Eurovision 2021: La musique européenne se déconfine à Rotterdam dès ce mardi

Si la finale de l’Eurovision se tient samedi soir, les festivités commencent dès ce mardi soir avec la première demi-finale. Tour d’horizon du voyage musical qui attend le public ces prochains jours

De notre envoyé spécial à Rotterdam (Pays-Bas)

« Il n’y a personne ici et je m’en fiche, je ne risque rien à danser seul. (…) Il n’y a rien de mal à danser chez soi. » On ne pouvait imaginer entame plus appropriée que la chanson du groupe lituanien The Roop pour donner le coup d’envoi de l’Eurovision 2021.

Avec leur Discoteque, les fantasque baltes, ouvriront la première demi-finale, mardi soir, à Rotterdam, tout en marquant le retour de la compétition musicale annulée l’an passé pour cause de pandémie. Le show avait alors été remplacé par une émission spéciale lugubre et anxiogène, qui n’avait satisfait ni les fans ni le grand public. Retour à la fête, donc, avec les représentants de la Lituanie et leur irrésistible chanson invitant à se déhancher dans le confort de son foyer.

La crise sanitaire a aussi inspiré Hooverphonic qui, fidèle au sens de l’humour de leur Belgique natale, aborde le sujet avec un pas de côté. « Après le premier confinement, on s’est dit qu’on allait écrire une chanson sur tout ce qui est suicidaire en ce temps-là : toucher un inconnu, l’embrasser, lui faire une accolade, un coup d’un soir avec quelqu’un que tu ne connais pas », nous a expliqué Alex Callier, cocréateur du groupe qui présentera donc The Wrong Place, une élégante balade, également lors de la première demi-finale retransmise sur France 4 mardi.

Dans la demie de jeudi, la Bulgare Victoria, l’une des favorites de cette édition, livrera, du haut de ses 23 ans, Growing Up Is Getting Old, («Grandir, c’est vieillir ») ritournelle élégiaque tout en vulnérabilité et angoisse du temps filant, qui ne sera pas sans rappeler le travail d’introspection accompli lors des confinements.

Le slogan prône l’ouverture

Mais le mot d’ordre de cet Eurovision, « Open up », va prendre le dessus. Le slogan invite à l’ouverture, à l’épanouissement, au retour à l’action. Dont acte. Le contexte sanitaire n’est pas sans effet sur l’organisation du concours – seules 3.500 personnes assisteront aux shows dans la Ahoy Rotterdam ; Montaigne, la candidate australienne n’ayant pas pu faire le déplacement, elle concourra ce mardi via la diffusion de sa performance enregistrée en mars dans les conditions du direct… –, mais l’heure est au déconfinement des incontournables de l’événement.

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Il y aura des ballades à voix (Amen pour la Slovénie, Here I Stand pour la Macédoine du Nord, Karma pour l’Albanie…) et des bolides dance (Adrenalina pour Saint-Marin, El Diablo pour Chypre, Loco Loco pour la Serbie, Sugar pour la Moldavie…) dont certains feront de l’aquaplaning sur la route du bon goût. Les Finlandais de Blind Channel et les Italiens de Maneskin – grands favoris – assureront le quota rock. Les premiers feront dans le brut de décoffrage pour bande FM et les seconds, adorés dans leur pays, réveilleront l’esthétique glam d’il y a plus de quarante ans. Les Islandais du groupe Daði Freyr & Gagnamagnið ne passeront pas inaperçus avec 10 Years qu’ils servent avec une amusante nonchalance sur scène.

A l’Est, bien du nouveau : l’originalité se trouvera sous ces horizons. Les Ukrainiens de Go_A pourraient faire des ravages avec Shum («Bruit ») mêlant électro et sonorités folkloriques. La technique vocale bien particulière, stridente et mélodique, de la chanteuse passera ou cassera (pour nous, ça passe). La représentante de la Russie, Manizha, dans sa combinaison rouge, référence « à la classe populaire », selon ses dires, chantera un appel à l’empouvoirement de ses compatriotes (sa chanson s’intitule Russian Woman) : « Chaque femme russe doit savoir qu’elle est assez forte pour démolir les murs »… Le morceau, où les sonorités urbaines s’allient aux choeurs plus traditionnels, a de quoi marquer les esprits. Il irrite déjà les conservateurs du pays de Vladimir Poutine.

Beaucoup d’anglais, un peu de français et du sranan

La chanson de la Maltaise Destiny jouera également la partition féministe. « Mec, pourquoi me mets-tu ce verre dans la main ? Tu penses qu’ivre, je te donnerais une chance ? », demande-t-elle sur un rythme de charleston à la sauce dance dans Je me casse. Le titre de la chanson est trompeur : la chanson est, en dehors de ces trois mots, en anglais. Sans surprise, et comme d’habitude, cette langue dominera la compétition. Les représentants de la Russie, de l’Ukraine, de la Serbie, du Danemark, de l’ Espagne et de l’Italie chanteront intégralement dans leur langue locale. Albina offrira un compromis avec son couplet en croate et, dans son Birth of a New Age, le Néerlandais Jeangu Macrooy fera entendre quelques mots en sranan, le créole surinamien. Une première dans l’histoire du concours.

Le Suisse Gjon’s Tears et la Française Barbara Pravi, sont les deux francophones de cette édition. Mais si tous les deux font dans la chanson à émotion, ce sera tout de même « deux salles, deux ambiances ». Le premier interprétera Tout l’univers, une balade épique dans une mise en scène sophistiquée, tandis que la deuxième fera s’épanouir son Voilà dans un cadre intimiste tout en jeu de lumière. Alors que la tendance scénographique cette année est aux couleurs fluo se déclinant dans une large palette de motifs, à commencer par les damiers et quadrillages, la prestation de Barbara Pravi vise l’épure : seule sur scène, sans choriste, elle ira à l’essentiel, rappelant que l’Eurovision est avant tout un concours de chansons.

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