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La reine Noor et Rania de Jordanie : 30 ans de guerre froide
En forçant son demi-frère cadet, le prince Hamzah, à lui prêter allégeance, le roi Abdallah II de Jordanie vient de régler un conflit dynastique. Mais moins connue, l’inimitié entre les reines Noor et Rania, belle-mère et épouse du souverain, court toujours. Trente ans que cela dure…
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Rania de Jordanie
Sables mouvants en Jordanie. Alors qu’un conflit fratricide vient d’opposer le roi Abdallah II à son demi-frère cadet, le prince Hamzah, les reines Noor et Rania, respectivement belle-mère et épouse du souverain hachémite, confrontent tout autant leur légitimité, leur popularité et leur pouvoir d’influence, depuis plus de trois décennies.
Après s’être déchirée pendant trois jours, la famille royale de Jordanie semble être revenue à l’unité. En apparences du moins, de force plus que de gré. Ce 5 avril, le palais d’Amann a fait savoir que le prince Hamzah, soupçonné de tentative de putsch, avait signé une lettre dans laquelle il prête allégeance à Abadallah II et à sa descendance. Après s’être indignée de l’assignation à domicile de son fils sur la base d’une « pure calomnie », la reine Noor, quatrième épouse et veuve du roi Hussein, n’a pas tardé à insinuer des manoeuvres pour étouffer un scandale dynastique.
La belle-mère d’Abdallah II, né du deuxième mariage d’Hussein de Jordanie avec la Britannique Antoinette Avril Gardiner, a relayé sur Twitter le commentaire d’un correspondant de The Economist moquant l’interdiction par le ministère de la Justice jordanien de commenter davantage le sort du prince Hamzah.
En 1993, Noor est invitée au mariage de Rania et Abdallah, mais on l’écarte des clichés officiels
Pour la veuve du roi Hussein, il s’agit d’une injustice de plus : à la mort de son père, Abdallah s’était en effet engagé à ce que son demi-frère cadet lui succède. Tout comme le prince Hassan, frère du roi Hussein, avait d’abord été désigné comme son successeur, avant qu’Abdallah ne récupère le titre de prince héritier en 1999. L’actuel roi de Jordanie a rompu sa promesse en 2009, quand il a désigné son fils aîné, le prince Hussein, comme l’héritier du royaume hachémite. Sacrifice d’un frère cadet et humiliation de plus pour Noor, poussée à la marge par Abdallah et Rania, depuis le début des années 90.
Quatrième épouse du roi Hussein, Noor comprend vite que sa place dans la famille royale recomposée est en péril, lorsque le souverain apprend qu’il est atteint d’un premier cancer. Des rumeurs de divorce ont déjà circulé par le passé. La reine doit gérer la maladie de son époux et le doute : des âmes pas les mieux intentionnées lui ont rapporté que le souverain entretient une relation avec une employée du service de presse du palais. Elle choisit de croire son mari. Alors qu’Hussein lutte contre la maladie, Abdallah s’impose. Son mariage avec Rania en 1993 projette le peuple jordanien dans l’avenir. Premier affront pour Noor à cette occasion : alors qu’elle est invitée aux noces, elle n’est pas conviée à poser pour les clichés officiels. Un an plus tard, la jeune Rania rit des rumeurs de rivalité dans les pages du Financial Times : « Je ne suis pas jalouse. » Commentaire ambigü : Noor est encore la reine de Jordanie.
Quand Hussein rechute en 1998, Noor se prépare à sa propre chute. En 1999, à la mort du souverain, elle doit accepter les condoléances en présence de Rania. Passation symbolique des pouvoirs. Avant un maintien à distance plus formel : nouveaux roi et reine de Jordanie, Abdallah II et Rania officient lors de cérémonies, où Noor n’est pas invitée. Celle-ci commence alors une vie nomade, entre la Jordanie, Londres et les Etats-Unis dont elle est originaire.
Un tweet sur des ânes mal interprété et l’oubli volontaire du nom de Noor dans un communiqué du palais
Le royaume n’est plus assez grand pour deux reines de beauté et de bonté, malgré leurs parcours et leurs styles similaires. La lumière doit être réservée à la plus jeune, visage de la modernité, nouveau pont entre l’Orient et l’Occident, nouvelle dame de coeur et des arts du royaume. Le bruit se diffuse qu’Abdallah a du remettre de l’ordre dans les finances de son père. Le festival de Jerash, créé par Noor, revient à Rania. On étouffe les dépenses de la nouvelle reine, ses prises de position engagées sur le plan diplomatique.
A la tête de la Fondation du Roi Hussein et de nombreuses associations caritatives, Noor devient une voix gênante pour Abdallah II et son épouse. Ambassadrice zêlée de Global Zero, luttant contre la prolifération de l’arme nucléaire, la belle-mère d’Abdallah II agace les officiels du royaume jordanien. Un tweet est particulièrement mal interprété, quand Noor s’émeut de voir toujours des ânes chercher de la nourriture, comme à son arrivée en Jordanie, dans les années 70. Nostalgie ou tacle au couple régnant pour le faible progrès économique du pays ? Réputée proche de Rania, la journaliste Deema Alam Farraj tranche et accuse l’ancienne reine de nuire à l’image du royaume hachémite.
On le fera pas taire. Les mois qui suivent, Noor s’inquiète plus explicitement du recul des libertés en Jordanie. La réponse du palais sera cinglante : un communiqué déroule que nul autre que le roi ou sa descendance n’est autorisé à se prononcer sur l’état du royaume et que les expressions personnelles n’engagent que ceux qui les formulent. Le nom de Noor n’est pas écrit. Mais tout était déjà signifié…
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Crédits photos : Bestimage
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