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INTERVIEW – Philippe Etchebest : « Si j’en suis là, c’est que je me suis accroché »
A défaut d’être élevé à l’école de la tendresse, Philippe Etchebest grandit sous les auspices de la conscience professionnelle.
Tandis que nous prononçons le nom de Philippe Etchebest à l’heure de notre rendez-vous, une séquence télévisée de 2021 nous revient en mémoire. Celle de la mère d’un candidat de Top Chef incapable d’articuler correctement son nom, s’y reprenant à plusieurs fois, en vain, pour finir par sortir dans une sorte d’éternuement « Echébess« . Une séquence mémorable où on sentait que le chef ne plaisantait pas avec ses origines basques. Homme droit dans ses bottes s’il en est, à la tête de deux établissements bordelais – la brasserie Le Quatrième Mur qui abrite une Table d’Hôtes étoilée, et le restaurant gastronomique étoilé Maison Nouvelle et son bar à cocktails de prestige Le Rode –, le chef, entre fermeté et bienveillance, inspire le respect. Ce n’est pas pour rien qu’il a été choisi en 2011 pour orchestrer l’émission Cauchemar en cuisine, sorte de « stage com-mando » pour restaurateur en difficulté. Philippe Etchebest, en bon trois-quart centre au rugby, « un poste qui engage le physique« , a l’autorité chevillée au corps.
Alors qu’on lui demande si, à 56 ans, à ce stade de sa carrière – trois émissions sur M6 : Cauchemar en cuisine, Objectif Top Chef et Top Chef – et de sa notoriété – il est classé septième personnalité préférée des Français, selon un sondage JDD-IFOP de janvier dernier, il a accompli son rêve d’enfant, il répond, pudique : « Enfant, je ne rêvais pas. » En 2020, il racontait au Parisien, une jeunesse laborieuse. Les légumes donnés à éplucher dès l’âge de 7 ans par son père employé de restaurant, pas du genre « à dire je t’aime« . Ou le jour où ce dernier, devenu patron de sa propre affaire, lui conseillait de venir travailler en dépit d’une blessure causée par un accident de voiture : « Je souffrais le martyre, mais j’y suis allé. » A défaut d’être élevé à l’école de la tendresse – « ça a traumatisé ma sœur, il valait mieux filer droit » –, Philippe Etchebest grandit sous les auspices de la conscience professionnelle. De quoi le propulser au sommet quand il s’agit de se présenter au concours de Meilleur ouvrier de France en 2000. Trois jours avant la finale qu’il remporte, il passe presque vingt-quatre heures sur vingt-quatre à faire des essais acharnés.
“Mon image ? Je ne peaufine rien du tout. Ça plaît, tant mieux ; ça ne plaît pas, tant pis”
Pondéré, Etchebest attribue tout son mérite à sa détermination. « Si j’en suis là, c’est que je me suis accroché, j’ai toujours voulu progresser. Je suis travailleur et engagé… Il faut savoir se donner du mal pour arriver à ses objectifs, tenir dans la ténacité. » C’est ce sens de l’exemplarité à vocation pédagogique qui réjouit à l’antenne. D’autant qu’elle est dénuée de fatuité : « D’accord, peut-être que la télévision me réussit, mais comme j’en ai fait à 44 ans, ça ne m’est pas monté à la tête. Je n’étais pas tout jeune. » A la question, peut-être saugrenue, « Travaillez-vous votre image ? Avez-vous tâché de la peaufiner ? », il sursaute : « Je ne peaufine rien du tout. C’était la condition pour passer devant la caméra. Faire ce que je veux comme je le sens. Ne pas tricher ou mentir. Ça plaît, tant mieux ; ça ne plaît pas, tant pis. Personne ne fait l’unanimité, encore moins moi. Quand on devient un homme public, les articles sont parfois violents, comme les réseaux sociaux. Mais ça me passe au-dessus de la tête parce que j’ai la capacité à avoir d’autres centres d’intérêt. Mon esprit n’est pas pollué avec ces trucs… Et puis, je suis bien entouré. »
A commencer par son épouse, la discrète Dominique, fille de boucher rencontrée en 1994 et courtisée à l’aide d’un bouquet en chocolat, confectionné par ses soins. Elle est aujourd’hui la directrice du groupe Etchebest, une PME de 80 employés qui respecte une stricte parité hommes-femmes. « On collabore ensemble depuis le début mais on ne veut pas trop s’exposer en tant que couple ou avec notre fils Oscar-Louis (adopté au Mexique en 2005, NDLR). Ça ne veut pas dire qu’on ne s’aime pas. » A la question de ce qu’il a fait à la Saint-Valentin, Etchebest s’exclame d’un « Bah, quand on aime une femme, c’est tous les jours« , avant d’ajouter : « J’étais aux fourneaux. Mais dans mon métier, on a l’habitude de tout fêter en décalé puisqu’on est acteur du bonheur des gens. Et attention, ce n’est pas une punition. J’en ai assez d’entendre qu’on fait des boulots pénibles. Pour donner du plaisir, il faut déjà en prendre soi-même. La pénurie de main-d’œuvre que l’on connaît dans la restauration, elle existe dans tous les métiers aujourd’hui. J’aime mon travail. »
Le couple ne s’accorde pas plus de deux semaines de vacances par an
Pour Philippe Etchebest, la cuisine n’est cependant pas une religion exclusive. Varier les plaisirs, voici le secret de sa vie équilibrée. « Décrocher, pour moi, c’est important. Ça nourrit mon esprit, mon bien-être et ma capacité à relativiser. » Les week-ends, ce passionné, qui habite à Bordeaux, part dans sa résidence secondaire en Dordogne, où il mange « des œufs frais du poulailler« , fait de la moto, de la batterie avec son groupe de musique Chef and The Gang, ou court après le ballon ovale avec un entrain qui lui permet d’éliminer ses solides « trois repas par jour, plus le nombre de fois où je dois goûter dans les casseroles ». Pour autant, les vacances annuelles en famille, il le concède, ne durent pas plus longtemps que deux semaines par an, business oblige : « C’est vrai que c’est pas long. » Du coup, il choisit des destinations qui sortent de l’ordinaire. Se faire dorer sur une plage ? Pas son style. Le chef préfère l’exploration. « Récemment, on est allés au pôle Sud. Ma femme a fait des photos. Elle est douée pour ça. Trois ans avant, on avait fait le pôle Nord. Voir que des glaciers fondent, comprendre l’incidence de la pollution sur le climat… Ça permet d’apporter un vrai témoignage autour de soi. »
Sensible à l’environnement, Etchebest cuisine ses légumes en collaboration « avec des producteurs locaux ». Farouchement positif, celui qui a préféré ne pas élever son fils comme son propre père l’avait fait, à la dure, s’est construit une petite philosophie de la vie : « Ne pas s’attarder sur les problèmes, avoir la volonté de ne pas vouloir subir. Ne pas se plaindre et chercher des solutions. » Un mental de patron, en somme. Depuis sept ans que le chef est à la tête de sa propre affaire, il observe : « Quand on gère une équipe, si on a des doutes, mieux vaut les garder pour soi. Et puis rien ne remplace l’implication. Pour faire un parallèle avec le rugby, quand t’es capitaine et que tu dis : « Allez-y, mettez la tête et que toi, t’y vas pas, que tu ne te mets pas au contact, ça ne va pas. » Orfèvre de son plat signature, la raviole de foie gras aux champignons, Philippe Etchebest ne croit pas à une fashion-week culinaire. « Oui, il y a des engouements, mais les modes vont et viennent. Et moi je reste attaché aux bases. Il n’y a pas de créativité sans fondamentaux. » Oscar-Louis, 19 ans, a-t-il prévu de prendre la relève, côté casseroles ? Papa Etchebest est catégorique : « Non, il s’intéresse plus au secteur de l’aide. » Une autre façon de s’impliquer…
Cet article est à retrouver dans GALA N°1550 disponible dans les kiosques ce jeudi 23 février 2023.
Crédits photos : DR
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