"À mon seul désir" : le strip-tease vu par celles qui se déshabillent

Alors que les clubs de striptease symbolisent le plus souvent des lieux de perversion où les hommes viennent s’oublier devant des femmes jetées en pâture, À mon seul désir ouvre une nouvelle voie entre la comédie érotique et le récit d’initiation.

Le troisième long métrage de Lucie Borleteau offre une variation ludique sur le plaisir féminin, quelque part entre Showgirls et The Full Monty. Présenté sous la forme d’un conte adressé aux spectateur·rices, par l’entremise d’un regard caméra relevé au rimmel, le film s’avère être le récit d’une transgression, de l’ordre du «  t’es cap ou t’es pas cap  ?  », avec toujours l’idée d’une sexualité joyeuse.

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Dans les coulisses du fantasme

Sans occulter les mauvais jours des « backrooms  » de l’effeuillage, cette immersion a surtout l’ambition d’épouser le point de vue des danseuses. Cela donne la trame suivante. Aurore (Louise Chevillotte), à peine sortie des études, pousse la porte d’un petit club de striptease parisien, À Mon Seul Désir, pour monter sur scène, faire bâiller son vêtement et se confronter à ses propres fantasmes.

En suivant son apprentissage, la chronique de Lucie Borleteau ouvre un vaste champ de réflexion sur l’érotisme, entre rêveries cabotines et audaces romantiques. Sans arrière-pensées moralisantes, elle interroge aussi les limites de l’expérience, lorsque la novice se laisse tenter par la prostitution.

Après avoir filmé une femme dans un groupe d’hommes sur un vieux cargo dans Fidelio, l’odyssée d’Alice (2014), la réalisatrice s’aventure au sein de ce qui a tout l’air d’un gynécée dès lors que les hommes sont essentiellement tapis dans l’ombre du public.

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Ce sont les femmes qui regardent

Comme une petite révolution copernicienne de la jarretière, les femmes se montrent mais ce sont elles qui regardent. Avec de tout petits moyens, elles bricolent des spectacles festifs – revisitant dans les plis de leurs culottes des thèmes de société aussi sérieux que les gilets jaunes ou l’écologie – qui participent au charme de l’ouvrage.

Dans les interstices des représentations, Aurore poursuit son exploration intime dans les bras d’une stripteaseuse (Zita Hanrot) dont elle tombe amoureuse, mais aussi au gré des rencontres. Naviguant entre le cabaret, ce milieu interlope à l’abri du monde, et les pavés, elle effleure subtilement tous les recoins de Paris de son puissant désir.

Par le biais d’un trucage à la Méliès, elle déshabille du regard la capitale, dénudant en un clin d’œil les passantes, comme son propre reflet. À rebours des tombereaux de poses érotiques déversés sur les écrans, la chorégraphie de l’éros fait ici l’effet d’un tour de magie.

De Lucie Borleteau, avec Louise Chevillotte, Zita Hanrot, Laure Giappiconi, Pedro Casablanc, Melvil Poupaud…

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