Les huiles essentielles sont-elles (vraiment) écolos ?
Depuis quelques années, le naturel est à la mode et les huiles essentielles sont reines. Que ce soit pour parfumer lessives et cosmétiques, se soigner naturellement ou assainir l’air intérieur, on les retrouve partout.
Le problème ? Naturel ne veut pas forcément dire sain ou écologique. Les huiles essentielles comportent de nombreux risques pour la santé mais ont aussi un impact conséquent sur l’environnement.
Mais alors comment utiliser les « HE » à bon escient ? Et existe-t-il des alternatives à leur utilisation ?
Les huiles essentielles, pas vraiment green
Une huile essentielle est une essence d’un végétal obtenue par distillation à la vapeur d’eau ou par expression mécanique. C’est une substance très concentrée, composée de nombreuses molécules chimiques aux propriétés variées.
La production d’huile essentielle est très plantivore. Ainsi, à partir d’une tonne de plantes fraîches, on n’obtient qu’une dizaine de kilos de lavande fine, 1 à 3 kg de thym ou de géranium rosat. Pire : à peine 60 à 80 g de rose ou 150-200g de néroli (fleur d’oranger). Certaines plantes sont ainsi menacées à cause du succès de leur huile essentielle, comme le bois de rose. On peut ajouter à cela le fait que le procédé de distillation nécessite de grandes quantités d’eau. De plus, pour des huiles essentielles de qualité, il vaut mieux privilégier des plantes sauvages. Cependant, la cueillette sauvage excessive peut déséquilibrer les écosystèmes.
Par ailleurs, l’augmentation de la demande en matière d’huiles essentielles a causé une explosion de la production, avec pour effet une augmentation de la cueillette de plantes sauvages mais aussi de la culture intensive de plantes, aux effets désastreux sur les sols et les nappes phréatiques. En tant que produits très concentrés, les huiles essentielles non bio contiennent aussi tous les résidus de pesticides et autres produits phytosanitaires. De nombreuses plantes à succès viennent de loin et cela pose problème là encore à plusieurs niveaux : exploitation d’une main d’oeuvre parfois sous payée, empreinte carbone du transport, et là encore destruction de la biodiversité.
Enfin, leur utilisation généralisée dans les shampoings, lessives, savons et produits ménagers fait qu’elles sont de plus en plus présentes dans les eaux usées. Or, la toxicité de certaines molécules pourrait affecter la faune aquatique.
Comment utiliser les huiles essentielles à bon escient
Le premier point d’attention est le choix des huiles essentielles, afin de privilégier les produits les plus qualitatifs et respectueux de l’environnement. Pour cela, favorisez les huiles essentielles locales et bio issues de petits producteurs. Nous avons déjà en France une belle diversité de plantes.
Pour les plantes plus lointaines, choisissez des marques françaises et bio en boutique spécialisée. Une huile essentielle de qualité comporte systématiquement le nom botanique de la plante (nom latin, tel que lavandula officinalis par exemple), le chémotype (par exemple, il y a une distinction importante entre le thym à linalol, très doux, et le thym à thymol, aux contre-indications et risques plus nombreux), l’origine géographique (une lavande de Bulgarie est bien moins intéressante qu’une lavande de Provence).
L’usage à éviter autant que possible est l’usage des huiles essentielles dans les cosmétiques maison, lessives et autres produits ménagers, qui requiert de grandes quantités pour très peu d’intérêt. En effet, les huiles essentielles ne sont pas solubles dans l’eau et la chaleur détruit l’efficacité de leurs molécules. Mieux vaut donc les réserver à un usage thérapeutique, en vous formant sur les risques liés à leur utilisation ou en demandant conseil à des professionnels.
Jean Valnet, médecin spécialiste de l’aromathérapie, qualifiait celle-ci de puissance « atomique » de la phytothérapie. Les huiles essentielles ne représentent qu’une petite partie des nombreux produits issus des plantes que l’on peut utiliser pour se soigner au naturel et il est important de les utiliser à bon escient, d’autant qu’à leur impact écologique s’ajoute des risques liés à leur toxicité et à leur potentiel allergisant.
Ainsi, mieux vaut les utiliser uniquement en petite quantité, ponctuellement et sur des choses pour lesquelles il n’y a pas d’alternatives naturelles aussi efficaces : infections virales, maladies tropicales, douleurs chroniques importantes en complément de la phytothérapie classique (endométriose, MICI, etc), inflammation, mycoses et autres infections fongiques…
Les huiles essentielles, quelles alternatives ?
Pour tout ce qui est cosmétique et nettoyage, parfumer les produits n’est pas nécessaire. Mais si vous y tenez, il existe d’autres solutions. Vous pouvez ainsi infuser des peaux d’agrumes bio ou encore des plantes séchées, des gousses de vanille usées dans du vinaigre blanc ou dans les huiles végétales qui vous servent de base en cosmétique, etc. Il est aussi possible d’utiliser à cet effet des fragrances naturelles.
Pour le côté santé, les alternatives sont nombreuses. Par exemple, connaissez-vous les hydrolats ? Obtenus lors de la distillation des huiles essentielles, ces eaux florales se chargent d’une partie des molécules de la plante. Leur utilisation comporte de nombreux avantages : très efficaces mais moins concentrées et moins toxiques que les « HE », leur forme aqueuse rend aussi leur utilisation bien plus simple.
Plus classiques, les infusions sont bien plus intéressantes qu’elles n’en ont l’air, à condition de choisir des plantes de qualité et non des sachets contenant juste 2g de poussière de plante. Les infusions ont tout bon : possibilité de faire de nombreux mélanges selon les vertus et saveurs recherchées, solution très économique et simple d’usage, peu de risques… Bref, que ce soit pour soulager les infections hivernales, les règles douloureuses, améliorer la qualité du sommeil, la circulation, la digestion ou encore se détendre, réhabilitons la tisane ! Vous pouvez demander conseil en herboristerie et boutiques spécialisées.
Enfin, n’hésitez pas à consulter phytothérapeutes, pharmaciens, naturopathes et autres qui pourront aussi vous recommander des alternatives très efficaces et qualitatives selon vos besoins, tels que la gemmothérapie, les teintures mères et autres extraits de plantes fraîches ou sèches. La planète et votre santé vous remercieront !
Par Anne Plantier, naturopathe certifiée et validée du réseau Médoucine.
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