Accueil » Célébrités »
INTERVIEW – Nana Mouskouri : « Avec André, on est toujours amoureux »
A 88 ans, Elle jette un regard tendre sur sa vie. Elle ne regrette rien. S’avoue chanceuse. Toujours éprise de son mari comme au premier jour. Le 19 juin prochain, la chanteuse mettra aux enchères au profit de de Fondation des hôpitaux, les tenues de scène qui l’ont accompagnée durant ses soixante-cinq ans de carrière. Le choix du coeur. Rencontre.
Ne l’appelez pas Madame, elle préfère Nana ! Deux syllabes pour un destin hors norme. Deux syllabes pour celle qui a été députée européenne de 1990 à 1994, côtoyé les grands de ce monde, de Martin Luther King au couple Clinton, ou encore Elizabeth II mais qui n’a pas souhaité regarder le couronnement de son fils, Charles III, le 6 mai dernier. Les bisbilles familiales d’outre-Manche chagrinent celle qui se définit comme une « pacifiste ». Conversation avec une vraie star qui n’a rien d’une diva.
GALA : Vous avez décidé de dire adieu aux tenues de scène qui vous ont accompagnée au cours de vos soixante-cinq ans de carrière, cela n’a pas été une décision facile à prendre ?
Nana Mouskouri : Je n’avais jamais voulu m’en séparer jusqu’ici. Elles m’ont accompagnée toute ma vie. Elles sont faites de mes peines, de mes douleurs, de mes joies, de mes larmes et de mes colères aussi. Un jour, je vais partir, peut-ëtre dans pas longtemps. Mais on part tous un jour quelque part, n’est-ce-pas ? Alors je me suis dit : pourquoi ne pas les vendre pour une cause. J’avais déjà donné un spectacle à l’Opéra de Paris pour la Fondation des Hôpitaux avec Madame Chirac, j’ai souhaité poursuivre avec madame Macron. Je l’ai rencontrée par l’intermédiaire d’une amie grecque. J’ai beaucoup d’estime et de respect pour elle. Pour le président aussi. Je la trouve sympathique, je trouve le couple bien, je les admire.
GALA : Où étaient rangés tous ces trésors ?
N.M. : Dans un appartement en région parisienne. Je l’ai acheté en1962 avec le cachet de mon premier disque d’or en Allemagne. J’y ai habité au début de ma carrière et au fil des années. J’y ai entreposé mes costumes de scène. Il y a aussi un vieux piano, de vieilles notes. C’est comme un petit musée.
GALA : Vous partagez votre vie entre la Suisse, la Grèce et la France, où se trouve votre cœur ?
N.M. : S’il se passe quelque chose en France, je tremble. S’il se passe quelque chose en Grèce, je tremble aussi.
GALA : Vous êtes universelle alors !
N.M. : Universelle, je ne sais pas (rires), mais je je suis très connue en Espagne, en Angleterre, en France… Quand Quincy Jones m’avait dit à l’époque : « Tu sais, pour devenir chanteuse aux Etats-Unis, il faut vivre ici.» Je lui avais répondu : « j’espère que peut-être un jour je viendrai vous visiter, mais en tant que chanteuse européenne.» Dans les années 80, j’ai été invitée à me produire avec un orchestre devant le mur de Berlin. J’ ai interprété : « Je chante avec toi Liberté ». Cela fait partie des grandes émotions de ma vie. Et je ne veux pas me vanter, mais bon, je suis aussi multimillionnaire (en disques, ndlr) en Chine !
GALA : Parmi les pièces que vous mettez aux enchères, certaines doivent être plus chargées d’émotion que d’autres…
N.M. : Chaque robe a son histoire. La seule chose dont je n’ai pas pu me séparer, ce sont les robes de Per Spook pour Louis Féraud que j’ai portée quand j’attendais mes enfants Nicolas (55 ans) et Hélène (53 ans). Ils ont souhaité les garder. Pour les autres tenues, je suis contente qu’elles soient vendues pour une cause. Et je serai présente le jour de la vente, ainsi je pourrai voir les personnes qui vont les acheter.
GALA : Choisir ces robes a dû vous faire replonger dans votre passé, quel regard portez-vous sur votre vie ?
N.M. : J’ai eu beaucoup de chance dans ma vie. Non seulement pour ce qu’il m’est arrivé. J’ai été choisie, vous savez, c’est une grande responsabilité.
GALA : Vous avez l’impression que vous étiez destinée à une telle carrière ?
N.M. : Oui, que c’était prévu mais c’était à moi aussi d’être à la hauteur. J’ai très vite eu mon producteur, qui est devenu bien plus tard a mon mari. Il m’a toujours aidée à faire des choses qui aient du sens. Mon ami le poète grec et auteur, Níkos Gátsos de vingt ans mon aîné, qui m’a écrit beaucoup de chansons, parlait beaucoup de vérité, de l’importance de bien se connaître…
GALA : Il faut toute une vie pour parvenir à se connaître, avez-vous le sentiment d’y être parvenue ?
N.M. Je pense que je vais apprendre jusqu’à la dernière minute. Et puis, j’étais une admiratrice de Maria Callas. J’ai eu la chance de la rencontrer dans un club à Athènes où elle venait de temps en temps dîner. Elle me demandait toujours d’interpréter de vieilles chansons grecques. Un jour, elle a voulu savoir pourquoi je chantais. « Je ne sais pas, mais quand je ne chante pas, j’ai l’impression que je ne vis pas. Chanter me donne une existence « . Je lui ai confié que mon professeur de chant considérait que je n’était pas prête pour embrasser une carrière dans la musique classique. Elle m’a répondu alors: « Ecoute, ce qu’on fait dans la vie n’a pas d’importance. C’est pourquoi et comment on le fait qui compte ». Ce conseil ne m’a jamais quitté.
GALA : Avez-vous arrêté complètement la scène ?
N.M. : Non, non, non, j’ai essayé de partir et j’ai compris que je ne pouvais pas arrêter. Fin 2019, j’ai été opérée d’une péritonite, c’est étrange non, à mon âge. J’ai recommencé à chanter un peu. Et le covid est arrivé. Depuis, je n’ai chanté qu’une fois lors de la soirée hommage Formidable Aznavour, (au Dôme à Marseille, le 21 mai dernier, ndlr). Maintenant, je n’ose pas recommencer. Mais j’ai promis de chanter pour la Fondation des hôpitaux et de chanter en Grèce également.
GALA : Travaillez-vous votre voix tous les jours ?
N.M. : Non, mais j’aime chanter a cappella notamment des chansons grecques. Et je fais un peu de vocalises. J’ai des dizaines de chansons dans la tête. Je m’intéresse beaucoup aux textes, ceux de Joni Mitchell, Bob Dylan ou Leonard Cohen. Si je suis témoin d’un événement dans la rue, je ne sais pas pourquoi, je le relie tout de suite à une chanson. Je vois la vie à travers le prisme des chansons. Vous ne pouvez pas savoir combien de fois j’ai chanté, le nombre de concerts, de voyage que j’ai fait… Je suis tellement reconnaissante pour tout ce qu’il m’est arrivé. Et vous savez, je suis passée par un cancer du pancréas…
GALA : On ne le savait pas…
N.M. : Oui, je n’ai jamais voulu en parler. C’était en 2015, je revenais d’Australie, J’ai suivi une chimiothérapie qui a duré huit mois. Je suis optimiste, je sais qu’il ne faut jamais baisser les armes quand on est malade, il faut vraiment lutter contre.
GALA : Et puis vous avez un très bon « médicament » à vos côtés, votre mari André Chapelle ?
N.M. Oui c’est vrai. On s’est mariés en 2003, face à l’insistance de Jean-Claude Brialy, mon grand ami et témoin. C’est lui qui avait fixé la date, un lundi, son jour de relâche au théâtre. Avec André, on se connaît depuis 1964, il est devenu mon producteur. Si je ne l’avais pas eu, je n’aurai pas fait tout ce que j’ai fait. On est toujours amoureux. Quand il est là, je suis bien. J’ai peur de le perdre. Et c’est la même chose pour lui. Et puis, nous partageons ce même amour et ce même respect pour la musique et le travail. Je suis très heureuse de l’avoir trouvé. Ou est-ce lui qui m’a trouvée, je ne sais pas…
*Vente Nana Mouskouri, Mes Robes de Scène. La totalité des lots sera exposée en accès libre à Paris, à la Galerie Sabine Bayasli, 99 rue du Temple, Paris 3ème, à partir du mercredi 14 juin.
Catalogue de la vente dirigée par Maître Jack-Philippe Ruellan, www.svvruellan.com. Possibilité d’enchérir en ligne le jour de la vente sur la plateforme interencheres.com
Cet article est à retrouver dans le Gala N°1564, disponible dans les kiosques ce jeudi 1er juin 2023.
Crédits photos : Veeren -Christophe Clovis / Bestimage
A propos de
-
Abonnez-vous à votre star préférée et recevez ses actus en avant première !
-
Nana Mouskouri
Suivre
Suivi
Il vous reste 85% de l’article à découvrir
Autour de
Source: Lire L’Article Complet