1568," l’annus horribilis" du roi Felipe II d’Espagne

Si 1992 fut l’«annus horribilis» de la reine Elizabeth II, celle du roi Felipe II d’Espagne fut 1568.

Séparation de trois de ses quatre enfants d’avec leurs conjoints et incendie de son cher château de Windsor. Comme l’avait qualifiée elle-même la reine Elizabeth II, 1992 fut son «annus horribilis». Une expression qu’a repris Francis Dupau dans sa biographie consacrée au roi d’Espagne Felipe II, récemment parue aux éditions Perrin, à propos des malheurs qu’a connus ce souverain espagnol en 1568.

Le fils de Charles Quint, monté sur le trône douze ans auparavant et déjà veuf deux fois -de Marie-Manuelle de Portugal et de la reine Marie Ière d’Angleterre- est alors l’époux en troisièmes noces d’Elisabeth de France, la fille du roi Henri II et de Catherine de Médicis. Celle-ci lui a donné deux filles, Isabelle, en 1566, et Catherine, l’année suivante. De santé fragile et affaiblie par ses grossesses répétées, la jeune femme paraît à nouveau enceinte vers le 6 mai 1568, rapporte l’auteur, ajoutant: «Mais les maux dont elle est affligée depuis plusieurs mois s’aggravent. Les signes de la maladie deviennent alarmants: sa tête enfle, sa respiration se fait haletante, de violents maux de tête, des urines chargées de sable, des vomissements. Son état finit par provoquer une fausse-couche le 3 octobre 1568, l’enfant mort-né est une fille de quatre ou cinq mois. Peu de temps après, Elisabeth meurt à son tour».

Felipe II avait fait enfermer son fils Don Carlos

Le décès de sa troisième femme n’est pas le seul qui frappe Felipe II. Cette même année, est mort son seul fils et héritier, né de son premier mariage, Don Carlos (connu aussi sous le nom de Charles d’Autriche). Un fils qu’il n’avait jamais considéré comme apte à lui succéder en raison notamment de problèmes physiques et psychologiques et qu’il avait fait dû faire cloîtrer dans sa chambre quelques mois plus tôt pour cause de trahison, obéissant à la raison d’Etat. «Don Carlos, moins qu’un autre, n’est armé pour supporter longtemps un régime de détention d’autant plus sévère qu’il paraît définitif. Aussi, il semble qu’il ait tenté rapidement de mettre fin à son existence avec le peu de moyens laissés à sa disposition. Il cesse de s’alimenter, obligeant le roi à lui rendre visite et adoucir les conditions de son enfermement», raconte Francis Dupau. Le souverain lui permet d’ouvrir la fenêtre pour voir le paysage et les passants. «Cela est bien peu, et, semaine après semaine, la folie et la haine de Don Carlos envers son père ne font que s’exacerber», explique-t-il, soulignant qu’il fit encore plusieurs tentatives de suicide, avalant une bague sertie d’un gros diamant, ne mangeant pas pendant des jours avant de se goinfrer, buvant de l’eau glacée ou même se couchant nu sur le sol carrelé. Un régime qui finit par avoir raison de sa santé, le 24 juillet 1568. Il n’avait que 23 ans.

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Le roi Felipe II se mariera une quatrième fois, avec sa nièce, l’archiduchesse Anne d’Autriche. Ils auront cinq enfants, dont le futur roi Felipe III qui sera le père d’une autre Anne d’Autriche, la femme de Louis XIII.

* «Philippe II» par Francis Dupau, éditions Perrin, avril 2021, 480 pages. En vente en librairie au tarif de 25 euros.

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