Valérie Karsenti ("La fugue") : "Beaucoup de parents ne connaissent pas leurs adolescents" – EXCLU

INTERVIEW – France 2 diffuse le téléfilm La fugue, le mercredi 6 janvier 2021, à 21h05. À cette occasion, Femme Actuelle a interviewé Valérie Karsenti qui joue le rôle de Jeanne, la mère à la recherche de sa fille Chloé, disparue à 14 ans.

  • Valérie Karsenti

Chaque année, 50.000 mineurs sont déclarés en fugue, en France. Une disparition soudaine qui met souvent les parents dans une situation de désarroi et de désespoir. France 2, dans le cadre de la soirée continue, présentée par Julian Bugier, programme le téléfilm La fugue réalisé par Xavier Durringer, suivi d’un débat, le mercredi 6 janvier 2021, à partir de 21h05. Valérie Karsenti incarne le rôle de Jeanne, cette mère en quête de sa fille de 14 ans. Femme Actuelle a eu l’occasion d’interviewer la comédienne de 52 ans pour recueillir ses impressions.

Femme Actuelle : Pouvez-vous nous raconter en quelques mots l’intrigue de La fugue ?
Valérie Karsenti :
C’est une jeune fille de 14 ans, Chloé, qui fugue. Le téléfilm raconte la quête que mènent sa mère Jeanne, le rôle que je joue, son père, assez déficient, qui réapparait, et son beau-père qui l’a élevée. Ils pallient au manque de la police qui ne peut pas faire grand chose. Il y a 150 fugues d’adolescents par jour en France. Ils essaient de comprendre pourquoi elle a disparu. De savoir où elle est, ce qu’elle vit. Ce qu’ils ont loupé ou pas entendu.

Le public vous connaît dans un registre comique avec le personnage de Liliane dans Scènes de ménages. Dans La fugue, vous avez un rôle dramatique…
V. K. :
Franchement, ça fait des années que je fais de la comédie et des choses dramatiques. Je fais les deux parce que j’adore les deux. Il y a des propositions qu’on me fait et que je ne veux pas louper. Que ce soit dans la comédie ou dans le drame. Il y a des projets qu’on me propose. Je ne me pose pas la question du genre. Ça me plaît ou pas, tout simplement. Ce n’est jamais uniquement le personnage qui me fait choisir un projet. C’est l’histoire, la qualité de l’écriture, le réalisateur, les partenaires.

Qu’est-ce qui vous a intéressée dans le personnage de Jeanne, la maman de Chloé, l’ado fugueuse ?
V. K. :
C’est surtout le scénario. L’histoire est extrêmement bien écrite. Avec beaucoup de pudeur. Les scènes sont assez brutales, mais assez simples. J’avais très envie de retravailler avec Xavier Durringer qui avait un point de vue qui me plaisait beaucoup sur le film, sur une forme d’errance, de solitude, de questionnement intérieur. Du rapport à la culpabilité des parents quand ça arrive. Je trouvais cela très fort. C’est tout ça qui m’a donné envie de le faire.

Pour incarner ce rôle, avez-vous rencontré des parents qui ont été confrontés à la fugue de leur enfant ?
V. K. :
Non mais il se trouve que l’auteure, Olga Vincent, et également productrice du téléfilm, a écrit ce scénario avec une part d’autobiographie. C’est pour cela que c’est saisissant dans l’écriture. Dans le téléfilm, il y a vraiment une chose très crue et réelle. Quelque chose de sincère dans son écriture qui m’a touchée. Je ne pouvais pas trouver mieux que cette auteure. Même s’il y a une part de fiction dans cette histoire, ça part d’un vécu qu’elle a ressenti dans son cœur et dans son corps.

« Les adolescents nous échappent et c’est la normalité« 

Lorsque Jeanne signale la disparition de sa fille Chloé à la police, elle se rend compte qu’elle ne la connaît pas vraiment. Vous êtes la maman de deux adolescents. Vous êtes-vous interrogée à ce sujet ?
V. K. :
En fait, Jeanne découvre qu’elle ne sait pas grand chose. Ce qui est tout à fait normal dans la mesure où les adolescents ont une vie parallèle. Ils commencent à préparer leur envol. C’est normal que ce qu’ils vivent avec leurs amis, les premiers émois amoureux, leur première cigarette, les joints, ce sont des choses qu’ils cachent à leurs parents. C’est ce que Jeanne découvre. Mais c’est globalement ce que vivent tous les parents. Là, il se trouve qu’elle le découvre brutalement, dans un état de stress et d’inquiétude.

Jeanne s’aperçoit qu’elle ne connaît pas non plus les fréquentations de sa fille…
V. K. :
Olga Vincent a travaillé avec les conseils d’un psychiatre qui s’appelle Xavier Pommereau, un spécialiste de l’enfance et de l’adolescence. Il disait que les parents, quand ils viennent au commissariat pour déclarer la fugue de leur enfant, sont totalement désespérés, extrêmement inquiets. Si là, on me demandait un numéro de téléphone d’un ami de mes enfants, je ne sais pas si je pourrais le donner. Effectivement, il y a une scène qui est assez violente où, en fait, la policière qui la reçoit est extrêmement factuelle. À chaque question qu’elle pose, la mère n’a pas la réponse. C’est le monde secret de l’adolescence. C’est bien normal qu’il reste secret. Elle ne connaît pas totalement sa fille. Mais c’est le cas de beaucoup de parents avec leurs adolescents. Effectivement, ils nous échappent et c’est la normalité. Je m’en étais déjà rendu compte. Quand il n’y a pas de drame, c’est normal. C’est une fois qu’on a besoin de faire appel à l’entourage qu’on se rend compte qu’on ne le connaît pas.

« J’aime bien que ma famille regarde quand je suis heureuse du résultat« 

Allez-vous regarder ce téléfilm avec vos enfants et votre mari François Feroleto ?
V. K. :
Non, pas du tout. D’abord, j’ai vu le téléfilm. J’informe ma famille quand il y a quelque chose qui passe. Très souvent, ils ne regardent pas. Parce que c’est ma vie et qu’ils ont la leur. Il y a des choses que j’ai tournées et qu’ils n’ont toujours pas vues. J’aime bien qu’ils regardent quand je suis heureuse du résultat. Ça fait plaisir. Mais je ne provoque pas ce genre de situation. Soit, ça se fait, et si ça débouche sur des choses intéressantes, c’est sympa. C’est déjà arrivé. Mais je ne le programme jamais. C’est eux qui décident s’ils ont envie ou pas.

Le téléfilm a été réalisé par Xavier Durringer avec qui vous avez tourné, en 2019, le film L’homme parfait. La prévision de sortie de ce film est en juin 2021. A-t-elle été décalée à cause du coronavirus ?
V. K. :
Oui. Vous vous rendez compte, on a tourné en 2019. Ça fait partie de la très très longue liste de films qui sont en attente d’être diffusés sur les écrans. C’est une catastrophe pour le cinéma, pour les théâtres, les salles de concerts, pour les danseurs. C’est une crise qui a des conséquences terribles dans plein de secteurs, particulièrement dans le secteur artistique. On est très malheureux, seul et désespéré. J’ai une chance colossale de pouvoir continuer à tourner. Mais je pense à tous les artistes qui ne font que du spectacle vivant et qui n’ont pas travaillé depuis le mois de mars 2020. Se sentir aussi abandonné et non-essentiel est une catastrophe. C’est tellement injuste. On pourrait un peu alterner les efforts.

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