-informées ou mal prises en charge
- Un dispositif répandu en France mais surveillé par l’ANSM
Elles dénoncent toutes des « effets secondaires graves » après la pose d’une bandelette sous-urétale, un dispositif anti-fuites urinaires.
44 femmes portent plainte contre X pour « tromperie aggravée et blessures involontaires », comme l’a confirmé BFMTV lundi 26 décembre 2022 « auprès du parquet de Paris », reprenant une information du Parisien attestant, la veille, de 43 plaintes.
« En novembre 2020, 21 plaintes contre X sont déposées auprès du parquet de Paris, 22 autres en novembre 2021 et des dizaines de nouvelles sont en cours de constitution », alertait déjà France 3 Nouvelle-Aquitaine il y a quelques semaines.
Si ces bandelettes sous-urétrale « sont des dispositifs médicaux implantables destinés respectivement au traitement de l’incontinence urinaire », rappelle l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament (ANSM) sur son site, depuis leurs opérations, des centaines de femmes rapportent, sur un groupe Facebook créé en 2017, des douleurs et brûlures, des problèmes à la miction, des hypercontractions du périnée ou encore des infections urinaires à répétition.
Douleurs intenables et septicémies
Elles ont entre 30 et 85 ans et depuis la pose de ce dispositif censé stopper les fuites urinaires, elles souffrent continuellement.
Quand certaines témoignent de douleurs semblables à « des coups de couteau qui cisaillent le vagin » auprès du Parisien, d’autres doivent emprunter des « milliers d’euros » pour payer une opération de retrait aux Etats-Unis.
C’est ce qu’a vécu Nathalie, interrogée par le quotidien national. Après la pose de sa bandelette en 2019, elle ne pouvait plus porter de pantalon ou se déplacer en voiture. Alors qu’elle se plaint à son médecin de ses douleurs, il lui conseille d’aller voir un psychologue. En 2021, elle découvre alors un collectif Facebook où des centaines de femmes parlent d’effets secondaires graves semblables.
Elle y apprend l’existence d’un chirurgien américain, capable de lui retirer le système anti-fuites pour 18 000€. Ce chirurgien, Maria, interviewée par France 3, a aussi le projet d’aller le consulter. Elle qui se levait douze fois par nuit pour aller faire pipi, a emprunté à sa banque de l’argent après avoir été, en juin 2022, victime d’une septicémie liée à ses trop nombreuses infections.
D’autres victimes se sentent « piégées ». « On m’a expliqué qu’il était trop risqué de l’enlever complètement et qu’elle ne pouvait plus être retirée à 100% », témoigne Géraldine, également au micro de France 3 Nouvelle-Aquitaine.
Un taux de complications à 3% et des patientes mal-informées ou mal prises en charge
Pourtant, elle – et beaucoup d’autres – n’a pas été prévenue, en amont de l’opération, que de telles séquelles pouvaient découler d’une pose de bandelettes anti-fuites.
« Elle [son urologue, ndlr] m’a parlée de la pose de bandelettes synthétiques comme un traitement chirurgical courant et efficace. L’opération dure vingt minutes », poursuit Géraldine. « L’urologue m’a assurée d’une vie normale un mois après l’opération », complète Sylvie (prénom d’emprunt), auprès de La Depêche du Midi.
« Le taux de complications s’élève à 3%. Même le plus performant des chirurgiens ne peut les éviter… Mais il faut que les patientes en soient bien informées« , explique le Secrétaire général de l’Association française d’urologie, Xavier Gamé. L’urologue au CHU de Toulouse dit retirer « une vingtaine de bandelettes par an à des patientes venant de toute la France, souffrant de complications », dans une interview accordée au Parisien.
« Je me doutais que mes problèmes étaient liés à ma bandelette mais quand j’en parlais à l’urologue, il s’énervait », confie Maria au Parisien. « Les médecins disaient que les problèmes n’étaient pas dus aux bandelettes, que c’était lié à la ménopause ou autre. Et les patientes les croyaient », confirme Marie-Christine Siaudeau, administratrice groupe de soutien à France 3.
Un dispositif répandu en France mais surveillé par l’ANSM
Pourtant, chaque année en France, entre 27 000 et 40 000 opérations de ce type sont effectuées, alors que le dispositif est interdit en Ecosse et en Nouvelle-Zélande.
Un arrêté de 2020 a néanmoins amélioré la prise en charge des femmes et impose que l’opération soit effectuée par « un médecin ayant au moins 15 interventions à son actif » et instaure « un délai de réflexion » et un « suivi médical ».
Malgré ça, le dispositif fait actuellement l’objet “d’un plan d’action qui repose sur une surveillance renforcée par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’évaluation médico-scientifique de leur efficacité par la HAS, un encadrement des pratiques et une amélioration du parcours de soins par le renforcement de l’information des femmes”, souligne Le Parisien.
Au Canada, « le gouvernement a reconnu un défaut d’équipement et a accepté de rembourser 155 femmes qui ont dû aller faire retirer leurs bandelettes aux Etats-Unis où un chirurgien s’est spécialisé dans le domaine », rapporte France 3 Nouvelle-Aquitaine.
En France, le parquet de Paris confirme qu’une enquête pour des chefs de « tromperie aggravée et blessures involontaires » a été ouverte le 21 avril 2021 (les investigations sont menées par l’office de lutte contre les atteintes à la santé publique, l’OCLAESP).
« Elle devra déterminer les responsabilités, si ce sont les laboratoires qui ont mis sur le marché ces dispositifs ou les médecins qui n’ont pas alerté les patientes sur les risques encourus » explicite Maître Hélène Patte, l’une des quatre avocate en charge de l’affaire, auprès du média régional.
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