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Ouverture de la Bourse de Commerce à Paris : “François Pinault a choisi chaque œuvre et chaque artiste”
Dans le quartier des Halles à Paris, l’ancienne halle au blé érigée au XVIIIe siècle ouvre ses portes le 22 mai à la collection d’art contemporain de François Pinault. Un spectaculaire choc des cultures dessiné par l’architecte Tadao Andō. Visite guidée avec Martin Bethenod, directeur général délégué.
La Bourse de commerce est le troisième musée de la Collection Pinault, après le Palazzo Grassi (2006) et la Pointe de la douane (2009), à Venise. Étape supplémentaire, accomplissement plus grand, ce projet a lieu à Paris, dans l’hypercentre bouillonnant de la capitale. Martin Bethenod, directeur général délégué du lieu, évoque ce musée dont la philosophie est d’être inséré dans le tissu urbain, social et historique.
Madame Figaro. – Comment s’inscrit ce nouveau musée dans la Collection Pinault ?
Martin Bethenod. – Son ouverture a une importance particulièrement forte pour François Pinault, parce qu’elle a lieu en France, son pays, et à Paris, sa ville, qui est la capitale mondiale et internationale des arts. Cela dit, ce nouveau lieu a un air de famille avec les lieux vénitiens. Il est à échelle humaine, et se situe au cœur d’une ville. Ce sont des bâtiments qui, par leur nouvelle destination, sont rendus à une ville, au public. Autre élément de similitude : le dialogue entre un joyau du patrimoine et le regard radical de l’architecte Tadao Andō.
Son geste est un cercle dans le cercle ?
La Bourse de commerce s’est développée au cours des siècles autour de l’idée d’un édifice circulaire. C’est au XVIIIe siècle que Nicolas Le Camus de Mézières dessine la halle au blé. C’est l’époque de l’architecture utopique. La forme ronde a un sens très important pour Tadao Andō, qui fait écho au Panthéon de Rome. Lorsqu’il est venu en Europe pour la première fois, à la fin des années 1960, il a compris la notion occidentale de l’espace architectural en visitant le Panthéon de Rome. Quand on lui a fait visiter la Bourse de commerce, il a eu un choc : il a retrouvé la même sensation mystique de cercle parfait. Très rapidement, il a envoyé un dessin où il avait dessiné un deuxième cercle parfait. Ce projet architectural est né d’un trait.
La première exposition s’intitule Ouverture. Un nom riche de sens en 2021…
François Pinault est un collectionneur passionné, et les projets de ses musées naissent de cette passion de collectionneur. Ce n’est pas une passion froide, c’est quelque chose qui fonctionne sur l’engagement, le désir, un rapport fort aux artistes. Il a choisi le titre Ouverture, qui correspond aux valeurs de la collection : ouverture à la diversité des origines, des disciplines, du genre… Ouverture à l’optimisme, à la tolérance. Cela prend un sens très fort à notre époque marquée par la fermeture de nos musées, de l’espace public, de nos visages derrière leurs masques.
Ouverture est un point de vue sur l’art, l’art ouvert aux problèmes sociaux, raciaux, identitaires de la société. Quels ont été les partis pris de cet accrochage ?
François Pinault a choisi chaque œuvre et chaque artiste. Il y a certaines règles du jeu, comme celle de privilégier les ensembles plutôt que les œuvres séparées. Montrer en cela quune collection n’est pas un échantillonnage, du zapping, mais un engagement dans la durée et en profondeur auprès des artistes. Autre principe, présenter presque exclusivement des œuvres jamais montrées au cours des différentes expositions. La collection est en mouvement et en renouvellement permanents.
Œuvres de David Hammons à la Bourse de commerce.
On parle de trente-six artistes…
Moins de quarante… Il y a quatorze artistes femmes, comme Tatiana Trouvé, Marlene Dumas, Claire Tabouret, Cindy Sherman, Xinyi Cheng… Onze artistes sont issus de la scène française, comme Pierre Huyghe, Philippe Parreno, Michel Journiac… Dans le Passage, qui entoure la Rotonde, Bertrand Lavier a été invité à investir les vingt-quatre vitrines datant de l’Exposition universelle de Paris de 1889, proposant ainsi une déambulation entre les XIXe et XXIe siècles. Autre focus sur un artiste très important, très influent, très impliqué sur les questions raciales : l’Afro-Américain David Hammons. Ce corpus rassemble plus de trente pièces, dont le point d’orgue est l’installation inédite Minimum Security (2007).
La photo occupe une large place au sein de la Collection Pinault…
La galerie du premier étage est dédiée à la photographie, avec un choix de séries des années 1970 à 1990 liées aux questions d’identité, de genre, avec Martha Wilson, Cindy Sherman, Sherrie Levine ou Louise Lawler… En fait, pour ce premier accrochage, on ouvre les dix espaces d’exposition. Il y aura aussi des œuvres in situ dans un escalier, sur une corniche, sur la colonne Médicis. Rudolf Stingel, au deuxième étage, présente trois grandes peintures, sorte de paysage mental de l’artiste. Quant à Pierre Huyghe, il offre, au sous-sol, avec Offspring, une installation inédite, expérience sensorielle hors du temps. La programmation se veut le plus généreuse possible.
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